ondée en 1980, c’est l’arrivée d’une nouvelle équipe de direction en 2021 qui a souligné la volonté de « transformer l’institution et de la mettre au goût du jour », note sa directrice Alba Balcells, qui souhaite en faire « le premier interlocuteur et moteur du secteur vitivinicole catalan au niveau publique ». Ainsi, un plan stratégique à horizon 2025 – #HoritzóINCAVI2025 – a été lancé en juillet 2022, articulé autour de 23 projets répartis en trois grands chapitres qui visent à assurer la transformation du secteur.
Pour ce faire, les moyens sont au rendez-vous : le budget annuel de l’INCAVI a été doublé et un financement extraordinaire d’environ 3 millions d’euros a été mis sur la table. Digitalisation, amélioration des outils visant une meilleure traçabilité des produits (à travers la blockchain par exemple) et renforcement de la promotion et de la dissémination des vins catalans font partie des axes stratégiques. Les objectifs plus orientés sur la viticulture ne sont pas en reste, notamment les études sur le stress hydrique, la recherche sur les cépages résistants – à l’instar de la malvasia de Sitges – pour combattre les effets du changement climatique et un soutien aux vignobles de montagne (situés à plus de 500 mètres d’altitude et/ou avec une pente supérieure à 30%) dont la Catalogne compte une superficie de 6 600 hectares.
Il faut dire que dans certains domaines il y a urgence, comme en témoigne la récolte 2023. Démarrées il y a une quinzaine de jours, les vendanges risquent d’accuser une forte baisse de potentiel volumique, estimée entre 30 et 80% selon les secteurs. En cause : une sécheresse qui s’abat sur la région depuis deux ans. La récupération et le redéploiement de cépages anciens jouent ainsi un rôle primordial dans la stratégie de l’INCAVI. « La collaboration entre les techniciens viticoles, les caves, les conseils régulateurs et l’INCAVI a permis de réintégrer 18 cépages oubliés au cours des dix dernières années », se félicite Alba Balcells. Au mois de juillet, le carinyena roja et le verdiell se sont ajoutés aux forcada, moneu, gonfaus et autre pirene qui figurent déjà sur la liste des cépages autorisés. « L’INCAVI travaille actuellement à la récupération d’une nouvelle famille de cépages, jusqu’à 20, qui seront intégrés au cours des années à venir. A l’heure actuelle, toutes les DO de Catalogne étudient la récupération d’au moins une variété ancienne dans le cadre des projets menés avec l’institut ».
Dans le même temps, au titre de l’alliance i4Vi, différents projets visant à atténuer les effets du changement climatique et à renforcer la pertinence de l’offre catalane se focaliseront sur des aspects tels que la viticulture de précision, les cépages résistants, la réduction de l’utilisation du cuivre, la biodiversité, les levures indigènes, les méthodes de vinification novatrices et de nouveaux produits inspirés par la demande du marché. La viticulture régénératrice représente également un axe de développement important dans la région, une association dédiée ayant été fondée en 2021 par Familia Torres, Clos Mogador, Can Feixes, Jean Leon et AgroAssessor.
L’oenotourisme constitue un autre axe important du plan stratégique, avec la mise en valeur de la centaine de coopératives modernistes conçues par l’architecte Cèsar Martinell, baptisées les « cathédrales du vin ». Crédit : Maria Rosa Ferré
Simultanément, et pour répondre aux exigences évolutives en matière de traçabilité, d’étiquetage et d’informations nutritionnelles, l’INCAVI s’est doté d’un laboratoire de pointe, inauguré en 2023. Bénéficiant d’un financement de plus d’un million d’euros, il permet de doubler la capacité d’analyses des deux laboratoires existants – à Vilafranca et Reus – et de quintupler la production de levures indigènes, « un élément clé du processus de vinification qui facilite l’identité du terroir », note la directrice. Destiné à devenir « un centre de référence pour les analyses de cave », l’INCAVI LAB a également un autre intérêt : « Il élimine la nécessité de se rendre en France ou dans d’autres régions d’Espagne » pour réaliser certaines analyses.
Enfin, pour mieux valoriser les vins catalans et soutenir les 750 caves de la région élaborant 350 millions de bouteilles (sur 57 000 ha), l’INCAVI entend promouvoir la crème de la production régionale, baptisée Vinos de Finca Calificada. « Il s’agit de vins montrant la plus haute expression du lien entre la filière et son territoire », précise Alba Balcells. « Ce projet vise à améliorer le positionnement des vins catalans sur des marchés internationaux clés à travers ces fleurons ». Rendements inférieurs de 15% aux maximums autorisés dans l’appellation, notes de dégustation d’agrément supérieures à celles de leurs homologues, historique de reconnaissance et de prestige d’une durée d’au moins dix ans et terroir spécifique, sont autant de critères requis pour prétendre à cette mention que seuls 14 domaines ont réussi à décrocher jusqu’à présent.