’achevant ce lundi 17 juillet, la campagne de précandidature à l’arrachage sanitaire de Gironde ne fait pas le plein. Depuis l’ouverture le lundi 5 juin, « 664 demandes ont été déposées. Un tiers de ces demandes concernerait des arrêts d'exploitation : les deux tiers des souhaits de reconversion. Elles représenteraient pour l'instant 5 400 hectares de vignes, qui seraient pour moitié renaturées, pour moitié diversifiées » déclare Allan Sichel, président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux, en assemblée générale ce 10 juillet. Alors que le plan cofinancé à 37 millions d’euros par l’État et 19 millions € par le CIVB vise l’arrachage de 9 500 hectares, les candidatures ne représentent que 57 % de l’enveloppe à date. D’ici une semaine, « j’espère que l’on aura davantage de candidatures » glisse le préfet de Gironde, Étienne Guyot, ajoutant que « ce n’est pas fini. L’objectif de pouvoir faire en sorte qu’on puisse toucher tout le monde. »
« Aujourd’hui, il y a urgence pour renvoyer de la valeur dans les exploitations. Ce n’est pas une urgence, c’est trop tard pour un certain nombre. Le plan peut amener un peu d’espoir. Mais il va falloir aller très vite » alerte Jean-Samuel Eynard, le président de la FDSEA 33, qui prend à partie l’assemblée générale du CIVB : « dans le cadre de la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE), il y a le respect de ses fournisseurs. Aujourd’hui, la filière des vins de Bordeaux ne respecte pas ses fournisseurs et il y a trop de vignerons qui sont insuffisamment rémunérés et qui n’y arrivent plus. La conséquence, ce sont des vignes en friche. Qui toutes malheureusement ne s’arracheront pas. » La faute à un dispositif d’arrachage insatisfaisant, entre ses contraintes de boisement/jachère, et son prix, 6 000 €/ha*.


« Quand on voit la masse de vignes abandonnées et qu’aujourd’hui on n’est qu’à 5 400 hectares qui sont pré-engagées dans le plan d’arrachage, ça ne paraît pas du tout en phase avec le visuel que l’on a quand on traverse la Gironde » pointe Jean-Samuel Eynard. Pour Dominique Techer, le porte-parole de la Confédération Paysanne, le plan est insuffisant, « il faudrait arracher 30 000 ha » (d’après un sondage de la Chambre d’Agiculture, 35 000 ha sont actuellement en difficulté au sein de 1 320 domaines viticoles).
« Ce ce n’est peut-être pas suffisant, mais en même temps on voit que l’appel à candidature monte doucement en puissance » relative le préfet, Étienne Guyot ajoutant mesurer « à quel point pour un viticulteur, ça peut être extrêmement douloureux et difficile » de demander l’aide à l’arrachage, car « c’est très personnel, affectif et identitaire : c’est un moment difficile humainement, psychologiquement, personnellement parlant. Et en même temps, il faut rebondir. »


Si « face à nous, le marché ne reprend pas comme nous l'avions espéré en sortie de crise sanitaire », Allan Sichel affirme une « ambition forte, celle d'être le premier vignoble RSE au monde. Un vignoble qui s'empare des enjeux du développement durable, qu'ils soient environnementaux, sociaux ou économiques. » Le CIVB se fixe l’objectif d’atteindre 100 % de surfaces sous certification environnementale en 2030 (pour 75 % en 2020), de réduire de 74 % son empreinte carbone en 2050 (pour -37 % en 2019) et d’arriver à 2 000 entreprises certifiées Bordeaux Cultivons Demain en 2030 (pour 85 en 2023). Sur ce dernier point, « c'est encore modeste, mais la courbe est exponentielle. Elle est la preuve que notre ambition collective est juste » conclut Allan Sichel.
« Il faudra trouver une solution, parce que quand on a pour voisin des vignes en friche, ça a un effet démultiplicateur sur l’activité du mildiou, très fort au vu des conditions climatiques cette année » prévient Jean-Samuel Eynard, appelant l’administration à intervenir.
* : Indemnisation diminuée du montant de la créance des Cotisations Volontaires Obligatoires (CVO), comme voté ce 10 juillet par l’assemblée générale du CIVB.