vec les refroidissements nocturnes, les vignerons ont chaud de bon matin. « Ça va piquer demain. Il y a un risque de gelée blanche sur des zones entières du territoire » résume Emmanuel Buisson, le directeur de la recherche et de l’innovation chez Weenat. D’après ses dernières prévisions météo (voir carte ci-dessous), le gel ayant touché localement des vignobles de Bourgogne, de Champagne et de Loire cette nuit va s’étendre demain matin dans le Sud-Ouest.
Dans le pays nantais, « les nuits sont restées plutôt clémentes jusqu’à ce jour. On a eu -0,1°C dans les bas-fonds. Peu de systèmes de protection ont été mis en route. C’est la nuit prochaine qui est la plus risquée » indique Vincent Dugué, du vignoble des frères Couillaud en Muscadet, où l’on commence à avoir des pointes vertes : « il y a de la sensibilité » aux gelées. À Chablis, « c’était assez hétérogène cette nuit : les sondes vont de -6 à -1°C. Ce qui nous a préservé, c’est qu’il y a eu beaucoup de vent ce matin, avec des pointes à 30-35 km/h. Ce qui permet de protéger les bourgeons comme les baguettes ne sont pas attachées » rapporte Thierry Mothe, secrétaire général des Vignerons Indépendants. Si les fils chauffants, éoliennes et systèmes d’aspersion étaient déclenchées cette nuit, il s’agissait d’« une mise en route. Le risque est plus important la prochaine nuit. Il faut être vigilant » pointe le vigneron, notant des vignes allant du bourgeon gonflé à la pointe rouge.


Dans le bordelais, on a enregistré des températures négatives dans les zones habituellement gélives du Libournais, des Graves et du Sauternais rapporte Annabel Garçon, conseillère viticole chez Chambre d'agriculture de la Gironde. Indiquant des stades phénologique allant de la pointe verte à quelques éclatements de bourgeons, la technicienne note que « la végétation peut encore descendre en dessous de zéro degré. Tout dépend de la phénologie, c’est très hétérogène selon les stratégies de taille tardive, de taille de janvier sans nettoyer les astes… » D’après les dernières prévisions, « le coup de froid s’annonce plus sévère la nuit prochaine. Sans avoir rien avoir à voir avec l’année précédente : on est ici sur des gelées blanches matinales » explique Annabel Garçon, qui rappelle qu’« il faudra attendre 10 à 15 jours pour voir les dégâts. Il faut rester vigilant, on ne sait pas comment la vigne va se comporter en termes de frein de croissance et de ralentissement. »
« Les prévisions se sont révélées exactes jusqu’à présent » note le docteur en agrométéorologie Serge Zaka, qui relève des gels de -1 à -3°C dans les bas fonds ce 4 avril. De quoi entraîner « peut-être quelques pertes de l’ordre de 5 % sur les cépages les plus précoces de Loire et de Champagne » indique le consultant, notant la « problématique de la nuit de demain : le risque s’étend au Sud-Ouest où les vignes sont plus en avance, dans le Médoc, le Sauternais, les Graves… Avec -1 à -2°C sur pointe verte, on peut avoir 10 à 15 % de dégâts. Ce qui n’est pas énorme par rapport aux gels de choc de 2020 et 2021. Mais c’est phénomène à surveiller, comme il peut se cumuler. »
Après le coup de froid de mercredi, il n’y aurait plus que des pans du Nord-Est soumis au gel (Champagne, Bourgogne et Alsace). « Il faut rester vigilant cette fin de semaine, il y aura potentiellement des gels samedi et dimanche en Alsace, Centre Loire et Champagne » prévient Emmanuel Buisson.
WeFrost étant une carte de prévision au kilomètre carré des températures moyennes les plus basses mesurées sous abri, Emmanuel Buisson prévient qu'en fond de vallée cela peut descendre encore plus bas selon les conditions (humidité, vent…).