usqu’ici, la France reste un pays d’amateurs de vins plus que de bières : chaque année, les Français consomment 40 litres de vin, contre 32 litres pour les bières. Mais les équilibres pourraient s’inverser à l’avenir, car la tendance est lourde : les Français consomment toujours moins de boissons alcoolisées, réduisant nettement les achats de vins et donnant toujours plus de poids aux bières. D’après le dernier bilan de l’Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies (OFDT), 10,56 litres d’alcool pur ont été vendus en France en 2021 par habitant de plus de 15 ans, en forte chute par rapport aux 26 litres recensés en 1961. Cette chute des consommations s’explique essentiellement par l’érosion continue des achats de vins, passés de 20 à 5,74 litres en 60 ans. Tandis que les consommations de bières et spiritueux restent globalement stables, à respectivement 2,4 et 2,3 litres. Notant que la consommation de vin a chuté de 70 % en 60 ans, Vin & Société précise que « les bières et spiritueux ont certes aussi baissé, mais dans de moindres proportions en comparaison, respectivement de 15 et 8 % ». Sur les 6 millions d’hectolitres d’alcool pur commercialisés en 2021, le vin représente 54 % des volumes, les bières 23 %, les spiritueux 21 % et les autres boissons alcoolisées 2 % (cidres, porto…).
Si ce n’est que depuis 2019 que les bières ont dépassé les spiritueux dans les statistiques de l’OFDT, leur dynamique reste forte face au repli du vin. Une tendance qui se traduit par des changements générationnels de consommation des boissons alcoolisées. D’après les panels Kantar, le panier d’achat de tous les Français a vu le poids des vins chuter au profit des bières entre 2014 et 2021, avec une bascule d’autant plus importante que les consommateurs sont jeunes. Chez les moins de 35 ans, les vins tranquilles sont passés de 31 à 23 % des achats de boissons alcoolisées, tandis que les bières passaient de 24 à 39 %. Pour les 35 à 49 ans, les vins tranquilles ont chuté de 40 à 32 %, les bières ont bondi de 17 à 28 %. Chez les 50-65 ans, l’achat de vins tranquilles chute de 50 à 42 %, les bières grimpent de 13 à 18 %. Pour les plus de 65 ans, les vins tranquilles reculent de 55 à 50 %, quand la bière se consolide de 9 à 12 %.


Si un croisement entre la déconsommation de vin et la croissance de la bière pourrait être envisageable dans 20 à 30 temps selon les tendances actuelles, Vin & Société appelle à pondérer la vision de concurrence avec la bière qui monte dans la filière vin. « Les brasseurs ne sont évidemment pas les ennemis des producteurs de vin. Il ne faut pas créer des clivages là où il n’y en a pas ou chercher à opposer les produits » indique Vin & Société à Vitisphere, ajoutant que « ce que nous voulons aujourd’hui, c’est montrer simplement que le vin – notamment les blancs, les vins pétillants, les rosés qui connaissent une forte croissance – peut très bien être présent dans des moments de convivialité où on privilégie aujourd’hui la bière. Le vin concentre tous les atouts et les valeurs que recherchent les jeunes générations : un produit local, français, de qualité ; de nombreuses exploitations sont engagées dans une démarche de certification environnementale. »
* : S’appuyant « sur les montants des taxes perçues par la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) », ces « estimations reposent sur les volumes "mis à la consommation" » avec des « marges d’incertitudes » comme « des boissons peuvent être vendues ou consommées sans que des taxes aient été acquittées en France (achats dans les pays frontaliers, autoconsommation des producteurs…). Réciproquement, la consommation hors de France des Français, touristes ou résidents permanents n’est pas prise en compte ».