ain de place, de temps, de qualité… Vincent Gauget ne compte plus les avantages de la flottation face au débourbage statique par le froid. « Elle est devenue essentielle à mon travail, et mon activité s’est grandement développée grâce à cette technique », explique le vigneron et gérant de l’SARL Vigne en Vin, à Béziers, dans l’Hérault. En 2011, il a acheté son premier appareil, un Ecoflot Della Toffola 250 (pour 250 hl/h), sur les conseils de David Roussel, dirigeant de Sovimat, un bureau d'études vinicole basé à Béziers également. « C’est un équipement simple et peu onéreux. Il faut compter entre 3 000 et 10 000 € selon le débit. Il y a peu de consommables et il est inutile de refroidir les moûts contrairement à un débourbage classique. La rapidité du procédé est sans conteste. L’augmentation de la production de vins rosés dans notre région a largement contribué au développement de la flottation. Aujourd’hui, de plus en plus de caves particulières s’équipent », affirme David Roussel.
En plus de ses propres moûts, Vincent Gauget a commencé à flotter des moûts de négoces et de caves coopératives qui voulaient les débourber rapidement. Si bien qu’il s’est équipé d’un deuxième flottateur en 2016, traitant 400 hl/h, puis d'un troisième en 2020. « Aujourd’hui, je débourbe 30 000 hl par flottation. Des moûts blancs, rosés et rouges de thermovinification. Je choisis les enzymes, les colles, le gaz – azote ou air comprimé – et je règle le flottateur selon la turbidité finale demandée par mes clients. C’est un système fabuleux », décrit-il.
À la fin de la flottation, il filtre les bourbes – les mousses qui surnagent au-dessus du jus clair – et les envoie séparément à ses clients. Huit à dix heures après l'arrivée des raisins, les moûts sont prêts à repartir chez leur propriétaire en camion-citerne et à partir en fermentation. « En débourbage statique, il faudrait entre 24 et 48h », ajoute-t-il.
Au domaine Saint-Martin, à Leuc, dans l’Aude, c’est le troisième millésime pour les deux flottateurs Ecoflot 300. « Le seul inconvénient, c’est que cela nous oblige à récolter, presser, débourber et mettre en fermentation le même jour », constate, en plaisantant, Henri Cases, le propriétaire. Ce dernier vinifie 10 000 hl : 1 000 de vins blancs, 2 000 de rosés et 7 000 de rouges thermovinifiés. Pour l'instant, il ne débourbe que les blancs et rosés par flottation. Faute de temps pour régler l'appareil, il n'y passe pas encore ses rouges thermovinifiés qu'il débourbe toujours statiquement au froid.
Auparavant, Henri Cases refroidissait ses jus blancs et rosés entre 5 et 7 °C, attendant souvent 48 heures leur débourbage complet. « Avec la flottation, j'obtiens des moûts à 150 NTU en à peine 2 heures. J’ajoute les enzymes dépectinisantes au fur et à mesure du remplissage de la cuve. Une heure après, je démarre la flottation en ajoutant de la protéine de pois. Je fais tourner le flottateur pendant 1 heure en injectant de l'azote, et c'est fini ! Les moûts sont beaucoup moins oxydés et donc plus aromatiques qu'après un débourbage statique car ils sont traités plus rapidement et protégés par l'azote. Aussi, ai-je diminué mon sulfitage. »
Dorénavant, il sulfite à 5 g/hl avant le levurage quand il ajoutait 8 g/hl en débourbage statique. « J’ai également beaucoup moins de goûts réduits pendant la fermentation. Mais il faut faire attention à ne pas trop clarifier. C’est un peu le danger de la flottation, si elle est mal réglée, on peut descendre très bas en turbidité », ajoute-t-il.
Une clarification poussée, c'est ce qu'obtient la Cave des producteurs de Jurançon, à Gan, dans les Pyrénées-Atlantiques. « Avec la flottation, nos moûts sortent entre 50 et 100 NTU de turbidité. Mais nous visons 100 à 200 NTU pour les vins secs et 400 à 500 pour les moelleux. À cette fin, nous continuons à débourber classiquement 40 % de notre volume pour disposer de bourbes que nous réincorporons aux moûts flottés. Nous obtenons ainsi des moûts d’une qualité très satisfaisante. La flottation a grandement amélioré notre organisation », détaille Pierre Mourterot, maître de chai de la cave.
C'est en 2016 que la cave s'est équipée d’un flottateur Performance 400 d’Agrovin car elle manquait de frigories pour débourber ses moûts. Aujourd’hui, elle flotte 60 % de ses 30 000 hl de petit et gros manseng. « La flottation correspond bien à notre rythme, nos vendanges s’étalant sur plusieurs semaines avec nos secs, moelleux et liquoreux », ajoute Pierre Mourterot. Autre avantage, selon lui : ce procédé produit moins de bourbes. « Nous avons 15 % de mousse sur une cuve de 250 hl contre 25 % avec un débourbage statique », précise-t-il. Une différence que constatent aussi Vincent Gauget et Henri Cases.
« La flottation était le parent pauvre de la clarification car, dans les années 2000, on pensait que le débourbage par le froid était plus noble. Aujourd’hui, Elle devient indispensable en raison de son faible coût énergétique », constate Jean-Charles Palloure, gérant d’Aude Œnologie. Il y a dix ans, quand Vincent Gauget a opté pour la flottation, il a tout de suite vu la différence. « À l’époque, ma facture d’électricité a facilement baissé de 2 000 €. Avec le coût de l’énergie aujourd’hui, je fais certainement encore davantage d'économies », soutient-il. Henri Cases aussi voit l'effet de l’abandon du débourbage statique sur sa facture d'électricité, même s'il ne peut pas quantifier les économies qu'il réalise.


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