’il est analysé et perçu comme tel, « chaque défi peut devenir une opportunité » pose Pierre Mansour, le directeur des achats vins de Wine Society (Grande-Bretagne), ce lundi 20 juin à Bordeaux lors du symposium "Act for change" organisé par Vinexposium. Soulignant qu’il n’existe pas de boule de cristal pour prédire l’avenir de la consommation de vins, l’expert du marché britannique partage les mêmes trois tendances d’avenir avec Cathy Van Zyl, la rédactrice adjointe du guide Platter’s (Afrique du Sud). Pour elle, les trois tendances d’avenir sont « bien-être, authenticité et durabilité ».
En termes de consommation plus saine « il y a de la place pour les vins à faibles taux de calories » esquisse Pierre Mansour, qui interroge : « qui sait la place que prendront les vins désalcoolisés en 2030 ? » D’autant plus que la consommation de viande diminue imposant de trouver de nouveaux accords entre vins et mets végétariens. Pour l’opérateur anglais, la durabilité et l’authenticité vont de pair : « nous savons qu’au vignoble, les pratiques durables permettent la pure expression du terroir. C’est ce que j’appelle les vins honnêtes, qui expriment l’origine de leur milieu de production » explique-t-il, citant le cas du Beaujolais « où l’on trouve une expression pure du fruité, de la minéralité et une acidité rafraichissante. C’est une tendance que l’on retrouve dans le monde entier (en Australie, en Californie…). Une authenticité qui ne peut être répliquée nulle. »
Ces engagements honnêtes dans la durabilité n’épargnent aucun vin. « Je pense qu’avec les réseaux sociaux, il faut de plus en plus dire ce que l’on fait et faire ce que l’on dit. Le temps du blabla est derrière nous » souligne Olivier Bernard, à la tête du domaine de Chevalier (Pessac-Léognan), qui pondère immédiatement : « mais en même temps je vois de plus en plus de vins produits avec des stars et avoir un succès commercial sans que le fait que le vin soit bio ou biodynamique ait un impact… Parce qu’il y a une célébrité. » Un écueil que James Law, directeur de marque et de développement pour la distillerie East London Company, espère contourner avec la transparence de la technologie de la blockchain : « le concept d’un livre de compte collaboratif permet que les gens croient dans l’authenticité des déclarations de durabilité. C’est une véritable valeur ajoutée. C’est une bonne façon pour les entreprises de prouver leurs déclarations de durabilité. »
Ce besoin d’honnêteté dans les vins est d’autant plus fort que les consommateurs demandent des preuves concrètes note Lulie Halstead, la directrice des agences Wine Intelligence et IWSR. Dans un sondage réalisé cette année, 54 % des consommateurs de marchés export attendent que les marques de vins et spiritueux soutiennent des causes locales. Soit une hausse de 15 points en deux ans. « Une tendance accélérée par la pandémie de covid » note l’analyste. « Nous sommes maintenant obligés de fournir plus d’informations aux consommateurs, au-delà des obligations légales. Ils veulent vérifier que ce que l’on dit être durable l’est réellement » précise Pierre Mansour, relevant qu’il y a cependant un fossé entre les demandes des consommateurs et la réalité de leur consommation. L’opérateur anglais citant des reproches de consommateurs sur des degrés d’alcool trop élevés, aboutissant à la proposition d’une gamme proposant de plus faibles degrés naturels (avec des bulles, des vins d’Allemagne…), mais les consommateurs n’ont… pas suivi. « On peut beaucoup parler de durabilité, mais il faut prendre des actions concrètes. Chaque marque va devoir démontrer la véracité de ce qu’elle dit représenter environnementalement, et au-delà (socialement aussi) » analyse Pierre Mansour, chantre des « vins honnêtes ».