l’heure du bilan 2021, le constat est sans appel à la tête des vins de Bordeaux : « parmi les éléments douloureux, rappelons nos difficultés commerciales et notre niveau de vente en volumes de vins toujours trop faible, particulièrement en France, tout comme des prix en rayon ou sur le marché du vrac*, indignes pour toute notre filière » pose Bernard Farges, le président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB), ce 13 décembre en assemblée générale (à la Cité du Vin). Alors que la filière girondine se veut pionnière en termes de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE), « nous ne pouvons pas nous résoudre à voir des entreprises sombrer, voir l’image de nos vins se dégrader, parce que nous sommes incapables de mettre en place une discipline collective nous préservant des actes de dumping de telle ou telle de nos entreprises, qu’elle soit du négoce, de la coopération, ou de la production » poursuit le viticulteur bordelais à la tribune.


Estimant que chaque famille a sa part de responsabilités dans les difficultés actuelles, le président du CIVB renvoie cette situation commerciale collective à des comportements individuels délétères. Bernard Farges déclare qu’« à chaque fois que l’un de nous ne respecte pas le travail de l’autre, à chaque fois qu’un courtier porte une proposition indécente, qu’un négociant achète du vin à un prix indigne, que l’un d’entre nous, négoce, coopérative, indépendant, fait ou accepte une offre nuisible d’un distributeur, ce n’est pas de la Responsabilité Sociétale des Entreprises, c’est de l’Irresponsabilité Sociétale des Entreprises, c’est du mal fait à chacun de nous. »
Pour changer la donne dès 2022, Bernard Farges indique que la filière bordelaise devra « progresser sur notre capacité à piloter notre commercialisation collectivement si nous voulons agir et ne plus subir, en constatant régulièrement notre manque de responsabilité individuelle comme je l’ai décrit précédemment. Nos outils collectifs, comme la réserve interprofessionnelle, peuvent être améliorés et modernisés pour répondre à cet enjeu ». Et d’annoncer que « des propositions ambitieuses seront sur la table très vite pour tenter de répondre à ce besoin urgent ».
Pour se relancer dès 2022, le CIVB indique également revenir à des budgets de promotion conformes à son historique, après des baisses notables en 2020 et 2021 (suite aux baisses des sorties à la propriété, qui doivent avoisiner 4,2 à 4,4 millions d'hectolitres en 2021). L’an prochain, le CIVB allouera 20,7 millions d’euros à ses actions marketing, soit +40 % par rapport à 2021. Avec 4,1 millions € sur la France, 3,5 millions aux États-Unis, 3 millions € sur la Chine et Hong Kong, 1,7 million € sur la Grande Bretagne… Misant sur un retour à la normale, le CIVB compte accompagner « la relance et le renouveau » en 2022. Rappelant que la première tournée de la Saint-Vincent des vins de Bordeaux avait précédé le premier confinement (24-26 janvier 2020), Bernard Farges espère que la fin de la période covid sera annoncée par la prochaine Tournée des Vins de Bordeaux (du 3 au 5 mars prochains).
* : Du 29 novembre au 10 décembre, le tonneau de Bordeaux rouge s'échange 1 040 euros en moyenne. Sur le mois de novembre 2021, le tonneau de Bordeaux rouge conventionnel affiche un prix moyen de 1 000 €, quand le bio monte à 2 000 €.
« Nous arrivons à la fin de l’année 2021, et pouvons en faire un bilan à travers les points négatifs et les points positifs - il y en a aussi » souligne Bernard Farges dans son discours. « Au mois de mars les taxes américaines ont été levées temporairement et ont amené une reprise spectaculaire de nos expéditions vers ce pays si important pour celles-ci » note le viticulteur, ajoutant que « la valorisation de nos exportations s’élève à plus de 2,3 milliards d’euros. Cela constitue un record et la progression des grands crus y participe, mais ce sont bien tous nos vins qui ont fortement progressé. » Sur un autre dossier, « satisfaisons-nous aussi d’avoir vu la justice reconnaître les torts portés par Alerte Aux Toxiques aux vins de Bordeaux. J’en profite pour rappeler que nous ne sommes pas les défenseurs du label Haute avaleur Environnementale (HVE) dans ce procès. Ce qui a été condamné, c’est d’avoir écrit que les vins de Bordeaux étaient dangereux, que les vins de Bordeaux tuaient. Tout le reste est un nuage de fumée visant à masquer cela. »