in 2022, les vignerons auront accès à la concentration en lipides de leurs moûts via une nouvelle analyse en cours de développement. « Nous travaillons depuis un an et demi sur cette analyse. Deux méthodes ont été validées en interne dans notre laboratoire. Elles sont robustes et précises mais nécessitent encore des optimisations » annonce Elise Salanouve, chef de projet R&D au laboratoire Nyséos lors d’une conférence au Sitevi à Montpellier. Le paramètre à revoir en priorité ? le temps d’analyse. « Il nous faut aujourd’hui 72 heures entre la réception de l’échantillon et le rendu du résultat. Nous savons que ce délai n’est pas satisfaisant » constate la chef de projet.
En effet, la décision de débourber sévèrement ou non doit se prendre en quelques heures seulement après le pressurage du jus. L'analyse doit donc être plus rapide. « Les lipides, acides gras et phytostérols, sont présents dans les bourbes. Les phytostérols, notamment, permettent une bonne assimilation de l’azote par la levure. Mais il n’y a pas de corrélation directe entre la turbidité et leur concentration. Il n’existe pas, à ce jour, de moyen pratique et rapide pour le quantifier » rappelle Daniel Granès, directeur scientifique de l’ICV. « Ils ont leur rôle à jouer mais nous ne les connaissons que trop peu. La recherche avance, notamment via le projet CASDAR Divin Cidres ».
Selon lui, les fermentations languissantes observées ses dernières années pourraient être, en partie, dues à la faible concentration en lipides des moûts. « Le débourbage permet d’obtenir des vins blancs et rosés plus aromatiques, avec davantage d’esters, mais il entraine un risque de carence lipidique qui engendre des fermentations difficiles, voire des arrêts. Il augmente également la production d’acide acétique » confirme Jean-Roch Mouret, directeur de recherche à l’INRAE, qui étudie l’équilibre encore inconnu azote/lipides dans les moûts.
A l’IFV, Philippe Cottereau travaille sur le développement d’itinéraires techniques pour augmenter le caractère fruité des vins. Il fait les mêmes constats que Jean-Roch Mouret avec une indication en plus. « La présence accrue de lipides s’est traduite par une augmentation significative de la concentration en thiols volatils sur un vin blanc » ajoute-t-il. Mais le pilotage général de la nutrition reste complexe. « Il ne faut pas oublier également l’impact de l’oxygène, de la température… peut-être même des vitamines ? Nous découvrons petit à petit tous ces facteurs » nuance Daniel Granès.