es anthocyanes ne font pas que donner sa couleur au vin. Elles modifient aussi son goût. C’est ce qu’a expliqué Maria Alessandra Paissoni, de l’Université de Turin, lors de la dernière session Enoforum dédiée à l’œnologie.
« Des travaux de 2013 ont montré que les anthocyanes activent les récepteurs de l’amertume. Une publication de 2015 explique qu’elles peuvent précipiter les protéines salivaires. Et j’ai aussi répertorié quatre études sensorielles dans lesquelles les dégustateurs attribuent aux anthocyanes de la sécheresse ou du volume en bouche » a illustré la chercheuse.
Maria Alessandra Paissoni a profité de son doctorat pour creuser le sujet. Elle a commencé par extraire toutes les anthocyanes d’un barbera et d’un nebbiolo vinifiés en 2015. « Puis je les ai fractionnées en trois groupes selon leur degré d’acétylation, glucoside, acétyl-glucoside, ou coumaroyl-glucoside » a-t-elle expliqué.


Elle a ensuite mis chaque fraction en présence de protéines salivaires. « Les anthocyanes les ont d’autant plus fait précipiter que leur degré d’acétylation était élevé » a indiqué la chercheuse. L’italienne a aussi organisé des séances d’analyse sensorielle avec des étudiants entraînés de l’Institut des Sciences de la Vigne et du Vin de Bordeaux.
« Nous avons d’abord déterminé les seuils de perceptions des anthocyanes dans des solutions modèles de vin » a repris Maria Alessandra Paissoni. Les étudiants ont perçu la fraction coumaroyl-glucoside dès 58 mg/L. Il a fallu grimper à 297 mg/L pour qu’ils détectent les molécules les moins acétylées.
Elle leur a également demandé de décrire les sensations ressenties en dégustant des solutions à 12 % d’alcool, 3,5 de pH et 4g/L d’acide tartrique, additionnées soit de 1g/L d’anthocyanes issues de la pellicule, soit de 1g/L d’anthocyanes des pépins, de 300mg/L d’une fraction totale d’anthocyanes, ou de 400 mg/L de la fraction glucoside. « Amertume », « agressivité », « salinité » et « chaleur » sont les termes qu’ils ont le plus utilisés.
« Quand je leur ai demandé de noter l’intensité de ces descripteurs, c’est dans la solution contenant les anthocyanes de la pellicule qu’ils ont jugé l’astringence la plus forte » a poursuivi Maria Alessandra Paissoni.
Quand elle a ajouté à cette solution l’extrait la fraction totale d’anthocyanes ou la fraction glucoside, la perception de l’astringence a diminué. « J’ai obtenu des résultats opposés en partant des anthocyanes des pépins » a-t-elle déclaré. Des nouveaux essais sont nécessaires pour comprendre toutes ces interactions.