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Louis-Fabrice Latour : « les vins français ont gagné la bataille de la valorisation »
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Louis-Fabrice Latour : « les vins français ont gagné la bataille de la valorisation »

Par Alexandre Abellan Le 21 février 2013
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Louis-Fabrice Latour : « les vins français ont gagné la bataille de la valorisation »
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résident du directoire de la maison Louis bourguignonne Louis Latour, Louis-Fabrice Latour préside également la Fédération des Exportateurs de Vins et Spiritueux de France (FEVS). A l'occasion de la publication des performances à l'export des vins et spiritueux français, il revient sur les nouveaux records de valorisation (ou plutôt de « premiumisation ») des vins français, ainsi que sur la conjoncture 2013 où pèse actuellement les risques de change. Il est également question du maintien d'une filière viticole française forte et des orientations qui doivent être prises pour se faire.

Lors de cet entretien, Louis-Fabrice Latour était accompagné de Nicolas Ozanam, délégué général de la FEVS et de l'UMVIN.

Malgré un environnement macro-économique morose, 11 milliards d'euros de vins et spiritueux français ont été exportés en 2012.

Louis-Fabrice Latour : nous sommes très satisfaits de cette belle progression. On ne peut pas dire que nous l'avions prévue, mais il y a un an la FEVS se montrait confiante pour 2012. Nous pensions d'abord que 2012 consoliderait les bons résultats de 2011, mais au final ils constituent un record historique ! Ce bilan est encourageant pour l'ensemble des vins et spiritueux français et ce dans toutes les régions à travers le monde. 2012 marque une progression harmonieuse. Nos marchés affichent en effet de belles progressions, que ce soit en Chine en Asie cette année encore, mais également en Amérique et en Europe, grâce en particulier à la Russie.

La demande de l'Union Européenne se redresse petit à petit. Sans retrouver le niveau de 2007, l'Europe est toujours le premier marché des vins français, représentant 47 % des volumes exportés. Un vent optimiste souffle également sur l'Amérique, le marché américain rebondit enfin. On peut cependant mettre un bémol à ces tendances. La progression chinoise devrait rester dynamique même si sans doute pas aussi impressionante qu'auparavant. Il y reste de bonnes perspectives, car ce marché est loin d'être arrivé à maturité. Pour l'instant la demande chinoise se focalise essentiellement un marché de vins rouges, de bordeaux et de cognacs.

 

Nicolas Ozanam : On remarque également un repli des exportations vers Hong Kong, qui est du à la baisse d'expéditions de grands crus, sans doute accentué par les stocks existants. Ceci étant, cela n'a pas ralenti la consommation du marché chinois. Au contraire la demande s'y est élargie. Il y a sans nul doute moins de grands crus qui y sont expédiés, mais le milieu de gamme s'en trouve consolidé. On peut citer la percée des Bordeaux supérieurs, Médoc...

Quelles sont les perspectives des exportations de vins de Bourgogne pour 2013 ?

Louis-Fabrice Latour : nous restons prudents pour 2013. Des retours que nous avons avec nos distributeurs et clients, il ressort qu'il n'y a pas tant de vin que ça. Les prix montent donc, mais que faire d'autre ? 2012 aura été marquée par une petite récolte, qui se fera peut-être plus ressentir sur l'exercice 2014. La petite vendange et la tension des prix sont actuellement ressenties par tout notre vignoble. La Bourgogne y est confrontée comme les autres régions de France. On note une hausse modérée pour les appellations régionales rouges à +15 %, jusqu'à 25 % pour les grands crus des côtes de Nuits

Comme les stocks sont à un niveau bas historique, les exportations devraient se maintenir. Si les stocks étaient importants, la hausse des cours casserait le dynamisme des marchés. Il paraît cependant difficile de maintenir le niveau de 2012. Par exemple, 2012 aura été une année exceptionnelle pour les vins de Bourgogne au Japon. A un moment, nous avons même cru que le marché japonais allait dépasser en valeur le marché anglais. Cette tendance exceptionnelle a été aidée par la force du yen, mais également le besoin de reconstitution des stocks

La force actuelle de l'euro par rapport au dollar vous inquiète-t-elle ?

Louis-Fabrice Latour : actuellement, à un euro pour 1,34 dollars US, on peut encore travailler dans la filière des vins et spiritueux. C'est une gène, mais pas encore une entrave tant que cela reste entre 1,30 et 1,35. Par contre, si le taux de conversion dépasse 1,40 il y aura une menace réelle. Nous en avons tous convenu lors de la récente conférence de presse de la FEVS. Au-delà de ce seuil, il serait nécessaire de revoir nos prix, donc de revenir auprès des clients, alors que la dernière augmentation est récente. Ce serait délicat à justifier.

Il y a aujourd'hui une obsession pour la parité dollar/euros, mais le décrochage de la livre sterling est un sujet de préoccupation pour les opérateurs de la filière. Aujourd'hui, un euro s'échange contre 0,86 livre. Très concurrentiel, le marché anglais n'offre déjà que des marges très serrées. Cette inquiétude est accompagnée par le risque de référendum sur l'avenir européen de la Grande Bretagne.

 

Nicolas Ozanam : nous avons également des préoccupations au sujet du projet du Gouvernement britannique d'imposer un prix minimum sur les degrés d'alcool. Dans l'immédiat nous attendons de voir ce qui va se passer, notamment suite à l'avis motivé rendu par la Commission Européenne sur une réglementation similaire adoptée en Ecosse. La Commission y estimait en particulie que ces dispositions n'étaient pas conformes au droit communautaire car disproportionnés par rapport à l'objectif invoqué.

Si les expéditions de vins français croissent en valeur, elles semblent stagner en volume...

Louis-Fabrice Latour : cette tendance a déjà été évoquée par le passé par la FEVS. Nous sommes satisfaits de la valorisation de nos vins, qui se consolide. Aujourd'hui, les vins français ont gagné la bataille de la valorisation, nous parlons même de premiumisation. Nous sommes cependant déçus par les résultats de nos exportations en terme de volumes. Nous avons pour ambition que tout le monde progresse de concert. Il ne faut tout simplement pas laisser l'enjeu des volumes, et donc des parts de marché à d'autres pays producteurs. Il ne s'agit d'ailleurs pas, comme on le lit souvent des vins australiens, mais plutôt de ceux d'Espagne et d'Italie.

Beaucoup de choses restent à faire, car il faut valoriser les vins, tout en conservant nos parts de marchés. Et il faut également faire attention : on a connu en 2009 un retournement de conjoncture. Les hauts de gamme ont été les premiers à souffrir ! Avec la forte demande asiatique et celle américaine qui se maintient, nous sommes confiants sur le positionnement des vins français. Mais pour remporter la grande bataille de l'export il faut au niveau national une concertation accrue au sein de la filière. La stratégie de l'export doit partir de la demand des marchés et donc l’aval pour remonter vers l’amon, afin de structurer l'offre par rapport aux marchés.

 

Nicolas Ozanam : l’enjeu est de déterminer ce qu’il faut faire pour conserver une filière française forte de ses 800 000 hectares de vignes et 500 000 emplois. Si tel est le cas, nous avons alors besoin d’un vrai copilotage de filière entre l’amont et l’aval. L’enjeu n’est pas de prendre ou de conserver le pouvoir, l’enjeu est de savoir entrer ensemble, amont et aval, dans une logique de concertation qui fasse progresser l’ensemble.

Justement, avec une consommation domestique qui s'érode et des exportations qui stagnent en volume, la France peut-elle conserver l'ensemble de son vignoble à long terme ?

Louis-Fabrice Latour : 2013 doit nous permettre de consolider la belle performance de 2012. Et pour l'instant nous n'avons pas perdu bataille des volumes. Il reste de la place pour tout le monde avec l'ouverture de nouveaux marchés et de belles perspectives sur les marchés actuels. Le moral des opérateurs est d'ailleurs bon.

 

Nicolas Ozanam : sur la durée, on s'aperçoit que les exportations deviennent un débouché croissant, incontournable. Alors que la consommation nationale chute irrémédiablement. Si l'on veut conserver une production importante et une filière solide, il va falloir adapter la production aux marchés, ce qui ne concerne pas uniquement la qualité des produits, mais aussi leur présentation, le marketing, etc. pour les rendre plus accessibles aux consommateurs.

Une étude récente de FranceAgriMer montre que les vins français ont une grande aura auprès des consommateurs à l'étranger. En même temps, les consommateurs perçoivent nos vins comme compliqués et intimidants, ce qui les détournent de l'acte d'achat, au profit d'autres vins. On peut comprendre que pour des grands crus de Bordeaux et de Bourgogne la compléxité ne soit pas un souci, parce qu'ils sont souvent recherchés par des consommateurs avertis. Mais pour des vins moins complexes, la communication doit tenir compte d'une approche plus axée sur le plaisir et l'immédiateté.

Pour ne pas aller à contresens de ce que demandent les marchés, une concertation entre l'amont et l'aval est nécessaire. Si on ne fait pas pareil aggiornamento, nous ferons face à une difficulté croissante pour placer nos produits et les faire reconnaître. Dautres savent déjà prendre ce positionnement.

Pour la filière française des vins et spiritueux, quelles sont les perspectives par rapport à de futurs accords bilatéraux ?

Louis-Fabrice Latour : parmi la série d'accords qui sont en négociations cette année, il y a le Canada, le Vietnam, l'Inde... Je n'ose plus parler du Mercosur, depuis 10 ans qu'il est à l'étude... Le président Barack Obama a également parlé lors de son discours sur l'état de l'Union d'un possible accord de libre échange entre l'Union Européenne et les Etats-Unis. La filière des vins et spiritueux regarde avec plus d'attention les négociations en Amérique du Sud et en Asie. Avec pragmatisme, des accords avec les Etats-Unis et le Canada permettront de fluidifier des échanges, mais ne changeront pas la face de ces marchés déjà très ouverts. Par contre, dans le cas de marchés où une barrière tarifaire pose des entraves, un accord est essentiel pour notre compétitivité.

Passé en 2011, l'accord de libre échange avec la Corée du Sud a donné des résultats très positifs en 2012. Mais le Chili profitait déjà d'un tel accord depuis plus longtemps. Et le Chili a déjà mis en place des accords permettant un accès progressif à droit nul en Chine et au Vietnam. La FEVS demande l'attention des pouvoirs publics afin de rester dans la compétition. Cela passe par le prise en compte de la filière des vins et spiritueux dans le cadre institutionnel des négociations d'accords de libre échange.

Lors de la conférence de presse de la FEVS, vous avez comparé les expéditions de vins et spiritueux français aux contrats d'avions Rafale. Certains de nos lecteurs ont fait remarquer que d'une année à l'autre ce sont souvent les Rafale des mêmes contrats qui sont en fait cités...

Louis-Fabrice Latour : je suis absolument d'accord ! Il y a un an on nous annonçait déjà un contrat très important de 126 Rafale. Aujourd’hui, on reparle de la conclusion de ce même contrat pour l’été 2013. En fait, au-delà de l’anecdote, le plus important n’est pas le nombre d’avions vendus.. Par contre, il est capital de savoir que la filière française des vins et spiritueux fait le contrat du siècle chaque année, avec des vins et spiritueux vendus et payés. C’est cela le vrai trésor national, alors que ceux qui font les manchettes, n'aterrissent pas toujours !

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