e l’obligation légale à l’arme de séduction ? La jeune startup montpelliéraine Grapetrack a frappé fort en obtenant l’autorisation écrite du bureau C4 de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) d'ajouter un bouton « En savoir plus » à la fin de la liste des ingrédients et de la déclaration nutritionnelle dématérialisées de ses clients leur permettant de renvoyer les consommateurs vers des contenus sur l’histoire de leur propriété, leurs cuvées, ou leurs points de vente. « Nous avons fait de la corvée réglementaire une opportunité de briller en faisant des économies de surface sur la contre-étiquette », se félicite Daniel Beruben, président de Grapetrack.
Plusieurs domaines se sont déjà laissés tenter. En Alsace, Rémy Kieffer utilise cette nouvelle fonctionnalité pour présenter sa famille, ses vins, et ses gîtes. En Provence, le domaine des Oullières renvoie sur la page de ses actualités, faisant en ce moment la promotion d'une soirée dégustation et musique. Dans l'Hérault, Haut Courchamp fait découvrir son domaine et sa bergerie en vidéo. A Bordeaux, le château Pape Clément met en avant ses prestations oenotouristiques. Sans surcoût pour les vignerons, Grapetack facturant toujours 20€HT par mois pour la génération d'un nombre illimité de QR Codes, l'opération ne demande que 3 minutes et aucune compétence en programmation informatique. « Il suffit à l'opérateur de renseigner un lien vers une rubrique de son site web ou un de ses réseaux sociaux pour que l'intelligence artificielle (IA) Mistral génère une page personnalisée du domaine », reprend Daniel Beruben.
Contactée par Vitisphere, la DGCCRF confirme avoir indiqué aux professionnels ayant émis le souhait de pouvoir communiquer via l’étiquetage dématérialisé, que, « sous réserve de l’interprétation souveraine des tribunaux, un bouton « en savoir plus » pouvait apparaître sur la page internet dédiée à la liste des ingrédients et à la déclaration nutritionnelle, à condition que cette page qui présente ces informations soit « neutre ». » En plus de figurer sur une page neutre, la DGCCRF précise que ce bouton ne doit pas directement rediriger le consommateur vers des informations marketing, comme la boutique en ligne. En revanche, « si le consommateur effectue plusieurs clics pour accéder de manière volontaire à la boutique, cela ne semble pas poser de difficulté du point de vue du droit européen », estime-t-elle.
Pour justifier sa décision, la DGCCRF se réfère aux lignes directrices émises par la Commission européenne suite à la publication du règlement (UE) 2021/2117. « Dans le point 36, la Commission a précisé que l’article 119 du règlement OCM modifié faisant référence aux « informations destinées à la vente ou à la commercialisation» devrait être interprétée comme l’obligation de présenter les informations obligatoires dans un environnement neutre qui garantit que l’attention du lecteur n’est pas détournée pour l’encourager à acheter le produit, que ce soit directement (par exemple, par des liens sur le site web, une promotion, l’indication de points de vente, etc.) ou indirectement (par exemple, par des dessins ou modèles ajoutant un attrait visuel ou sonore, des phrases ou des déclarations susceptibles d’attirer le consommateur, un langage commercial ou d’autres stratégies commerciales visant à influencer le comportement et la décision d’achat des consommateurs). »
Comme Grapetrack, la plateforme Vin.co s'est également mise à proposer un bouton « En savoir plus » à ses clients. Pour être la plus « irréprochable » possible, et ne pas risquer que l’Union européenne ne revienne sur la possibilité accordée à la filière de dématérialiser l’étiquetage, la Commission commerciale viticole (CCSV) fait davantage dans la discrétion pour l’application Viniscan. « Nous intégrons en bas de l’affichage des mentions obligatoires un bouton sans titre, uniquement signalé par le logo PDF, ouvrant un document rappelant les ingrédients et les informations nutritionnelles et indiquant l’URL du site internet du domaine », explique Gilles Gouttenoire, son directeur.