ouvelle présidence pour l’Association de Grands Crus Classés de Saint-Émilion (55 membres sur 85 propriétés classées en 2022). Propriétaire du château Chauvin (17,5 hectares de grand cru classé sur la rive droite de Bordeaux), Sylvie Cazes succède à François Despagne, à la tête du château Grand Corbin-Despagne (28,8 ha). Avant toutes choses, Sylvie Cazes pose que « François Despagne a été un grand président. Il a aidé à apaiser et inscrire dans la durée l’association. Des gens ont quitté le classement [NDLA : Ausone, Cheval Blanc… qui n’étaient pas dans l’association], mais cela ne nous empêche pas d’avancer. Il n’y a plus de procédures [NDLA : avec la fin des actions contre le classement 2012], on peut avancer ensemble. »
Alors que la crise commerciale frappe durement le vignoble bordelais, les grands crus classés ne sont pas épargnés reconnaît Sylvie Cazes, qui opte pour « une feuille de route simple : on met en place des moyens pour aller sur les marchés, pour rencontrer professionnels et amateurs » avec des évènements locaux (la fête des vendanges les samedi 12 et dimanche 13 octobre prochains dans les crus classés), en France (comme un tournoi de pétanque à Paris avec influenceurs et acheteurs professionnels) ou à l’étranger (prochainement une tournée à New York, Chicago et Dallas). Les temps étant plus difficiles, « il y a regain d’énergie pour travailler ensemble » analyse Sylvie Cazes, notant les lueurs d’espoir actuelles : baisse des taux d’intérêt, ouvertures de nouveaux marchés…


Mais alors que des échos répétés évoquent plus d’une dizaine de grands crus classés à vendre sur la rive droite, Sylvie Cazes préfère se méfier des rumeurs, tout en reconnaissant qu’« évidemment beaucoup de gens se disent que c’est galère [à commencer par] les nouveaux entrants qui sont arrivés à la belle époque. On sait que le marché des vins est cyclique. Il n’y a aucune raison que le marché ne reparte pas quand il n’y aura plus de stocks sur les marchés. » La crise actuelle alimente naturellement des tensions entre les grands crus et la place de Bordeaux : « quand ça va mal, le grand jeu est que la propriété critique le négoce et que le négoce critique la propriété » désamorce Sylvie Cazes, pour laquelle la force du collectif doit permettre à la machine de se relancer dès que la conjoncture sera favorable : « on a tous les ingrédients. La place de Bordeaux est forte et renforcée (avec la vente de vins étranges en faisant une place mondiale des grands vins), les propriétés ont rénové leurs outils de production (grâce aux années fastes), la météo devient plus chaude et permet des maturation plus faciles… On n’a jamais été aussi performants. Il faut être résilients, aller de l’avant et vers le consommateur » poursuit cette éternelle optimiste.
Parcours
On ne le dirait pas, mais Sylvie Cazes a d’abord tenté de s’éloigner du monde du vin dans lequel elle est née. Elle d’abord enseigné l’anglais avant de rejoindre le Médoc et les propriétés familiales gérées avec son frère Jean-Michel Cazes (château Lynch Bages à Pauillac et Ormes de Pez à Saint-Estèphe, ainsi que les domaines d’Axa Millésimes). S’occupant plutôt de la communication et du marketing des propriétés, Sylvie Cazes a créé en 2001 l’agence Bordeaux Saveur pour développer des offres œnotouristiques dans le vignoble, complétant l’offre réceptive du groupe familial (village de Bages et château Cordeillan Bages). Prenant en 2008 la présidence de l’Union des Grands Crus de Bordeaux (UGCB, pendant 5 ans), elle a également rejoint en 2011 l’équipe municipale d’Alain Juppé, alors maire de Bordeaux, pour concrétiser son idée de Cité des Civilisations du Vin. Alors conseillère municipale pour l’œnotourisme et la valorisation de la filière vitivinicole, Sylvie Cazes préside la création de la fondation de la cité du vin en 2009 et l’embauche de son directeur général, Philippe Massol. « Il a construit, j’ai rassemblé les gens » résume la présidente de la Cité du Vin, qui a ouvert en 2016 et vient de passer la barre des 3 millions de visiteurs.
Devenue présidente du conseil de surveillance des domaines familiaux en 2011, Sylvie Cazes n’y a plus de rôle opérationnel. Ayant assuré de 2011 à 2013 la direction du château Pichon-Longueville Comtesse de Lalande (propriété de la famille Rouzaud, champagnes Roederer), elle a repris le restaurant bordelais le Chapon Fin en 2011 et a acquis le château Chauvin en 2014. Le restaurant étant dirigé par son fils, François Régimbeau, et la propriété viticole par sa fille, Julie Régimbeau, Sylvie Cazes indique avoir tout le temps de se consacrer à l’Association de Grands Crus Classés de Saint-Émilion. « J’y crois, j’ai l’expérience qu’il est toujours positif dans une période difficile de se regrouper et d’aller au contact des professionnels et des consommateurs » conclut-elle.