n Irlande, il y a un avant et un après Covid dans la consommation d’alcool. « Les trois dernières années ne sont pas représentatives de la tendance de fond, car les attitudes ont changé depuis la vague Covid. Avec les pubs fermés, il y a eu un transfert de consommation de la bière vers le vin, entrainant une hausse des importations de vins », décrit Claire Prothon, chargée d’affaires vins et spiritueux pour Business France au Royaume-Uni. Sauf que cet afflux soudain, qui a nécessairement entraîné un ralentissement des importations de vins lorsque les pubs ont réouvert, a faussé la tendance de fonds observée depuis 10 ans.
« Les importations de vins ont augmenté dans la dernière décennie, ce qui n’est pas le cas des 3 dernières années à cause de ce contrecoup du Covid », synthétise Claire Prothon. En résumé, les volumes d’importations de vins ont augmenté de 21% dans le pays en 10 ans (+14% pour les seuls vins français). Une des caractéristiques du marché irlandais réside dans l’important PIB/habitant du pays (>100 000$), l’un de plus élevés d’Europe en raison de l’attractivité fiscale qui a conduit à l’implantation de sièges européens des plus grandes multinationales du numérique (Apple, Google, Meta, Microsoft, alors qu’Amazon est au Luxembourg). Cette situation a pourtant une contrepartie, avec une politique de prévention vis-à-vis de l’alcool depuis 2022 basée sur une dissuasion par le prix. « L’Irlande dispose des droits d’accises les plus élevés d’Europe, auxquels il faut ajouter une TVA à 23% et une indexation sur le niveau d’alcool, si bien qu’il est impossible de trouver une bouteille de vin à moins de 7,40€ », enchaîne la chargée d’affaires de Business France.
Le sujet des taxes est central en Irlande qui subit les effets de l’inflation dans un contexte où les coût de la vie est très élevé, en particulier au niveau des loyers dans le pôle économique de Dublin. La distribution de vins est essentiellement assurée par le réseau de grande distribution et boutiques spécialisées, sur un marché dominé par les vins blancs de cépages internationaux. « Là encore, l’épisode Covid a fait évoluer les habitudes et les irlandais se tournent plus vers le critère origine que cépage », pointe Claire Prothon. Solidement implanté, le Chili demeure le pays exportant le plus de volumes de vins vers l’Irlande, « conséquence d’un long travail de communication » , appuie Claire Prothon. La France s’est toujours solidement ancrée en 2ème position des volumes de vins fournis, avant que l’Italie ne vienne maintenant la dépasser, soutenue par la vague de succès du Prosecco. « Les vins italiens et espagnols sont plus simples à comprendre que les français. En outre, beaucoup de jeunes actifs européens travaillant pour les entreprises de technologie à Dublin, il y a un rééquilibrage de la consommation des vins du nouveau monde vers ceux en provenance d’Europe », situe la chargée d’affaires de Business France.
Grâce à leur identification simple et leur excellent rapport qualité-prix, les vins IGP Pays d’Oc sont les vins français les plus importés, alors que Bordeaux est l’AOC française qui génère le plus de volumes en Irlande. Si le pays a un historique de préférence pour les vins blancs, les vins effervescents autres que les champagnes connaissent un développement continu.


Avec seulement 5 millions d’habitants, la population irlandaise se concentre essentiellement autour de Dublin et Cork, et c’est dans la capitale que se trouvent les importateurs permettant l’accès au marché. « Certains gros opérateurs importent en direct, mais les importateurs et les distributeurs sont la plupart du temps liés. On compte une trentaine d’opérateurs importants à l’échelle du pays », situe Claire Prothon. S’il est incontournable de venir à la rencontre des opérateurs locaux pour espérer vendre du vin dans le pays, la chargée d’affaires de Business France rappelle que la petite taille du pays en fait « un marché saturé, sur lequel il faut pouvoir se distinguer pour percer, que ce soit par l’histoire racontée ou même le rapport qualité-prix », note la conseillère Business France. Ainsi, les labels liés au développement durable ou au bio sont appréciés et compris des consommateurs. « C’est un pays encore fortement lié à son historique de production agricole, la population est sensible aux bons produits, même plus chers », valide Claire Prothon. Elle rappelle en complément que les niveaux de prix des vins liés à la taxation ont tendance à « premiumiser » le marché du vin. L’Irlande étant un pays producteur de spiritueux, il n’en reste pas moins un marché intéressé par le Cognac, dont la place est reconnue dans la consommation locale.