menu burger
Lire la vigne en epaper Magazine
Accueil / Gens du vin / Les aventuriers du château de Sauternes perdu, retrouvé et réouvert
Les aventuriers du château de Sauternes perdu, retrouvé et réouvert
Lire plus tard
Partage tweeter facebook linkedin

Reclassement
Les aventuriers du château de Sauternes perdu, retrouvé et réouvert

Le château de Malle rouvre ses portes cet été au public après 6 millésimes de léthargie. Déjà rare, la renaissance d’un grand cru classé en 1855 se double de la rénovation d’un monument historique riche de son bâti et de ses jardins patrimoniaux.
Par Alexandre Abellan Le 06 juillet 2024
Lire plus tard
Partage tweeter facebook linkedin
Les aventuriers du château de Sauternes perdu, retrouvé et réouvert
Ce n’était pas une propriété abandonnée, mais elle manquait d’entretien résument Clémence et Luc Planty. - crédit photo : Lycia Walter
C

omme ailleurs dans le vignoble bordelais, au château de Malle on arrache. « Mais, ici on replante ! » lance Clémence Planty, la nouvelle copropriétaire du grand cru classé en 1855 et monument historique pour ses jardins depuis 1943 et sa demeure depuis 1949. Rachetée ce printemps par une famille bien connue du Sauternais, la propriété entre dans une profonde mue : la restructuration du vignoble de 38 hectares (pour moitié en appellation Sauternes et pour moitié en AOC Graves) et la remise en état de son château du XVIème siècle et de ses jardins (6,5 ha). Avec 10 salariés et un budget qui n’est pas communiqué, « on y travaille depuis 3 mois. La propriété a déjà changé de visage » constate Luc Planty, le directeur général, les allées et terrasses du jardin étant désormais visibles et accessibles (voir photos ci-dessous). Une reprise en main qui se traduit par réouverture dès ce mardi 16 juillet* de visites guidées (15 € pour les adultes, 5 € de 12 à 17 ans, gratuit jusqu'à 11 ans) et des jardins de 6,5 hectares (pour 5 €, ou 10 € avec une dégustation) qui seront accessibles du mardi au samedi (de 10 à 18h).

S’il faut refaire intégralement le labyrinthe, les fontaines et les parterres de buis (la pyrale ayant ravagé l’essence venue de Versailles), les façades travaillées, les statues d’inspiration grecque, le théâtre de verdure et la terrasse panoramique valent déjà le détour. « Nous ouvrons en l’état, avec un accès libre aux jardins (et une zone de pique-nique). Nous préparons une boutique éphémère (nous avons repris des stocks au rachat) » explique Clémence Planty, qui veut ainsi répondre à la curiosité des passants : les arrêts de curieux étant fréquents au portail. « Il n’y aura pas d’inauguration cette année, notre premier but c’est d’avoir des grilles ouvertes et d’embarquer le plus de monde dans notre aventure » note l’associée.

Contre-courant

Alors que le vignoble de Bordeaux affronte une crise économique et sociale d’ampleur, Luc et Clémence Planty cherchaient depuis deux ans « une propriété viticole pour constituer une offre complète : culture et vin. Nous avons étudié des projets jusqu’au Canada, alors que la propriété avec tous les critères recherchés était sous notre nez » rapporte Clémence Planty, qui se consacre actuellement au travail de reconstitution des quatre siècles d’histoire du château (voir encadré) pour aboutir à une vraie offre culturelle : « on ne parle pas seulement d’œnotourisme, mais de tourisme avec des œuvres architecturales, un jardin historique… »

La renaissance d’un grand cru classé en 1855 de Sauternes constitue l’autre défi de taille de ce rachat. Mis en vente depuis des années par la famille des comtes de Bournazel, le vignoble tient actuellement de la friche pour les parcelles anciennes, de la jachère pour celles arrachées et du plantier pour celles tout juste restructurées. Ayant l’ambition de compter parmi les grands vins de Bordeaux, Luc Planty met à profit l’association des cépages blancs du bordelais qu’il préside pour déployer des sélections massales de sémillon et de sauvignon blanc, « pour replanter et complanter en polyclonal en évitant l’entonnoir monoclonal. Cela donne plus de richesse aux assemblages » rapporte-t-il.

Conversion bio

En tout, 38 ha devraient être replantés, du moins sur « les zones très qualitatives (ce n’est pas pour rien que c’est un grand cru classé) » explique Luc Planty, pour avoir « le potentiel de grands vins », les parcelles arrachées pouvant servir à l’implantation de bosquets, mares… Le domaine ayant une approche agroécologique qu’il souhaite identitaire. Le vignoble va être converti à l’agriculture biologique, une approche naturelle pour Luc Planty qui avait participé à la conversion bio du château Guiraud (grand cru classé en 1855, certifié bio en 2020). « On change de château, pas de philosophie » résume Clémence Planty, qui souligne l’objectif de produire une gamme élargie de vins : du vin liquoreux de Sauternes évidemment, mais aussi du vin rouge de Graves, du vin blanc de Bordeaux blanc et peut-être du crémant de Bordeaux.

« On croit aux vins de Bordeaux et on y a toujours cru » pointe Luc Planty, pour qui la crise est désormais passée à Sauternes, au prix de restructurations techniques et commerciales. « On a intégré le travail en livrable et plus en primeur » précise Clémence Planty, notant que la transition peut être dure pour ceux le découvrant actuellement. N’en étant qu’aux débuts de la relance du château de Malle, Luc Planty répète que le projet sera évolutif, la propriété ayant la force d’être multicarte : avec l’activité touristique (culturelle et œnotouristique) et la production de vins (Graves, Sauternes…).

 

* : « Les visiteurs pourront réserver par e-mail à l'adresse contact@chateaudemalle.com ou par téléphone au +33 (0)5 56 63 59 33 » annonce Clémence Planty.

Grand cru classé monument historique

Construit en 1598 par Jacques de Malle, président du parlement de Bordeaux, sur la commune de Preignac (Gironde), le château de Malle témoigne dans ses pierres et ses allées de l’histoire de France retrace Clémence Planty, entre cour d’honneur classique et façades de la Renaissance vers les jardins. En 1650, le domaine est géré par Jacques de Malle, conseiller de Louis XIV, qui interdit en 1691 les dorures dans les habitations, conduisant à menuiseries à la capucine encore visible dans le hall d’accueil du château. Dernière représentante de la lignée, Jeanne de Malle épouse Alexandre-Eutrope de Lur-Saluces, qui va marquer le château de Malle avec des jardins à la française et l’apposition de son blason sur les façades (avec ses trois croissants qui ne symbolisent pas le port de la lune de Bordeaux, mais les trois croisades combattues par la famille). En 1785, Louis-Amédée de Lur Saluces se marie avec François Joséphine de Sauvage d’Yquem et rejoint le château d’Yquem, son frère cadet demeure au château de Malle. Deuxième grand cru classé de Sauternes en 1855, le château de Malle est légué par Pierre de Lur-Saluces à Pierre de Bournazel en 1959, dont la famille a gardé la propriété jusqu’à sa vente ce 4 avril 2024.

Si des pièces sont restées en bon état (salon, cabinet de travail, salle à manger, chapelle dédiée à Marie…), d’autres demandent des rénovations conséquentes. Dont certaines seront réfléchies en fonction de la destination touristique du château. Souhaitant valoriser l’histoire et préserver le patrimoine, Clémence Planty réfléchit au « bon angle d’approche » pour le futur centre culturel. Après la préouverture cet été 2024 des jardins, l’objectif est de propose des visites du château dès 2025, avant de prévoir d’ici 5 ans de nouvelles étapes plus structurantes. Comme une offre hôtelière, en redisposant les cours viticoles et de vinification qui encadrent la cour d’honneur.

Façade de style classique pour la cour d'honneur. Photo : Lycia Walter.

Style renaissance du côté des jardins. Photo : Lycia Walter.

La restructuration du vignoble est lancée. Photo : Lycia Walter.

Vous n'êtes pas encore abonné ?

Accédez à l’intégralité des articles Vitisphere - La Vigne et suivez les actualités réglementaires et commerciales.
Profitez dès maintenant de notre offre : le premier mois pour seulement 1 € !

Je m'abonne pour 1€
Partage Twitter facebook linkedin
Tous les commentaires (9)
Le dépôt de commentaire est réservé aux titulaires d'un compte.
Rejoignez notre communauté en créant votre compte.
Vous avez un compte ? Connectez vous
Pascal A Le 18 juillet 2024 à 09:29:53
Bravo Xavier ainsi qu'a tous ceux qui vont t'entourer dans ce projet prometteur. Bien sûr qu'il faut et faudra encore des moyens importants pour soutenir cette vaste rénovation tant vite-vinicole que culturelle. Bien sûr qu'il est souhaitable que des personnalités avisées à l'image de ta longue expérience s'impliquent sur le long terme. Car l'on a vu tant d'aventuriers s'engager dans cette voie, sans plan solide et pérenne, laissant des chantiers en friches, qu'il est plutôt satisfaisant de constater que l'ambition et le sérieux sont présents aujourd'hui au Château de Malle.
Signaler ce contenu comme inapproprié
Renaud Le 14 juillet 2024 à 08:26:17
Toujours bravo aux entrepreneurs. Mais avec des sponsors c'est quand même plus facile. Ici on ne parle pas production mais art et patrimoine. Ça existe c'est tant mieux mais sans comparaison avec le reste du département ou même de l'appellation. En gros pour finir millionnaire en Sauternes c'est assez facile il faut commencer milliardaire. Et les danseuses ont toujours étaient très présentes dans les belles appellations c'est une vérité qui reste toute relative car il s'agit d'une autre logique par rapport à ceux qui ont besoin d'en vivre.
Signaler ce contenu comme inapproprié
Vendredi 13 Le 12 juillet 2024 à 20:57:52
Merci Robinson pour votre réponse qui modifie un peu (et même sensiblement) mon point de vue.
Signaler ce contenu comme inapproprié
Robinson Crusoe Le 12 juillet 2024 à 15:08:58
@Vendredi 13 : oui je suis vigneron et pas en trop mauvaise passe, surtout si je me compare... Mais le sujet n'est pas du tout personnel. Amateur de longue date des bons Sauternes botrytisés, je me désole de voir cette appellation être tombée dans une telle déshérence sans que personne ne tire la sonnette d'alarme, pas même l'ancien président de l'ODG... Car la ruine de cette appellation a commencé bien avant celle des Bordeaux rouge. C'est pour moi un deuil. La reprise du Château de Malle se fait avec d'abondants capitaux extérieurs et les deux "aventuriers" ne sont là que pour présenter un visage moins financier, moins 'BlackRock", même si je ne nie pas leurs compétences et que je leur souhaite bon vent. C'est désolant, mais Sauternes est en train de devenir une juxtaposition d'investissements de financiers : restaurants, hôtels de luxe et de salles de séminaires. L'économie du vin ne sera bientôt plus qu'un souvenir, qu'un prétexte qu'on entretiendra avec des expositions de photos sepia sur les vendanges traditionnelles. Des autochtones en costumes traditionnels pourront venir égayer des séminaires hyper-chiants. Les vignes arrachées deviendront des prairies pour les pur sang. Ailleurs en France, il n'y a plus de métallurgie mais il y a des musées de la métallurgie, plus de mines mais des musées de la mine, etc.. Sauternes viendra s'insérer dans une France qui n'est plus qu'un gigantesque parc à thèmes pour touristes aisés. Que restera-t-il de l'esprit des AOC quand ne subsistera plus que l'étalage ostentatoire des moyens financiers ? Voilà cher Vendredi 13 , ce qui avait motivé ce qui n'était qu'un petit billet d'humeur.
Signaler ce contenu comme inapproprié
La rédaction Le 11 juillet 2024 à 22:37:19
Bonsoir Gnouf-Gnouf Merci pour l'alerte, l'erreur a été corrigée. Bonne soirée
Signaler ce contenu comme inapproprié
Gnouf-Gnouf Le 11 juillet 2024 à 21:28:32
Bonsoir à tous, Il y a une erreur dans votre historique, le Château de Malle est 2ème cru classé, pas 1er cru classé.
Signaler ce contenu comme inapproprié
Vendredi 13 Le 11 juillet 2024 à 16:56:30
A Robinson : A lire votre commentaire je devine que vous êtes peut-être vous-même viticulteur et que les choses ne se passent peut-être pas très bien pour vous, comme c'est malheureusement le cas pour un trop grand nombre d'exploitants. Cela justifie-t-il le ton assez sarcastique (et envieux, peut-être ?) de votre commentaire ? Ne devrions-nous pas au contraire nous réjouir de ce qu'il se trouve de jeunes personnes prêtes à se lancer dans une aventure comme celle de reprendre le château de Malle pour tenter de sauver ce qui constitue un fleuron de notre façon de vivre à la française ? Certes, ces personnes disposent évidemment de moyens. Encore heureux ! Car il en faut pour prendre en charge une telle exploitation. Et vous, si vous les aviez, ces moyens, vous lanceriez-vous dans cette aventure ? Pour ma part je leur souhaite un plein succès dans leur audacieuse entreprise. Et quant à vous, un prompt retour à meilleure fortune le cas échéant, ainsi qu'à tous les viticulteurs en difficulté. Gardons-nous de justifier la formule que j'ai lue dernièrement sous la plume d'un chroniqueur du Figaro (oui, je suis de droite mais je lis un journal limite à gauche) : "Le socialisme : une doctrine défendue par des envieux cherchant à se faire passer pour de bonnes âmes, qui vise à organiser le partage de richesses qu'ils n'ont pas su créer".
Signaler ce contenu comme inapproprié
Robinson Crusoe Le 07 juillet 2024 à 08:49:23
L'aventure c'est dur. On le voit bien sur ces visages burinés par le vent , la pluie, le froid, le soleil. Sur ces vêtements aussi, élimés par un travail harassant. Seuls et abandonnés par les financiers dans un environnement hostile, on mesure à travers ces photos l'étendue du travail accompli. Au moment où tant de vignerons baissent lâchement les bras, cet exemple édifiant nous montre la voie triomphale et volontariste qui peut s'ouvrir pour Bordeaux, auquel nous avons tous toujours cru. Amen.
Signaler ce contenu comme inapproprié
bill et boule Le 07 juillet 2024 à 06:05:43
C est une merveille . La mention de la migration de vente en primeur a commercialisation en livrable mérite d être soulignée car elle requiert la mise a disposition de deux années de trésorerie d exploitation , ce qui n est pas à la portée de tout le monde . Mon 2023 que j avais l habitude de vendre des ce printemps 2024 ne sera pour le château une source de revenus que lors de l été 2026 : il faut donc faire face à deux années d exploitations sans revenu , en sus des travaux de réfection ...Le résultat sera magnifique et quasiment sans équivalent à Bordeaux sur le plan architectural, toutes rives confondues :^) Et à essayer sur une viande blanche comme un poulet fermier , un régal pour oublier l actialite deprimante !!! ..
Signaler ce contenu comme inapproprié
vitijob.com, emploi vigne et vin
Paris / Seine-et-Marne / Yvelines ... - CDI chr consulting
Aude - CDI SCEA CHATEAU DE LA NEGLY/SARL SELECT VINS
Gironde - Alternance/Apprentissage FRANCOIS LURTON SA
Côte-d'Or / Aisne - CDI SAS PIERRE YVES COLIN MOREY
La lettre de la Filière
Chaque vendredi, recevez gratuitement l'essentiel de l'actualité de la planète vin.
Inscrivez-vous
Votre email professionnel est utilisé par Vitisphere et les sociétés de son groupe NGPA pour vous adresser ses newsletters et les communications de ses partenaires commerciaux. Vous pouvez vous opposer à cette communication pour nos partenaires en cliquant ici . Consultez notre politique de confidentialité pour en savoir plus sur la gestion de vos données et vos droits. Notre service client est à votre disposition par mail serviceclients@ngpa.fr.
Gens du vin
© Vitisphere 2025 -- Tout droit réservé