e la prospective pour gagner en perspective. Vinseo, le cluster des fournisseurs vitivinicoles d’Occitanie vient de conclure trois années de travail collectif pour « capter et alerter à la fois sur les tendances lourdes de notre filière sur de nombreux plans (techniques, climatiques, générationnels, économiques, règlementaires…), mais aussi et surtout des signaux faibles qui pourraient être significatifs de profondes mutations » comme l’explique Balkis Vicaire, la directrice de Vinseo, ajoutant que l’« idée de relancer une étude prospective s’est forgée en pleine crise covid en 2020 : nous souhaitions offrir à nos membres, dans un contexte où les crises nous semblaient être vouées à se succéder, des clefs de compréhension de la filière, de ses possibles avenirs, et surtout des éléments pour alimenter leur stratégie. L’avenir nous a malheureusement donné raison et aujourd’hui, la crise viticole est clairement consommée. »
Coordonnée par FranceAgriMer et le pôle Vigne et Vin de l’Institut Agro (ex-IHEV), cette étude aboutit à quatre scénarios d’avenir pour les fournisseurs de la filière vitivinicole d’Occitanie en 2045. Il ne s’agit pas de prévisions, mais de fils de réflexion tirés pour aller d’une hypothèse à un scénario d’avenir dépendant de multiples facteurs climatiques, sociétaux et environnementaux. Ces scénarios font sens selon des tendances poursuit Dominique Tourneix, le président de Vinseo, qui fait état de « deux scénarios plutôt favorables et deux scénarios moins roses » appelant la filière et les pouvoirs publics à se mobiliser pour agir, les fournisseurs voulant « essayer d’influer vers l’avenir le plus rose, sans être complètement maîtres ».
Dans cette étude, le premier scénario s’intitule "les traditions évoluent", « la diversification, l’innovation et la coopération permettent de relancer une filière marquée par la baisse de la consommation internationale, un contexte douanier incertain et des pressions environnementales croissantes. C’est un scénario relativement positif, même si l’image de la viticulture se dégrade » rapporte Dominique Tourneix, qui note que dans cette option traditionnelle, la filière réussit à mettre à profit l’innovation technologique et le développement numérique pour maintenir sa diversité (avec de la désalcoolisation, du tourisme…).


Une richesse des opérateurs perdue dans le deuxième scénario plus industriel : "que les meilleurs gagnent", avec son avenir « plus libéral, dans un contexte où malgré la bonne perception de la viticulture, les exploitations familiales souffrent et les grands groupes se développent dans un contexte de réduction générale des phytos disponibles. L’économie d’échelle prend le dessus » résume Dominique Tourneix. Il y aurait alors une forme de concentration des opérateurs, tout en ayant une réduction du vignoble.
Intitulé "tant bien que mal", le troisième scénario acte « un grand écart » entre des marques internationales et des production artisanales avec « moins d’innovation technique et moins d’investissement des pouvoirs publics, alors que les intrants continuent à se réduire » note le président de Vinseo, évoquant une viticulture « moins prioritaire », aboutissant à « une forme d’abandon et de marginalisation ». Le dernier scénario, "la tradition ralentit la durabilité" table sur « un contexte de récession économique et d’attractivité qui baisse. Le vin n’est plus qu’un produit culturel, c’est encore plus une niche. La filière est dans la tradition pure et dure. C’est le scénario qui laisse le moins de place à l’innovation. Les acteurs de Vinseo en sont moins friands… » reconnaît Dominique Tourneix.


Marqués par des degrés divers de baisse de la consommation de vin et de restriction dans la protection du vignoble, ces scénarios forment autant de nuances dans le soutien par les pouvoirs publics et l’innovation pour que la filière vin se réinvente à l’avenir. Dans tous les cas, « la filière d’Occitanie devra s’adapter à la baisse de la consommation. Les acteurs de Vinseo sont pour un scénario de développement par l’innovation et l’adaptation, pas pour le repli sur soi » note Dominique Tourneix, qui souhaite que l’outil soit désormais diffusé aux fournisseurs et opérateurs de la filière vin : « on se prépare mieux quand sait ce qui est possible ».
Présentée aux membres de Vinseo ce jeudi 23 mai, l’étude sera dévoilée aux opérateurs de la filière vin pour de nouveaux ateliers de travail ce mardi 19 novembre, « afin que cette étude participe au bien commun et permette à celles et ceux qui voudront s’en saisir […] dans la recherche d’innovations et de solutions » déclare Balkis Vicaire, qui prend l’exemple du réseau de distributeurs d'agrofournitures Agrosud ayant conduit une prospective en 2010 pour se positionner sur « l’essor du bio et le remplacement progressif des produits phytosanitaires au profit du biocontrôle » avant que cela ne devienne une réalité. Un accompagnement du changement.