’histoire se répète pour les vignes en friche de Bordeaux : toujours plus de parcelles à l’abandon et toujours pas de solution pour éviter d’en faire des foyers de contamination. « Cela fait des années que toute la profession alerte les pouvoirs publics, sans effet à ce jour » soupire Jean-Samuel Eynard, le président de la Fédération Départementale des Syndicats d’Exploitants Agricoles de la Gironde (FDSEA 33), qui rapporte que « les vignerons girondins sont très inquiets des vignes nouvellement abandonnées et de celles dont l'arrachage a pris du retard » à cause des fortes précipitations de l’hiver et du printemps. Le tout faisant grossier les 2 000 hectares de friches officiellement recensées en Gironde.
Alors que la pression mildiou monte en flèche ce début de millésime 2024 à Bordeaux, les viticulteurs voient avec inquiétudes sur ces ceps abandonnés de « nombreuses taches de mildiou, qui vont bientôt sporuler et contaminer les vignes voisines » alerte Jean-Samuel Eynard, qui vient d’envoyer un courrier au préfet de Gironde et de Nouvelle-Aquitaine, Étienne Guyot, « pour lui rappeler que des vignerons qui ont perdu une partie de leur récolte l'an dernier sont à bout et ne comprennent pas pourquoi, malgré une visite ministérielle l'été dernier, il ne se passe toujours rien ».
Sujet travaillé depuis des années au ministère de l’Agriculture, par Julien Denormandie puis Marc Fesneau, la question des mesures incitant/obligeant les propriétaires de vignes abandonnées à les arracher semble reste ouvert (la filière vin portant l'option d’amendes administratives forfaitaires). « Les viticulteurs, traumatisés par l’épisode calamiteux du mildiou de la campagne 2023, nous remontent leur mécontentement vis-à-vis des foyers de contamination que constituent les vignes pas ou mal entretenues dans le voisinage de leurs parcelles » écrit Jean-Samuel Eynard, expliquant au préfet que si « le défaut de protection phytosanitaire de ces vignes peut être le fait d’une gestion des travaux déconnectée du terrain, dans le cas d’exploitations agricoles confiées à la gestion d’un mandataire judiciaire », on en revient surtout au « problème, toujours non résolu, des vignes en friches ».
Et ce alors que de premières alertes ont été remontées en 2021. Face à ces difficultés qui s’annoncent, la FDSEA 33 appelle le préfet à « prendre en urgence les mesures nécessaires pour assurer la protection phytosanitaire du vignoble et éviter ainsi des actes irréfléchis de viticulteurs voisins de ces foyers de contamination » alerte le courrier. Contactée, la préfecture répond à Vitisphere que ses services (la DRAAF) sont bien saisis « du sujet des vignes en friche au regard du risque sanitaire qu'elles peuvent représenter. Des procédures sont engagées avec des contrôles. En fonction de la localisation de la parcelle et des constats , des suites administratives ou pénales seront engagées. »
« Faut-il un drame pour que l'Etat bouge enfin ? » précise Jean-Samuel Eynard à Vitisphere, rapportant que « ce ne sont pas les quelques milliers d'euros du fond d'urgence 2023, qui n'arrivent toujours pas dans les exploitations car le système informatique Chorus est bloqué, qui changeront les choses »