Mikaël Cousinet : Nous ne sommes pas dans ce cas de figure. Notre endettement est important, mais nous ne sommes pas à la dérive. Au niveau de l’activité, nous nous portons même plutôt bien. Nous vendons plus que nous ne produisons. Nous avons eu un gros retard chez un client et des erreurs financières, ce qui met à mal notre trésorerie. Avec des taux d’intérêt de 5,5 % il faut 10 % de croissance pour s’en sortir. Nous sommes en progression de 1 % à la fin du mois dernier.
C’est un peu compliqué, je ne dirai pas que la situation va bien avec des cours à 700 euros le tonneau, des marchés qui se réduisent, un plan d’arrachage sanitaire… Nous avons vendu 80 000 hectolitres sur l’année et notre déclaration de récolte 2023 est de 65 000 hl. Nous avons une entité surdimensionnée. Historiquement, nous pouvions produire 100 000 hectolitres. Entre le gel, la grêle et le mildiou, nous tournons plutôt entre 60 et 70 000 hl actuellement. Avec trop de sites issus de fusions, les charges fixes sont importantes.
Nous allons sans doute nous recentrer sur un site unique de production. Ce n’est pas acté mais le site de Gensac fermerait, c’est notre site secondaire. Nous avons loué le site de Villefranche de Longchamp. Notre domaine en propre, le château Les Vergnes certifié en bio va être déconverti pour optimiser ses coûts de production et des parcelles seront sans doute arrachées ou affectées à d’autres productions. Notre ligne d’embouteillage a des taux de charge importants, grâce à la reprise depuis septembre des activités de production du négoce Maison Le Star (en procédure collective de sauvegarde). Nous cherchons la valeur partout où elle peut être. C’est une nécessité. Nous développons d’autres activités : prestations, fournitures de matières sèches…
Face à l’adversité, votre stratégie de gestion de la décroissance vous permet-elle d’être optimiste pour la résilience et la pérennité d’Univitis ?
Bien sûr que nous restons optimistes. Mais il est très dur de se projeter. L’avenir n’est pas à l’explosion des hectares. Nous assurons notre décroissance. Ce n’est pas le même monde, nous nous adaptons. Pas toujours comme nous le voulons, mais un peu comme nous le pouvons. Nous subissons beaucoup, en premier lieu les cours. Ça n’est pas bien vu dans le vignoble de le dire, mais nous réfléchissons en industriel. Nous produisions 8 000 hl de vins rosés, nous sommes passés à 15 000 hl. Nous avons aussi fait un peu de blancs de noirs et pas mal de blancs. Habituellement, nous produisions 70 % de vins rouges et 30 % de blancs et rosés. En 2023 nous serons à 50/50. Avec la moitié de nos vins à rotation rapide qui sont contractualisés pour 95 % à l’avance afin d’accélérer la trésorerie, ce ne seront pas des contrats spots d’entrée de gamme.
Quel est l’impact concret des difficultés d’Univitis pour vos adhérents : on parle dans certains caves de délais, de reports de paiements…
Disons que nos adhérents ne sont pas totalement payés. Sur les 12 répartitions prévues sur l’année, nous en avons réglé 10. Il faut tenir. J’ai l’impression que c’est dans les crises que l’on se réinvente. On constatait tous que ça allait mal, mais ça ne réagissait pas. Maintenant, il y a de nombreuses initiatives que je trouve très intéressantes. Nous avons des travaux et projets (sur les cépages résistants, sur des cuvées évènementielles…). Nous nous mettons en place pour la transition. Perdre des hectares, ça fait peur à tout le monde. Mais il vaut mieux perdre des hectares quand on distille 50 000 hl en deux campagnes (nous avions beaucoup de blancs il y a 3 ans, comme tout le monde).
Combien d’adhérents recense Univitis aujourd’hui ?
Nous avons 130 adhérents vins et 20 viticulteurs dont on vinifie et stocke les vins. Cette activité est en développement.