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Les vins bio de Bordeaux sont encore plus en vrac que les conventionnels
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Marché gelé
Les vins bio de Bordeaux sont encore plus en vrac que les conventionnels

La crise du vin rouge bordelais n’épargne pas les vignerons bio, se trouvant dans une impasse complète pour mettre en marché leurs lots de vrac ne trouvant pas la moindre offre d’achat.
Par Alexandre Abellan Le 24 novembre 2023
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Les vins bio de Bordeaux sont encore plus en vrac que les conventionnels
Pour le vrac, le vin bio coule à flot et à pic à Bordeaux. - crédit photo : Alexandre Abellan (archives)
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e vert passe au rouge. L’estampille AB n’est pas gage de vente pour le vin en vrac de Bordeaux. Au contraire même. « J’ai 100 hectolitres du millésime 2022 à vendre en vrac, un vin hyper qualitatif en AOC Blaye Côtes de Bordeaux. Je n’ai pas une seule proposition… Même indécente à 900 € le tonneau. Je ne trouve pas » constate amèrement Anne-Émilie Rodriguez (château Pinet La Roquette, 9 hectares en bio depuis 2017 à Berson). Ayant développé son domaine sur un modèle 60 % vrac et 40 % bouteille, la vigneronne doit « se dépatouiller » alors que « le vrac permet de payer les charges de la propriété ».

N’ayant pas opté pour la distillation (« on se dit toujours qu’il y a la qualité et qu’on trouvera des acheteurs »), Anne-Émilie Rodriguez n’a pas les réseaux pour embouteiller ces volumes (ni le souhait de mobiliser de la trésorerie pour se payer ces matières sèches). En bio par conviction, la vigneronne bio appelle la force de vente girondine à se mobiliser : « il faut que le négoce évolue dans son travail : qu’on joue tous ensemble. Il va falloir réadapter le modèle. Pourquoi pas avec un prix plancher ? »

20 % de bio en vrac

« Sans tirer à boulet rouge sur le négoce, beaucoup de négociants se sont aujourd’hui assis sur la rentabilité du très haut de gamme (les grands crus classés), alors que le prêt à porter d’entrée et milieu de gamme est seulement offert quand il y a une demande » analyse Pierre-Henry Cosyns, le président du Syndicat des Vignerons Bio de Nouvelle-Aquitaine (SVBNA). Regrettant la passivité du négoce n’ayant pas développé de marques fortes en bio, le vigneron en côtes de Bourg relativise le poids du vrac pour la filière bio : 20 % des volumes des vins AB seraient vendus non conditionnés, essentiellement pour une vente en Grande Distribution (GD), très touchée par l’inflation.

« Le vin bio est pourtant un développeur de valeur et répond aux enjeux d’avenir sur les questions environnementales. Il y a fort à parier que la viticulture de demain soit bio » plaide Pierre-Henry Cosyns, qui pointe qu’avec 20 % du vignoble bordelais aujourd’hui bio, « il faut que le négoce en profite. La bio n’est plus une anomalie ou une niche. Il faut se donner les moyens de forces commerciales agressives et de marketing conquérant, sinon il y aura un retour en arrière. » Arrêt des conversions et hausse des déconversions sont en effet attendus en Gironde (entre repli commercial et coup de bambou du mildiou cet éprouvant millésime 2023). Alors que les président du SVBNA constate à date que « la crise globale du vin rouge de Bordeaux a aussi contaminé le marché du bio. Pendant une dizaine d’années, nous avons profité d’une bulle spéculative plaçant nos cours presque au coût de production*. Hier, quand on vendait vrac, c’était à perte, aujourd’hui, il n’y a pas de marché, c’est à l’arrêt. »

Il faut se débrouiller seul

« Le marché du vin en vrac bio est encore plus atone que celui conventionnel (en rouge, la demande étant dynamique vins blancs secs/moelleux et restant active sur les vins rosés) » rapporte Philippe Hébrard, directeur de la cave de Rauzan (290 adhérents en Entre-deux-Mers pour 3 780 hectares, dont 615 ha en bio en 2023), qui confirme que « si vous comptez sur le marché du vrac pour vendre vos vins bio, rien ne se passera... Même en cassant les prix. Il faut se débrouiller seul en bouteilles. » Ne prévoyant pas de renversement à court-terme de la demande de vrac bio, Philippe Hébrard espère cependant un rétablissement dans le futur, entre raréfaction de l’offre (par effet de la distillation, de l’arrachage, du mildiou 2023…), les perspectives d’attractivité pour la GD (« avec ses prix, Bordeaux est un rempart contre l’inflation en grandes surfaces ») et la prospection à l’exportation : « il y a un an et demi, Bordeaux était encore en sous-production de bio. Il en manquait tellement que personne n’en proposait à l’export et ces marchés n’ont pas pu être créés et alimentés. Désormais nous avons de premiers développements, j’en espère plus à l’avenir. »

Creux de la vague

Face à un blocage total du marché du vrac, des domaines bio envisagent de réduire leurs surfaces en exploitation. Qu’il s’agisse de la tentation d’arrêter des fermages ou d’arracher une partie de leurs vignes en propre. « Beaucoup de vignerons ont fait leurs vendanges en étant dépités. Ils prennent la décision d’arrêter l’activité avant d’être en défaut de paiement, d’arracher soi-même en gardant la liberté et la valeur de leurs terres » témoigne Jean-Samuel Eynard, le président de la Fédération Départementale des Syndicats d'Exploitants Agricoles de Gironde (FDSEA 33). « On voit des parcelles en bon état être bradées, d’autres arrachées pour de la diversification vers d’autres cultures, d’autres saisir une opportunité de reconversion professionnelle…Il faut surtout éviter des drames humains » souligne le vigneron des Côtes de Bourg. Qui n’épargne pas « le négoce qui suit une mauvaise stratégie. Il va y avoir un fort effet de balancier, qui va partir très loin. Les volumes et surfaces vont chuter très vite. »

 

* : Le référentiel de la Chambre d’Agriculture de Gironde estime à 2 100-2 200 € le coût de production d’un tonneau de vin bio de Bordeaux rouge, pour une parcelle à 4 500 pieds hectares avec un rendement de 45 hl/ha.

 

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Tous les commentaires (4)
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Cqcvin Le 27 novembre 2023 à 15:34:16
On en parle des vins à défauts avec un prix élevé, et les explications poussives d'un viti bio, pire encore, biodynamiste ou nature! qui nous explique que le vin vie, donc son oxydation est normal et ses bretts justifiées...
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Ofense51 Le 27 novembre 2023 à 09:02:57
Comme quoi avoir des convictions ne suffit pas à assurer sa subsistance ! En fait, c'est même bien souvent le contraire, il aurait peut être fallu avoir une approche plus empirique du marché. Le dogmatisme n'emporte jamais les suffrages au final, il ne crée que des oppositions.
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Fazer26 Le 25 novembre 2023 à 02:28:33
Il faudrait peut-être ouvrir les yeux et revoir la distribution telle qu'elle est et non pas comme les producteurs aimeraient qu'elle le soit!
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corbières 11 Le 24 novembre 2023 à 17:45:37
Le marché des vins bio deviens complique pour les volumes . dans ma boutique de caviste independant les bibs de bio restent sur les étagères depuis 1 an . Le volume a fondu de 50% environ. le report se faisant sur les vins conventionnels. Le surcoût est trop grand pour le consommateur régulier. On ne retrouve pas cette baisse sur les bouteilles même si la demande spontanée s effrite .
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