es hygiénistes ont longtemps proclamé qu’une interdiction de la publicité en faveur des boissons alcoolisées pouvait contribuer à une réduction des ventes d’alcool, et par extension, des dommages causés par l’abus d’alcool. Mais une étude publiée fin juillet par l’Institut des Affaires Economiques (IEA) à Londres réfute cette hypothèse. Le responsable de l’économie sur les modes de vie au sein de l’institut et auteur de l’étude, Christopher Snowdon, affirme que si les producteurs investissent dans la publicité, c’est pour persuader les consommateurs de troquer une marque contre une autre, et non pour augmenter la consommation globale. Et de s’appuyer sur des chiffres relatifs à la période 1991-2001 en Grande-Bretagne, où les dépenses publicitaires sur l’alcool ont régressé de 10,8 % parallèlement à une hausse de 15,8 % de la consommation. De plus, la quasi-totalité de l'augmentation de la consommation portait sur le vin, qui fait bien moins l’objet de publicité que la bière ou les spiritueux. Pour rappel, l’Angleterre prône encore une approche plutôt libérale de la publicité sur l’alcool alors que l’Irlande a adopté un positionnement plus restrictif, et que l’Ecosse y songe.
Dans son étude intitulée Alcohol Advertising: What does the evidence show? (soit "Publicité sur l’Alcool: que révèlent les données de recherche ?"), Christopher Snowdon cite plusieurs travaux de recherche pour appuyer ses propos. A titre d’exemple, trois études sur les restrictions publicitaires imposées sur l’alcool dans les Etats canadiens de la Colombie britannique, du Manitoba et de Saskatchewan n’ont démontré aucun impact sur la consommation. De même, en 2014 larevue Cochrane, structure mondialement reconnue pour ses travaux de haut niveau en matière de soins de santé fondés sur des données probantes, a déclaré : « Il n'existe pas de preuves solides à l’heure actuelle pour ou contre la recommandation de mettre en œuvre des restrictions à la publicité sur l'alcool ». Et une étude transversale de 17 pays de l’OCDE sur la période 1975-2000 a conclu que « les interdictions de publicité ne réduisent pas la demande d’alcool ».
Attribuant la consommation à des facteurs plus culturels que publicitaires, l’économiste-chercheur estime que « les études qui se montrent favorables aux restrictions ont eu tendance à ignorer les facteurs de confusion ou à être truffées de biais, tels que les différences culturelles, les problèmes de mesure et les biais de sélection et de mémorisation. Par exemple, les études qui montrent que les plus gros buveurs déclarent voir plus de publicité pour l'alcool sont probablement des exemples de « causalité inversée » ». En l’absence de preuves solides quant à l’efficacité d’interdictions publicitaires sur l’alcool, Christopher Snowdon affirme que l’intervention de l’Etat ne se justifie pas. « La publicité influe sur la part de marché des différentes marques, mais les sommes consacrées à la publicité pour l'alcool n'ont aucun effet sur la consommation globale d'alcool. C'est ainsi que fonctionne la publicité sur tous les autres marchés matures, et il serait surprenant que l'alcool soit différent ». Et de conclure que « les affirmations véhémentes des militants anti-alcool sur la publicité doivent être prises avec des pincettes. L'analyse des données a révélé que seules quelques études de grande qualité se sont penchées sur la question et que les résultats sont, dans le meilleur des cas, mitigés. Une interdiction de la publicité pour l'alcool ne serait certainement pas une politique fondée sur des données probantes ».