e consommateur français considère toujours le vin comme un patrimoine national, mais, et c’est là où le bât blesse, de moins en moins, au fur et à mesure que les nouvelles générations relèvent les plus anciennes. « Le mythe s’affaiblit. Alors que les 55-80 ans qui constituent 29 % de la population voient le vin comme un produit du terroir synonyme de gastronomie, les 27-45 ans (22,6 % de la population) le relient à un univers intimidant, d’où les appellations sont absentes, et à un risque pour la santé. Les 12-26 ans (18 % de la population) n’ont plus qu’une faible connaissance du terroir et ils perçoivent clairement le vin comme un risque pour leur santé » pose Krystel Lepresle, la déléguée générale de l’association Vin & Société, ce 29 mars à Colmar lors de l’assemblée générale de l’Association des viticulteurs d’Alsace.
Les mutations alimentaires et sociétales interfèrent dans la transmission de la manière de consommer. « Les repas sont simplifiés. La prise d’aliments et de boissons est de plus en plus imbriquée dans des moments de loisirs. Les institutions familiales déclinent. Le grand-père et le père ne transmettent plus une manière de consommer. Le nombre de familles monoparentales a explosé. En 2021, il en existait deux millions en France dont une écrasante majorité de femmes qui sont prescriptrices des valeurs dans les foyers et consomment trois fois moins de vin que les hommes » poursuit la déléguée de Vin & Société. Or, « on emporte avec soi dans la vie les boissons qu’on consomme dans la tranche d’âge entre 25 et 35 ans ».


La consommation de vin apparaît ainsi très liée à la génération à laquelle chacun appartient. « La viticulture va perdre ces dix prochaines années la tranche d’âge qui consomme beaucoup. 6 % des acheteurs représentent 40 % des ventes en volume et 29 % en valeur. 86 % des membres de cette catégorie sont âgés de 50 ans et plus, dont près de la moitié ont 65 ans ou plus, et 28 % 75 ans et plus » détaille Krystel Lepresle. La concurrence des autres boissons comme la bière, n’arrange rien. Les jeunes générations expérimentent moins le vin que le cannabis. Leur niveau d’entrée dans la consommation est bas. « Penser qu’on va remettre la France au goulot est à oublier ! » lance encore l’intervenante.
Les 12-26 ans demandent au vin d’être plus ludique, plus simple à comprendre, de proposer des informations produit immédiatement accessibles via un outil digital. Ils sont plutôt favorables à l’apposition d’un message d’avertissement sanitaire sur l’étiquette. « Cette génération a besoin d’une approche ultra simple du vin, alors que la profession imagine un schéma complexe avec des appellations et des terroirs. Nous devons nous interroger si nous sommes sur le bon modèle, capable d’intéresser les jeunes générations » a réagi Serge Fleischer, président du Conseil interprofessionnel des vins d’Alsace (Civa). Pour sa part Vin & Société propose de favoriser l’apprentissage et la transmission intergénérationnelle de la consommation, mais aussi d’avoir une communication positive autour de la modération et du vin en signalant notamment les engagements RSE des opérateurs.