ette année à Angers, capitale des vins naturels chaque fin janvier pendant les salons Off, le tout nouveau bar à vins Chaussette proposait l’apéro tendance : le pet’nat-vermouth. La version « nature » du spritz, avec bulles alsaciennes en guise de prosecco, et vermouth nature du domaine Mosse (Anjou) pour l’amertume.
Né en Italie, utilisé dans nombre de cocktails « classiques » (martini dry, negroni…), le vermouth est devenu très populaire avant de tomber dans l’oubli après les années cinquante, sauf sous la forme de marques telles que Martini, Noilly Prat, Cinzano, Byrrh, etc.
Côté recette, il s’agit d’un vin aromatisé, comprenant au moins 75 % de vin, le reste étant constitué d’eau de vie, de sucre et d’aromates divers. Dans le détail, le type de vin, les quantités de sucre, les aromates, etc. sont laissés au libre choix du faiseur. « Il y a plein de paramètres, c’est un des produits les plus compliqués à créer. C’est assez passionnant », souligne Benoît Chaignon, de Distiloire, dans le Muscadet.
Première étape : trouver du vin. Et du bon, si possible : chez Distiloire, mais aussi Vinmouth (à Perpignan) ou la Thériaque (près de Montpellier), on mise sur la qualité de la matière première. « Soit on trouve des vignerons partenaires, qui produisent des vins de qualité (Nicolas Réau en Anjou, Lise et Bertrand Jousset à Montlouis, Alexis Hudon, côtes de la Charité), soit on achète du raisin en Gascogne et on fait le vin nous-mêmes. Mais c’est toujours en bio, voire en biodynamie et en nature, et on vendange nous-mêmes, à la main », décrit Julien Cohen, de Vinmouth.
Chez la Theriaque, Lana Labermeier travaille avec les vins (bio) de la cave coop d’Estezargues, « du bon vin, mais pas haut de gamme non plus, car ça serait dommage ». Chez Distiloire, Benoît Chaignon a convaincu sans trop de mal le vigneron touche-à-tout Benoît Landron (domaine bio Landron-Chartier) de lui confier une petite portion de sa prod.
Pour la suite, chacun a sa « recette » du vermouth, plus ou moins secrète. Pas de chaptalisation chez Vinmouth et des teintures mères importées d’Italie pour l’aromatisation ; plutôt des herbes fraîches et de la cueillette sauvage, pour le côté « terroir », chez la Thériaque. La fourchette des prix varie entre 25 et 40 €.
Et comment ça se boit, le vermouth ? « Tout seul avec des glaçons, avec des bulles ou en cocktail », explique Benoît Chaignon. Les mixologues sont les premiers clients de ces nouveaux produits de niche. « Ils cherchent des produits naturels et originaux, le truc que le voisin n’aura pas », évoque Benoît Chaignon, qui exporte son vermouth à New York.
« La tendance est là, ça prend de l’ampleur et la qualité monte, c’est certain », observe Julien Cohen. Surtout dans la Sud, d’ailleurs : à Perpignan par exemple, la vermuteria Sagi est un bar entièrement dédié à cet alcool, servi à la tireuse, à l’Espagnole. « Je trouve ça assez fantastique qu’on se réapproprie ces vieilles boissons, avec une meilleure qualité et un œil critique. Elles ont été accaparées par l’industrie, et on ne peut plus les boire. Alors il faut les refaire ! »