La décision de quitter le site de Vassal, à Marseillan-Plage a été très difficile à prendre. Ce site sableux du littoral séparant l’étang de Thau de la Méditerranée empêchait le développement du phylloxéra et autres virus tels que le court-noué sur le matériel végétal mais nous ne pouvions rester inactifs face au risque croissant de submersion et de salinisation de nos 8 500 accessions venues de 54 pays » rappelle Philippe Mauguin, PDG de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), ce 31 août, sur le site de Pech Rouge.
Acté depuis les années 2000, le projet s'est heurté à de multiples obstacles jusqu’à ce que les 163 hectares détenus par l’Inrae à Gruissan ne soient retenus fin 2012.
Après deux contrats de plan État-Région et un budget total de 5,1 millions d’euros, à moitié financé par la région Occitanie, le Conseil départemental de l’Aude, la Communauté d’agglomération de Grand Narbonne, et la commune de Gruissan, l’implantation peut enfin démarrer sur le massif de la Clape pour s’achever en 2032.


« Nous allons commencer cet automne par préparer les parcelles d’accueil des cépages et laisser les terres se reposer 2 ans. Avant d’être plantées, les accessions seront hygiénisées pour éviter le développement de potentiel virus en dormance ». Concrètement, l’Institut Français de la Vigne et du Vin (IFV) va micro-greffer des méristèmes sur une petite plantule issue de la germination d’un pépin de vigne de variété Viala et les traiter à la chaleur pour les assainir.
Philippe Mauguin sait déjà que ce transfert « titanesque » sera observé par les scientifiques du monde entier et fera de Pech Rouge « un site mondial de la recherche viticole et œnologique ».
Autre première mondiale, tous les plants transférés à Pech Rouge seront doublés et sauvegardés dans une grande serre construite à proximité des équipes de recherche et d’enseignement de l’Institut agro de Montpellier.
« Nous nous installons sur un site forestier classé et nous engageons sur des mesures de compensation pendant au moins 30 ans » tient à préciser Philippe Mauguin. Parmi elles, la restauration de milieux ouverts à semi ouverts favorisant le développement de différentes espèces de flore, insectes, reptiles, et d’avifaune. L’Inrae a également financé des études sur les forêts de pin d’Alep de la Clape et sur l’Atractyle humble.
Après avoir laissé la parole aux différents financeurs du projet, Philippe Mauguin donne à l’audience un aperçu de ce que sera la future collection de Pech Rouge et l’invitant à se rendre dans une parcelle plantée en 2021 de 279 accessions d’Europe de l’Est et de l’Ouest préselectionnées dans la collection de Vassal en fonction de leur diversité génétique.
« Ici, l’idée est de jouer sur les modalités d’irrigation et de comparer leur résistance au stress hydrique » a expliqué Patrice This, généticien qui recherchera les gènes impliqués dans la tolérance ou de la sensibilité de la vigne à la sécheresse.
Les raisins issus de ces essais et les futurs croisements seront vinifiés et caractérisés du point de vue œnologique dans une mini cave expérimentale créée sur site. « Nous avons conçu avec l’Inrae un robot qui nous permettra de réaliser toute l’année jusqu’à 60 microvinifications en simultané sur de tous petits volumes de vendange congelée » a dévoilé Marie-Agnès Ducasse, de l’IFV.
Protégée, la collection de Vassal sera en plus désormais mise en valeur « du gène à la bouteille ».