rpentant les vignes de l’Ardèche et de la Vallée du Rhône depuis deux jours, Jean-Christophe Payan constate globalement peu de signes d’échaudage. « J’ai juste vu des débuts de défoliations dans les parcelles superficielles et quelques baies restées à la taille de myrtille » témoigne le spécialiste de l’irrigation à l’Institut français de la vigne et du vin.
Agroclimatologue chez Itk, Serge Zaka a reçu peu de messages de viticulteurs pendant cette vague de chaleur. « Il y a eu beaucoup plus de dégâts sur maïs et sur tournesol ».
Une bonne nouvelle, d’autant que la canicule s’arrête ce soir sur la majorité de la France. « On va rester au-dessus des 30°C et des normales de saison, mais les températures ne causeront plus de stress thermique ». Ces prévisions sont valables pour les vignobles du Sud-Ouest, de Bordeaux, de la Loire, de la Champagne, ou de l’Alsace.
Dans l'Aude, quelques brûlures sur grappes liées à la chaleur sont dues à l'application tardive de soufre liée à la forte pression oïdium de l'année, comme le rappelle Nicolas Sourd de la Chambre d'agriculture.
En Alsace, où la véraison s’enclenche doucement, Marie-Noelle Lauer fait le tour du vignoble ce 19 juillet sans constater de dommages. « Il a fait 38°C hier et nous attendons encore des grosses chaleurs aujourd’hui, peut être que les effets ne se voient pas encore, mais nous sommes plutôt sereins ».
« La vigne qui n’a été soumise à de très fortes chaleurs que quelques jours devraient bien s’en tirer » poursuit Serge Zaka, beaucoup plus inquiet pour le triangle de la basse Vallée du Rhône et du Var. « La canicule va y durer encore une semaine, avec des températures qui pourraient atteindre 42 voire 43°C ».
Dans ces régions, le stress thermique et les conditions d’évapotranspiration pourraient finir par vraiment devenir problématiques. « Dans le Var, la végétation a déjà ralenti et légèrement jauni » témoigne Julie Mazeau, conseillère viticole à la Chambre d’agriculture.
Comme Serge Zaka et Jean-Christophe Payan, Julie Mazeau n'est pas rassurée par les faibles réserves hydriques et le manque de visibilité sur d’éventuelles précipitations. « La sécheresse a évolué de manière dramatique. Les sols ont le même niveau d’eau qu’habituellement à la fin août » précise Jean-Christophe Payan.
Prenant l'exemple d'une parcelle de syrah dans le biterrois, Itk indique grâce à son outil Vintel que le potentiel hydrique foliaire est 7 Bar (-0,7 Mpa) ce 19 juillet 2022 contre 3 Bar (-0,3 MPa) à la même date en 2021.


A Saint-Emilion, le conseiller Etienne Laveau espère de la pluie ce soir du 19 juillet. « Cela ferait du bien à tout le monde, et surtout aux vignerons qui travaillent sur des sols de graves et dont les baies commencent à se déshydrater ». Au risque de le décevoir, Serge Zaka explique que Bordeaux est en toute limite des précipitations prévues. « Si ça tombe, ce sera vraiment en faible quantité. En revanche, nous attendons des orages de Tarbes au Limousin. Mais ce n’est pas le genre de phénomène qui recharge les sols ».
Dans les régions où la vague de chaleur est passée, Itk conseille aux vignerons équipés d’irriguer pour faire gonfler les baies et éviter des niveaux d’alcool trop élevés.
En Bourgogne, même si la maturation ralentit sur les terres faibles, « les 170 mm tombés fin juin ont fait du bien aux sols » pose Thomas Gouroux, conseiller viticole à la Chambre de Côte d’Or.
Le coup de chaud a fait un peu de casse dans les parcelles les plus exposées au soleil couchant. « Des portions de grappes encore vertes commencent à flétrir. Celles qui ont commencé à vérer brunissent et quelques baies sont complètement desséchées mais les dégâts auraient pu être bien pires, d’autant qu’il est parfois difficile de distinguer l’échaudage, des impacts de grêle et du mildiou ou du rot brun ».
Reste à espérer que cette vague de chaud sera la dernière de l’été. Serge Zaka n’est pas confiant, car les réserves de chaleur sont très proches de l’Europe. « Elles remontent de la péninsule ibérique et du nord de l’Afrique dès que le vent tourne au sud. Nous pourrions très bien vivre une troisième canicule en août » prévient-il.