Denis Guthmuller : Nous n’avons pas encore eu de discussion sur l’arrachage, ce n’est pas à l’ordre du jour. Nous regardons cependant ce qui se passe à Bordeaux. L’aide à l’arrachage définitif est un dispositif qui pourrait nous intéresser. À date, nous n’avons pas de velléité. Mais j’ai une lecture du vignoble des Côtes-du-Rhône qui est assez difficile en ce moment. Nous avons connu des épisodes d’aléas climatiques, nous sentons un ralentissement des sorties de chai, il y a une tendance à la déflation… Je sens une anxiété de plus en plus sourde.
Nous avons demandé à l’interprofession une étude générationnelle pour connaître auprès de chaque exploitants ses projets de changement de sa surface de production sur les 5 à 10 prochaines années. Les surfaces peuvent augmenter ou diminuer. Du potentiel de production va se libérer dans les prochaines années pour l’installation de jeunes. L’étude doit commencer dans les semaines qui viennent pour être menée en 2022. Notre idée est d’avoir la vision la plus exhaustive : on ne sait pas de quoi est fait demain. Et son surlendemain.
Vous n’avez donc pas de demande d’arrachage à date, mais vous seriez intéressé par la réintroduction de cet outil dans la réglementation européenne en cas de besoin ? Vous soutenez donc les demandes de Bordeaux ?
L’outil n’existe plus dans les textes européens, et il semble compliqué de le rétablir. Nous n’avons pas de velléité de s’en servir, mais nous sommes plutôt bienveillants face aux demandes de Bordeaux. La problématique est structurelle. Il y a une déconsommation des vins rouges d’appellations régionales. L’arrachage définitif peut servir pour s’adapter. Tout le monde n’aura pas les moyens et l’énergie humaine pour évoluer.
Elle se retrouve plus sur une partie de l’AOP Côtes du Rhône. Les crus sont dynamiques. Cela n’est pas géographique, cela dépend des opérateurs, qui ont plus ou moins de problématiques économiques. Il y a de grosses disparités entre entreprises : certaines ont trop de vin, d’autres en manquent. Je reste persuadé que l’on a dans notre appellation de quoi produire des vins trouvant leur public.
Le vignoble des Côtes du Rhône est-il en crise ?
Il n’y a pas de problème structurel profond. Notre problématique est celle des surstocks, qui restent encore limités. Nous pensons arriver en fin de campagne à une douzaine de mois de commercialisation en stocks, contre 8 à 9 mois habituellement. Même s’il y a une déconsommation de vins rouges, nous progressons à l’export. Nos vins sont très bien adaptés aux profils de demain. C’est juste une consommation qui, je pense, change : avec des consommateurs historiques qui évoluent. Les choses changent, il faut être dans la séduction.
À Bordeaux, la question de l’arrachage est consensuelle dans le vignoble (avec des propositions alternatives de financement), mais divise dans le négoce. Avez-vous évoqué ce sujet avec les négociants ?
Nous n’avons pas avancé sur ce sujet avec la production. Nous n’en avons donc pas encore parlé avec le négoce. Ce n’est pas à l’ordre du jour. Ne mettons pas la charrue avant les bœufs.