ésistant à la morosité ambiante, « Bordeaux n’est pas mort ! » lance Pierre-Jean Larraqué (groupe LVI possédant les marques Haussmann, avec 2 000 hectares sous contrats), rencontré en marge de l’assemblée générale de l’association Alliance des Récoltants qu’il préside (une réunion de 28 domaines indépendants pour bénéficier de la puissance commerciale de LVI). Si le négociant partage le diagnostic d’un déséquilibre entre offre et demande, il ne croit pas dans les vertus de l’arrachage pour résoudre la surproduction et plaide pour la diversification en adéquation avec la consommation. « À Bordeaux, on produit 2 millions d’hectolitres qui se baladent et régulent les prix par le bas. Que des vignerons ne puissent pas vivre de leur métier, ça ne devrait pas exister. Il faut aider la transition du vignoble de Bordeaux, avec le soutien du ministère de l’agriculture, pour passer de l’AOP vers l’IGP » explique-t-il.
Se posant en créateur de filière, Pierre Jean Larraqué évoque les forts développements de son offre de rosé en IGP Atlantique, quand son offre de Bordeaux rosé patinait : « pourquoi est-ce que le bordeaux rosé ne marche pas ? Parce qu’il n’y a pas de vraie filière : c’est une variable d’ajustement selon la qualité du millésime pour les vins rouges. » Soulignant le fort potentiel des cépages traditionnels bordelais pour produire des vins IGP de cépages connus internationalement (« il manque juste le chardonnay pour compléter, on doit en planter à Bordeaux, ça commence à se faire »), le négociant reconnaît la difficulté de mettre en marche des vins rouges sous IGP Altantique : « on lance un vin rouge de cabernet franc à servir entre 5 et 10°.C, avec un thermomètre dessus. On crée. »
Pour créer filière et valeur, Pierre-Jean Larraqué souligne que l’ensemble du projet repose sur des marques. « Faire de l’IGP ne se vend pas en domaine, mais en marques » souligne-t-il, cherchant à sécuriser la qualité de ses approvisionnements (en termes organoleptiques, mais aussi environnementaux). « L’important c’est la création de valeur sur le long terme pour le producteur avec des engagements d’achat en volumes et en prix. Se réfugier derrière une marque permet d’éviter tout danger sur le prix, qui reste fixé » note le négociant, qui plaide donc pour privilégier à la subvention d’arrachages des aides aux marques. À Bordeaux, « on a besoin de locomotives » martèle-t-il, souhaitant créer un club de marques au sein de l’interprofession des vins de Bordeaux, comme l’avait fait Jacques Gravegeal pour les vins Pays d’Oc IGP (où l’interprofession peut participer jusqu’à 50 % des aides à un plan d’action de promotion).
Ayant pour figure tutélaire son grand-père, fondateur de cave coopérative à Bordeaux, Pierre Jean Larraqué se donne pour mission de faire vivre des familles paysannes sur leurs terres afin qu’elles puissent les transmettre. Avec le credo : « Bordeaux possède la meilleure offre diversifiée de vins de France ».
En 2021, le groupe LVI indique avoir commercialisé 17,5 millions de cols pour 52 millions euros de chiffres d’affaires (soit une baisse de 14 millions € en un an, notamment avec la fermeture du marché chinois à cause de la pandémie de covid). Pour 2022, l’objectif est d’atteindre 65 millions €. En 2028, la cible est 98 millions, sachant que tous les objectifs précédents ont été atteints note Pierre Jean Larraqué.
Ses approvisionnements sont issus à 75 % de Bordeaux et à 25 % d’autres régions du Sud de la France (Languedoc, Provence, vallée du Rhône…). « Pas de vins espagnols » note Pierre Jean Larraqué, qui regrette l’absence de vins effervescents dans sa gamme : « on cherche à réaliser une acquisition externe ».