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Vignerons, il faut "se reprendre pour améliorer la vie des sols"
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Marc-André Selosse
Vignerons, il faut "se reprendre pour améliorer la vie des sols"

Professeur du Muséum National d'Histoire Naturelle, l'éminent biologiste fait le point dans cet interview sur un sujet clé pour l’avenir du vignoble.
Par Alexandre Abellan Le 30 mai 2022
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Vignerons, il faut
'Ce n’est pas parce que je pointe des gestes inappropriés (labours intensifs, traitements phytos…) que je montre du doigt les vignerons' précise le professeur. - crédit photo : DR
L
a vie des sols devient un enjeu viticole capital…

Marc-André Selosse : Il faut resituer l’historique entre l’utilisation d’arsénite de soude contre l’esca, de disulfure de carbone contre le phylloxera, de cuivre contre le mildiou, pesticides variés et, au-delà, les labours intensifs pour limiter la compétition de l’eau. En lisant l’Atlas français des bactéries du sol (publication de l’INRAe de Bourgogne), on s’aperçoit que c’est dans la vigne qu’il y a le minimum d’activité microbiologique des sols (comme en arboriculture). En regardant bien, on s’aperçoit que le verre peut être à moitié vide et à moitié plein : il n’y a pas d’extinction d’espèces, mais les effectifs diminuent. La catastrophe n’est pas sur le nombre d’espèces, mais sur le nombre d’organismes : la biomasse microbienne est faible, ce qui implique une moindre diversité génétique. C’est le début de la fin, mais ce n’est pas la fin. La bonne nouvelle, est que l’on peut se ressaisir : se reprendre pour améliorer la vie des sols.

 

Comment améliorer cette activité microbiologique ?

Une solution est d’enherber la vigne. Cela peut créer des problèmes transitoires de compétition pour l’eau, comme le stock de matière organique n’est pas reconstitué et parce que les racines de la vigne sont en surface et doivent plonger pour éviter celles du couvert végétal. Enherber permet aussi de ramener de la matière organique dans le sol, qui retient l’eau par elle-même comme une éponge et par son effet de porosité du sol par l’agrégation. Un autre aspect est de réduire le labour, qui augment l’érosion. Au total, dans un sol couvert vont proliférer les microbes et animaux qui vont créer de la porosité une capacité active à décompacter et faire rentrer de l’eau, tout en retenant le sol.

Depuis ma position, c’est facile de dire au doigt mouillé ce qu’un vigneron doit faire. Car en réalité, il n’y a pas une solution unique : il faut décliner l’enherbement et le travail du sol selon les bassins viticoles, les terroirs, etc. Ça ne va pas être un pique-nique au soleil, il va falloir s’adapter. Mais la bonne nouvelle, c’est qu’il y a des solutions à explorer et adapter.

 

D’autres leviers sont-ils envisageables ?

La gestion des sols passe également par l’encépagement. Les cépages résistants au mildiou et à l’oïdium, les obtentions Resdur, permettent de traiter deux fois moins, donc de moins tasser le sol et de réduire les apports de cuivre et pesticides dans le sol. Cela implique des changements dans les modalités de production, mais il ne faut pas compartimenter les solutions. En plus, le changement climatique créé l’occasion de changer les cépages… et les pratiques.

 

Comment suivre le développement biologique de son sol ?

Des analyses classiques suffisent (compaction, NPK…), il n’y a pas besoin de passer à la caisse pour une analyse microbiologique (qui est souvent difficile à utiliser, même pour un expert) ou des inoculations (qui sont souvent d’origines exotiques et aux effets encore peu assurés), alors qu’il y a de la vie locale à réveiller dans les sols. Les vignerons sont déjà des microbiologistes en cave (avec les levures et bactéries lactiques), qu’ils restent des agriculteurs au champ : les gestes classiques sur le sol et les plantes suffisent.

 

Le mot de la fin ?

Ce n’est pas parce que je pointe des gestes inappropriés (labours intensifs, traitements phytos…) que je montre du doigt les vignerons. Ils gèrent une difficile complexité et il faut les aider techniquement, par la recherche et le transfert. Il faut un sursaut incluant les consommateurs pour aller vers des pratiques plus vertueuses, attestées par des labels. J’en appelle à l’agroécologie.


 

 

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Tous les commentaires (4)
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Denis Le 06 juin 2022 à 10:03:59
Ce discours sonne juste, il faut l'entendre ! Notre expérience montre que l'enherbement permet de redonner vie à un sol abîmé en une dizaine d'années, l'état de notre sol a été évalué par d'éminents pédologues avant et après: d'un sol moribond nous sommes passés à un état de parfait fonctionnement, c'est extraordinaire ! Les effets bénéfiques multiples et importants nous encouragent à persévérer.
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Guibbert Le 03 juin 2022 à 07:12:26
Nous réalisons ce changement mais il est très difficile la destruction de la matière organique depuis des générations est dur à compenser. Et les techniciens actuel ne sont pas compétant pour gérer avec ce type de travail. Il faudra beaucoup de temps pour y arriver dans un contexte économique difficile
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pg Le 02 juin 2022 à 08:04:42
J' ai découvert Mr Selosse sur YouTube , "vers de terre production". Je conseille à tous de prendre le temps de visionner vers de terre production. Vous découvrirez des techniques de grandes cultures transposables à la vigne. Les céréaliers on une incessante nécessité de réduire leurs couts ce qui les obligent à une imagination et une remise en question permanente. Les scientifiques cherchent beaucoup ,trouvent parfois. A nous d'expérimenter ( avec prudence ). Mr Sélosse et ses collègues de V deT production ne passent pas leur temps à donner des leçons. Ils n' opposent pas bio et conventionnels. Bref , ils font de l' agronomie. Depuis que je visionne cette chaine, je me suis fixé de nouveaux objectifs visant à maintenir mes rendements tout en augmentant mes taux d' humus. J' ai abandonné les herbicides il y a 12 ans. Ce ne fut pas une mince affaire. Mais je ne regrette rien. Demain pourrait etre sans travail du sol avec production intensive de biomasse.
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MG Le 30 mai 2022 à 18:45:28
Cela m'a toujours intrigué qu'on nous préconise le travail du sol alors qu'on voit bien que les agriculteurs on une démarche plus dans l'optique de la conservation des sols (sol toujours cultivé). Par contre, je suis plus réticent vis à vis du principe "d'intelligence des plantes" : a trop vouloir vulgarisé on tombe à côté.
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