Sur fond de turbulences en 2020, les vins fins se sont imposés comme une protection solide contre la volatilité du marché, selon la plateforme du commerce des vins fins Liv-Ex. « Non seulement les prix des vins fins ont augmenté, mais le vin a offert une stabilité inégalée en cette année de volatilité », a déclaré la plateforme basée au Royaume-Uni dans son dernier rapport sur le marché des vins fins. C’est en comparant l’indice Liv-Ex 100, une référence dans le secteur qui suit les meilleurs vins du monde entier, à des références financières et boursières, à savoir le DAX allemand, le S&P 500, le FTSE 100 de la Bourse de Londres et le Hang Seng de Hong Kong, que la plateforme est arrivée à cette conclusion.
À fin novembre, seuls le S&P 500 et le Liv-Ex 100 affichaient des résultats positifs sur l'année, avec une progression de 4,65 %. Le DAX est resté stable, le FTSE et le Hang Seng sont restés en territoire négatif. En novembre, l'indice a atteint son plus haut niveau en deux ans, tandis que le commerce en valeur a atteint son plus haut niveau en dix ans, selon Liv-Ex. Les prix des vins fins ont progressé en toute tranquillité, et la volatilité est restée relativement modérée. Le vin s'est négocié dans une fourchette de prix très étroite, comme l'indique l'écart-type sur le graphique 2.
L'augmentation de la liquidité explique en partie la stabilité du marché. Au fur et à mesure que le nombre de participants (et leurs vins) sur le marché a augmenté, l'achat et la vente sont devenus plus faciles, ce qui a réduit les mouvements de prix brutaux souvent créés par un manque de liquidité. La liquidité se reflète dans la hausse de la valeur des offres et des demandes. L'exposition totale (valeur globale des offres d'achat et de vente) a atteint un niveau record de 83 millions de livres sterling, soit une hausse de 33 millions par rapport à l'année dernière.
Fin novembre, le rapport entre les offres d'achat et les offres de vente (c'est-à-dire la valeur totale des offres d’achat divisée par la valeur totale des offres de vente) s'élevait à 0,62. Traditionnellement, un rapport demande/offre de 0,5 ou plus indique un sentiment positif. La tendance haussière du marché des vins fins cette année, telle que reflétée dans ces indices, s’explique également par l'affaiblissement de la livre sterling, associé à l'augmentation de la cote du vin en tant qu’actif prisé.
Par ailleurs, Liv-Ex a noté dans son rapport le ralentissement du marché asiatique, ce qui remet en question le rôle de Hong Kong comme plaque tournante pour les vins fins. La fermeture de la frontière avec le continent chinois pendant près d'un an a empêché les touristes en provenance du continent, qui sont traditionnellement très fortunés, de dépenser leur argent sur de grands vins à Hong Kong.
Dans le même temps, le commerce des vins fins en provenance de Hong Kong et à destination de la Chine continentale, en franchise de droits, a été pratiquement suspendu en raison de la fermeture de la frontière. Selon Liv-Ex, l’analyse des achats au cours des cinq dernières années met évidence deux grandes tendances : le ralentissement asiatique, où la part de marché de l'Asie est passée de 25 % en 2015 à 17 %, et une hausse concomitante de l'activité américaine, qui passe de 8 % à 24 %.
Au moment où un point d'interrogation plane sur l'avenir de Hong Kong comme plaque tournante pour les vins fins, on observe une évolution du marché, caractérisée par l'émergence de vendeurs plus actifs dans la région. Par ailleurs, les Asiatiques jettent désormais leur dévolu sur le Champagne, les cuvées bourguignonnes plus abordables et les vins italiens, au détriment des vins de Bordeaux. Ceci étant dit, la Chine devient le premier pays à revenir à la normalité post-pandémie, et prépare ses achats pour son Nouvel An. Ainsi, on s'attend à ce que la région se réaffirme prochainement comme source majeure de demande.
Aux États-Unis, l’intérêt manifesté par les consommateurs en faveur des vins fins, motivé peut-être par des cours boursiers record, n'a cessé de croître, les acheteurs ciblant plus particulièrement en 2020, l'Italie, la Champagne et le Rhône. Cette année, la plupart des vins commercialisés proviennent encore de régions productrices traditionnelles comme le Bordelais et la Bourgogne, mais il existe également des transactions portant sur les vins issus d’Angleterre, de Chine, de Hongrie, de Suisse, d'Autriche, d'Allemagne, du Chili, d'Argentine et d'autres pays. Les prix par bouteille sont compris entre 4 et 21 000 livres sterling.