La levure transforme les aldéhydes en alcools, a rappelé Benoît Verdier, directeur des développements œnologiques chez Seguin Moreau, lors d’un webinaire organisé par l’Institut Coopératif du Vin ce 12 juin. De ce fait, à la fin d’une fermentation en présence de copeaux, le vin présente 8 à 10 fois moins de molécules aromatiques directement issues du bois qu’après un élevage en barrique neuve. »
Pour autant, utiliser du bois durant la fermentation est selon lui loin d’être inutile. « Si certaines molécules disparaissent, d’autres vont s’associer aux composés soufrés du moûts pour former de nouveaux composés aromatiques d’intérêt. » C’est le cas du furfural, à l’arôme d’amande grillé. « Son seuil de perception est de 15 mg/l. On le retrouve rarement dans le vin, même après un passage en barrique neuve, insiste Benoît Verdier. La fermentation le transforme en furfuryl thiol, dont le seuil de perception n’est plus que de 0,4 ng/l et qui donne des notes de café au vin. »
Benoît Verdier a également expliqué que lors de la fermentation, les furanes du bois chauffé masquent le végétal et apportent de la longueur en bouche. La whiskylactone, dont la teneur ne diminue pas lors de la fermentation va aussi diminuer le végétal. « Et elle donne des arômes de fruits mûrs voire de fruits exotiques. En revanche, entre 1 et 3 g/l, on ne tombe pas dans le côté coco.»
Benoît Verdier a bien d’autres arguments. « Si la majorité de la vanilline disparait, on a la formation de vanillin-thiol, qui développe le caractère minéral des vins blancs. » Toujours sur les blancs, il a aussi présenté les récents travaux de Laffort et de l’ISVV sur chardonnay. « Les pyrroles du chêne chauffé deviennent des thiopyrroles lors de la fermentation et lui donnent ses arômes typiques de noisette. »
Selon lui, le bois renferme des molécules dont les vignerons tireront plus de bénéfices durant la fermentation que lors de l’élevage. C’est le cas des ellagitanins. « Aucune étude n’a jamais démonté leur effet sur la structure et la « tannicité » du vin, que ce soit à l’issu d’un trempage de copeaux ou de passage en barrique. En revanche, ces tanins vont capter un grand nombre de composés soufrés et améliorer la netteté des vins. Ils vont aussi catalyser les oxydations. »


Benoît Verdier a enfin évoqué la libération par certains bois de chêne de quercotriterpenosides (QTT), récemment découverts par Axel Marchal à l’ISVV, « au pouvoir sucrant 10 000 fois plus grand que le saccharose. Avec les whisky-lactones, ces composés sont parmi les plus difficiles à extraire. Travailler tôt et avec des petites particules est donc particulièrement recommandé. »
Lors de ce webinaire, Thomas Oui, responsable des alternatifs bois à l’ICV, a mis en lumière un dernier avantage à l’utilisation des copeaux en fermentation. « A ce stade, le vin est naturellement brassé et va circuler dans tous les vaisseaux du bois, maximisant l’extraction de ses composés. »
A la fin de son exposé, Benoît Verdier a tenu à remettre en place ceux qui discréditent l’utilisation du bois en fermentation. « Ceux qui prétendent que tous les composés disparaissent manquent de rigueur scientifique. Ils ne font que priver les vignerons de l’opportunité de présenter des vins plus rapidement à leurs acheteurs et de la possibilité de faire des économies. Le bois coûte cher. Ce n’est pas la peine de balancer du bois frais en fermentation puis du bois chauffé lors de l’élevage. »