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Hubert de Boüard et Philippe Castéja contestent leur mise en examen
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Classement de Saint-Émilion
Hubert de Boüard et Philippe Castéja contestent leur mise en examen

Figures bordelaises, les deux hommes sont poursuivis pour prise illégale d’intérêts, étant des propriétaires de crus classés ayant siégé au comité national vin AOC. Une accusation de juge et partie qu’ils contestent et qui est confirmée par des membres de l'INAO.
Par Alexandre Abellan Le 02 octobre 2018
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Hubert de Boüard et Philippe Castéja contestent leur mise en examen
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’il est une affaire bordelaise qui n’est pas classée, c’est bien celle du classement de Saint-Émilion en 2012. Révélées par Mediapart, les mises en examen pour prise illégale d’intérêts de l’œnologue Hubert de Boüard et du négociant Philippe Castéja par le tribunal de grande instance de Bordeaux relancent une affaire en sommeil depuis des années. Personnalités incontournables du gotha girondin (voir encadré), les deux hommes sont soupçonnés d’avoir influencé le classement des grands crus classés de Saint-Émilion de 2012 à leur profit dans le cadre de leur mission auprès de l'Institut National de l'Origine et de la Qualité (INAO).

Les deux hommes siègeaient en effet au Comité national vin AOC de l’INAO (le premier pour la production, le second pour le négoce) et ils sont tous deux copropriétaires d’un cru classé (le premier du château Angélus, passé en 2012 au rang de premier cru classé A, le second du château Trottevieille, maintenu premier cru classé B). De plus, via sa société de consulting éponyme, Hubert de Boüard a de plus suivi sept propriétés de la rive droite classées en 2012.

Je conteste formellement

Ces mises en examen marquent le tournant d’une instruction lancée en 2013, et marquée par deux commissions rogatoires suite à la plainte contre X pour prise illégale d’intérêts déposée par trois châteaux déclassés de Saint-Émilion (Croque-Michotte, Corbin Michotte et La Tour du Pin Figeac). Les trois propriétés visaient à l’époque Hubert de Boüard et Philippe Castéjà. Mis en cause depuis cinq ans, Hubert de Boüard « conteste formellement les informations données par Mediapart, qui mélange tout. Je n’ai jamais pris part à l’élaboration et au vote du classement. » Mettant la priorité sur ses vendanges, il souligne que « derrière les grands titres de la mise en examen, il n’y a pas de preuves de culpabilité. Cela fait 35 ans que je fais du collectif et j’ai toujours eu l’honneur de pouvoir me regarder dans le miroir. »

Soit une défense inchangée depuis son attaque pour diffamation du livre Vino Business d’Isabelle Saporta (publié en 2014 aux éditions Albin Michel), qui décrivait Hubert de Boüard en position de conflit d’intérêts et le qualifiait de « petit Machiavel du vin » (des propos jugés péjoratifs et non diffamatoires en 2016).

Par de registre des sorties

Se défendant avec la même ferveur d’avoir pris part aux échanges et délibérations, Philippe Castéja souligne ne s’être « jamais occupé de près comme de loin du classement de Saint-ÉmiIion. Le château Trottevieille était premier cru classé quand je l’ai pris en main, il sera encore quand je le laisserai, je n’ai jamais demandé une mention premier cru classé A. » Serein, Philippe Castéja regrette simplement que « l’INAO n’ait pas tenu un registre des entrées et sorties lors de ses réunions…. »

On savait que le classement allait être attaqué

Cette défense est confirmée, anonymement, par des habitués du Comité national des appellations d’origine relatives aux vins. « Sur des sujets aussi sensibles, dès lors qu’il y a débat et vote, le président est strict et fait sortir de la salle les producteurs des appellations concernées. De mémoire, Hubert de Boüard et Philippe Castéja ne participaient pas au débat » rapporte un vigneron non-girondin, qui précise que l’INAO « savait que quel que soit le résultat, le classement allait être attaqué. On a donc fait très attention à ce que les personnes concernées ne soient pas présentes. »

Également pointée du doigt par Mediapart, la présidence du Comité régional de l’INAO (CRINAO) par Hubert de Boüard n’aurait pas eu d’impact sur le dossier selon des membres de l'INAO. Comme l’explique, non sans agacement, un expert technique proche du sujet : « le CRINAO n’a rien à voir avec le classement, qui a été géré en vase clos par une commission de classement (présidée par le défunt juriste Robert Tinlot, inspecteur honoraire de la répression des Fraudes) et deux organismes indépendants (le bureau Veritas pour le contrôle des exploitations et Qualisud pour les dégustations). Le CRINAO n’envoie que des demandes de modification de cahier des charges, donne des avis de rendements et de chaptalisation. »

Trois David contre deux Goliath

Avocat des trois châteaux déclassés à l’origine de l’affaire, maître Éric Morain souligne que si le dossier d’instruction était vide et qu’aucun des deux hommes n’était présent ou n’était intervenu lors d’aucune réunion sensible, ils ne seraient probablement pas mis en examen. « C’est toujours compliqué d’être le petit face au grand dans un rapport de force déséquilibré. Avec le réseau, le financier, l’influence. La justice est là pour rétablir l’équilibre, elle le fait enfin » estime le pénaliste.

Alors que les trois châteaux déclassés ont fait appel devant la Cour administrative de Bordeaux du classement de 2012, une décision est attendue pour la fin de l'année. Et devrait sans doute rebondir devant le Conseil d'État, quelle qu'en soit l'issue. Le sujet du classement de Saint-Émilion est définitivement loin d’être classé.

Deux personnalités de poids

Présentés comme « deux gros viticulteurs du Bordelais » par le site Mediapart, les deux hommes sont effectivement de poids, mais bien au-delà de la viticulture.

Hubert de Boüard de Laforest est depuis 1985 à la tête du domaine familial d’Angélus (devenu en 1996, premier grand Cru classé B). Il est également copropriétaire des châteaux Bellevue (cru classé de Saint-Émilion) et de Francs (Côtes de Francs) et d’Anwilka Vineyards en Afrique du Sud (Stellenbosch), et propriétaire de La Fleur de Boüard (Lalande de Pomerol). Très impliqué dans le syndicat viticole de Saint-Émilion, il l’a présidé de 1999 à 2008. Il est le premier jurat de la Jurade de Saint-Émilion depuis 2011.

Philippe Castéja est le président du groupe Borie Castéja Animation Participations (BCAP), qui possède quatre négoces girondins (Borie-Manoux, Grands Vins de Gironde, de Luze et Mähler-Besse) trois crus classés (à Saint-Émilion le château Trotte Vieille, à Pauillac les châteaux Batailley et Lynch-Moussas) et deux sites de vente en ligne (LaGrandeCave et 1Jour1Vin). Ancien président du Conseil Interprofessionnel des Vins de Bordeaux (CIVB) et de la Fédération des Exportateurs de Vins et Spiritueux (FEVS), il préside actuellement le Conseil des Grands Crus Classés en 1855 depuis l’an 2000. Personnalité majeure de la place de Bordeaux, il va accueillir la fête de la Fleur au château de Lynch Moussas, en soirée de clôture du salon Vinexpo (jeudi 16 mai 2019).
 

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Tous les commentaires (3)
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Dionysos Le 17 novembre 2018 à 02:41:57
Lorsque la France aura fait le ménage de ces escrocs en cols blancs qui détournent les règles de l’économie pour se remplir les poches, la qualité et le talent reprendront le dessus.
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gallus vindex Le 02 novembre 2018 à 12:04:35
Le terroir du château L'Angelus n'a jamais été considéré comme étant de premier ordre. Voir par exemple l'ouvrage du professeur Henri Enjalbert "Les grands vins de Saint-Emilion, Pomerol, Fronsac, Paris 193, page 168 et 2005. Si cette propriété est montée si haute dans le classement, c'est apparemment aux astuces oenologiques dans l'élaboration de ses vins et le marketing très poussée et sophistiquée mis en oeuvre par ses propriétaires. En effet, la seule notoriété d'une propriété viticole compte pour au moins 50 % pour son placement dans la classification. Situation parfaitement aberrante qui devrait changer au plus tôt. Il va de soi que se système de classifier les vins est source de conflits entre propriétaires, qui - eux - estiment souvent à juste tître (pas toujours, comme le montre l'exemple du château La Tour du Pin Figeac) que leur vins, classé moins haut, est au moins d'une qualité égale à celui classifié plus haut. Il est vrai que la notoriété d'une propriété - en faisant abstraction de la qualité des vins y produits - compte pour au moins 50 % dans la classement - un système qui, à mon sens, se condamne soi-même.
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Robert G Le 02 octobre 2018 à 15:38:48
quand on voit leurs collections de titres, même pas exhaustive, sacrés cumulards ces chères pontes! pas étonnant qu'il y ait des soupçons, que les membres de l inao l acceptent ou pas, il y a sérieux mélange des genres! a quand des déclarations d intérêt sur l honneur et un processus plus transparent de communication des tractations qui se tiennent tous les mois à Paris dans l opacité?
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