près la pause prolongée de la crise covid, Vinexpo Asia est revenu à Hong Kong du mardi 28 au jeudi 30 mai après six ans d’absence : de quoi mesurer les bouleversements du marché chinois entre la douce euphorie de 2018 et la blême incertitude de 2024. Si tous les pays fournisseurs de vin ont encaissé de fortes baisses dans leurs commercialisations, l’Australie reste sans nul doute la plus touchée. Mettant à profit son accord de libre-échange, le leader était le pays invité d’honneur de Vinexpo à Hong Kong en 2018 avant de subir de plein fouet les taxes punitives de 116 à 218 % imposée de la fin 2020 au début 2024.
Désormais devenus challengers, les opérateurs du vins australiens ont l’ambition de repartir à l’assaut d’un marché chinois qui s’est rétracté au tiers de ce qu’il représentait par le passé en repartant sur le terrain. « Les wineries sont contentes d’être de retour à Hong Kong avec Vinexpo Asia : cela permet de se rencontrer à nouveau en face à face. C’est le premier d’une longue série de pas pour créer des opportunités commerciales en Chine » explique à Vitisphere Paul Turale, le directeur général de l’organisation de promotion Wine Australia. Prévoyant une tournée de quatre villes chinoises dans les prochaines semaines et la participation au salon ProWine Shanghai (8-10 novembre prochains), la filière australienne ne compte pas attendre après la levée des tarifs cette fin mars.


Si les premiers chiffres commerciaux ne sont pas encore communiqués, la reprise commerciale serait plus importante que prévue selon le directeur de Wine Australia, qui souligne immédiatement que les vins australiens se heurtent aux mêmes difficultés commerciales que leurs concurrents. « La consommation de vin s’est réduite pour de nombreuses raisons. La crise covid n’a pas aidé, les difficultés économiques non plus » pointe Paul Turale, ajoutant que « s’il est différent, le marché chinois est toujours important et représente une opportunité significative pour les vins australiens ».
Débouché stratégique, mais pas exclusif, la leçon ayant été apprise durement avec l’effondrement du marché chinois. « Les wineries australiennes accueillent avec soulagement la réouverture du marché chinois, mais elles ont appris qu’il y avait des bénéfices et des risques : la plupart se sont diversifiées sur d’autres marchés » rapporte Paul Turale, évoquant une diversification des destinations à l’exportation, notamment en Asie. Si Hong Kong et Singapour sont travaillés historiquement, les vins australiens affichent de fortes croissances au Vietnam, en Thaïlande, en Malaisie… Mais ces nouvelles destinations n’ont ni compensé, ni absorbé, les volumes passés du marché chinois.
Alors que l’Australie a cumulé un millésime généreux en 2021 et l’impact de la crise covid sur la consommation dans le monde, la fermeture du marché chinois a fait grossir un surstock rendant intenables les déséquilibres entre offre et demande. Pointant que l’Australie ne bénéficie pas de dispositifs d’aides à la distillation ou à l’arrachage contrairement à l’Europe, Paul Turale espère que les années de vaches maigres sont passées : avec une très petite récolte 2023 (entre aléas climatiques et raisins laissés sur pieds) et millésime 2024 s’annonçant peu productif (d’après les estimations à date), l’Australie peut espérer un rééquilibrage de ses stocks accéléré par la relance du marché chinois.
Alors que le conflit commercial entre la Chine et l’Union Européenne menace de déboucher sur des taxes chinoises ciblant cognacs et vins européens, le directeur de Wine Australia ne souhaite pas commenter les tensions géopolitiques d’autres pays, mais partage l’idée que le vin est souvent un dommage collatéral de disputes internationales qui lui sont extérieures. Alimentant un sentiment d'injustice, et d’impuissance. Rendez-vous en mai 2027 à Hong Kong pour le prochain Vinexpo Asia et l’espoir d’une nouvelle donne pour tous les vins et spiritueux sur le marché chinois.