menu burger
Lire la vigne en epaper Magazine
Accueil / Viticulture / Le biochar, une solution pour retenir l’eau dans les sols et améliorer la pousse de la vigne
Le biochar, une solution pour retenir l’eau dans les sols et améliorer la pousse de la vigne
Lire plus tard
Partage tweeter facebook linkedin

Lutte contre la sécheresse
Le biochar, une solution pour retenir l’eau dans les sols et améliorer la pousse de la vigne

Plusieurs essais d’amendement avec du biochar sont en cours à travers la France. D’après les premiers résultats, ce produit semble améliorer l’alimentation en eau de la vigne.
Par Chantal Sarrazin Le 03 avril 2024
article payant Article réservé aux abonnés Je m'abonne
Lire plus tard
Partage tweeter facebook linkedin
Le biochar, une solution pour retenir l’eau dans les sols et améliorer la pousse de la vigne
Biochar ou bio-charcoal, un charbon d'origine végétale obtenu par pyrolyse de biomasse des matières organique d'origine diverse. - crédit photo : DR
P

réserver l’eau, c’est l’objectif du domaine Lafage à Perpignan (66). « Nous subissons des sécheresses de plus en plus marquées, annonce Antoine Lespes, chargé de projet R & D. En 2023, nous avons enregistré un déficit hydrique record : il n’a plu que 240 mm contre 570 mm en moyenne. Nous devons trouver des solutions. Nous avons donc décidé d’expérimenter le biochar. » Car le biochar, un charbon d’origine végétale obtenu par pyrolyse, serait capable de retenir l’eau – deux litres d’eau pour un litre de biochar – dans les sols et ce pendant une éternité ou presque, sa durée de vie étant estimée entre 500 et 600 ans. « Nos premiers résultats sont encourageants », affirme Antoine Lespes.

Test sur un plantier en 2023

En 2023, il a mené un essai sur un plantier d’un hectare de variétés Bouquet. La plantation a eu lieu fin janvier. La parcelle a été amendée le lendemain. « Nous avons apporté du compost végétal ou un mélange de biochar et de compost. Je ne voulais pas employer du biochar seul car, d’après mes informations, l’effet risque d’être à l’inverse de celui que l’on recherche. » En tout, Antoine Lespes a testé quatre apports face à un témoin non traité : 2 t de biochar + 6 t de compost végétal, 4 t de biochar + 12 t de compost végétal, 6 t de compost végétal et 12 t de compost.

Chaque modalité représente 0,2 ha et est partagée en deux parties, l’une irriguée, l’autre non. « Nous avons choisi un biochar qualitatif comportant 80 % de carbone », détaille Antoine Lespes, qui enfouit ses amendements avec un cadre vigneron classique.

"Les plantes se sont mises à pousser"

Après le débourrement, Antoine Lespes a mesuré tous les mois la pousse de ses plantes. « Il n’a pas plu une bonne partie de l’été en 2023, rappelle-t-il. Fin juillet, le vignoble a fini par recevoir 35 mm de pluie. Après celle-ci, la modalité la plus chargée en biochar s’est démarquée des autres. » Là, les plantes se sont mises à pousser activement si bien que, fin août, leurs rameaux ont atteint 55 cm, soit la même longueur que ceux de la parcelle témoin irriguée qui avait reçu 180 m3 d’eau. L’effet a été encore plus significatif sur les vignes irriguées qui ont bénéficié du plus gros apport de biochar, avec des rameaux 45 % plus long fin août que ceux de vignes témoins également irriguées, mais n’ayant bénéficié d’aucun amendement.

En 2022 déjà, le domaine Lafage avait testé un apport de biochar sur 2,4 ha de grenaches âgés de 20 ans. Cette année-là, le charbon végétal, acheté en Espagne, contenait moins de carbone (60 %). Deux modalités ont été expérimentées face à un témoin non traité : 2 t de biochar + 6 t de compost et 6 t de compost. Ces apports ont eu lieu tardivement en mai à cause d’épisodes pluvieux. Le mélange biochar et compost a été épandu dans une tranchée creusée avec un vieux cadre vigneron à 40 cm des rangs de vigne et à 20 cm de profondeur pour être au plus proche des racines des plantes.

Des teneurs en azote assimilable plus élevées

« Nous avons procédé à diverses mesures, expose Antoine Lespes. Les vignes de la modalité biochar n’étaient pas carencées en azote contrairement aux vignes témoin et à celles qui n’avaient reçu que du compost. Nous avons retrouvé cette différence au moment des vinifications, les moûts des raisins cultivés avec du biochar renfermant 160 mg/l d’azote assimilable, soit 15 % de plus que les deux autres modalités. Des analyses de sol se sont également montrées favorables au biochar. Nous avons prélevé des échantillons de terre en août. Nous les avons pesés puis passés à l’étuve durant 24 heures après quoi nous les avons repesés. Résultat, la modalité biochar et compost a retenu deux fois plus d’eau que le sol témoin et que le sol ayant bénéficié seulement de compost. »

La chambre d’agriculture de la Gironde a également testé le biochar en 2023 dans le cadre d’un essai pour le compte de la société Terra Fertilis, un fournisseur. « Son biochar provient à 100 % du bois et sa teneur en carbone de 80 % est élevée », expose Mathilde Jardel, chargée d’études en gestion durable des sols à la chambre d’agriculture.

L’essai a été conduit au domaine expérimental de Couhins (33) dans une parcelle de merlot plantée sur un sol sableux, ayant donc une très faible réserve en eau, qui plus est, cultivée avec des couverts végétaux dans chaque interrang. Le biochar a été enfoui à la main à 20 cm de profondeur sous le rang de vigne à une dose de 400 kg/ha le 24 mai 2023. « Nous avons fait trois répétitions de 10 ceps à chaque fois, précise Mathilde Jardel. Nous avons ensuite réalisé plusieurs mesures pour suivre la tensiométrie [l’humidité, ndlr] des sols, le comportement hydrique de la vigne, le rendement et la vigueur, face à un témoin non traité. »

D'autres essais encourageants à Bordeaux

D’après les mesures tensiométriques, les sols ayant reçu du biochar affichent une meilleure capacité de rétention de l’eau. Le suivi des baies a montré des résultats similaires. Les raisins de la parcelle avec du biochar n’ont pas présenté de stress hydrique tandis que le témoin a subi un léger stress. Pour l’instant, la chercheuse ne souhaite pas diffuser davantage de résultats, soulignant qu’ils sont entachés du fait que le biochar a été apporté tard, en mai dernier. « C’est une piste encourageante, estime-t-elle, ajoutant que l’essai va durer jusqu’en 2026. À suivre donc.

Dans le Val de Loire, les essais conduits par l’Institut français de la vigne et du vin (IFV) au domaine de Montreuil-Bellay (49) sont moins probants. Il faut dire qu’ils sont menés dans des conditions extrêmes. « Nous testons un biochar produit localement par La Florentaise dans une vigne plantée en 2019 et entièrement enherbée, explique David Lafond, ingénieur système de culture et agroécologie à l’IFV. Nous avons apporté ce biochar l’année de la plantation, à la main, sous le cavaillon, à raison de 2,5 t/ha. À l’heure actuelle, nous n’observons aucune différence entre les modalités avec ou sans biochar. Dans les deux cas, la vigne concurrencée par l’herbe se développe très faiblement. »

Pour Jean-Christophe Payan, ingénieur à l’IFV de Nîmes Rodilhan (30), qui a testé un biochar « maison » à base de marc et de pulpe de raisin, entre 2017 et 2019, ce produit présente un intérêt à plusieurs titres. « Nos essais ont démontré qu’il avait un effet bénéfique sur la contrainte hydrique dans les sols, observe-t-il. Les raisins vendangés sur les parcelles qui en avaient bénéficié étaient moins déshydratés, plus ronds et plus turgescents. » Pour confirmer ses dires, il plaide en faveur de nouveaux essais.

Un coût élevé

Le prix des biochars du commerce varie de 800 à 1 000 € la tonne. Les qualités diffèrent également suivant la teneur en carbone. Plus la teneur est élevée, plus le biochar est qualitatif. « Nous voulons produire notre propre biochar, annonce Antoine Lespes, chargé de projet R & D au domaine Lafage, à Perpignan. Nous avons pris contact avec une entreprise locale spécialisée dans la valorisation de déchets verts ainsi qu’avec la start-up Sinecarbon. Notre objectif est de fabriquer un biochar à un prix accessible et répondant aux contraintes agronomiques du Roussillon. »

Vous n'êtes pas encore abonné ?

Accédez à l’intégralité des articles Vitisphere - La Vigne et suivez les actualités réglementaires et commerciales.
Profitez dès maintenant de notre offre : le premier mois pour seulement 1 € !

Je m'abonne pour 1€
Partage Twitter facebook linkedin
Soyez le premier à commenter
Le dépôt de commentaire est réservé aux titulaires d'un compte.
Rejoignez notre communauté en créant votre compte.
Vous avez un compte ? Connectez vous

Pas encore de commentaire à cet article.
vitijob.com, emploi vigne et vin
Gironde - CDD Château de La Rivière
Vaucluse - CDI PUISSANCE CAP
La lettre de la Filière
Chaque vendredi, recevez gratuitement l'essentiel de l'actualité de la planète vin.
Inscrivez-vous
Votre email professionnel est utilisé par Vitisphere et les sociétés de son groupe NGPA pour vous adresser ses newsletters et les communications de ses partenaires commerciaux. Vous pouvez vous opposer à cette communication pour nos partenaires en cliquant ici . Consultez notre politique de confidentialité pour en savoir plus sur la gestion de vos données et vos droits. Notre service client est à votre disposition par mail serviceclients@ngpa.fr.
Viticulture
© Vitisphere 2025 -- Tout droit réservé