’interrogation se répand dans la filière : le négoce n’ayant pas de visibilité sur nombre de marchés du vin, quelle peut être la vision du vignoble pour sortir de crise ? « Il faut recalibrer l’offre et la demande : dès qu’il y a des excédents, les marchés s’effondrent et les producteurs sont la variable d’ajustement, c’est vrai pour tous les marchés au monde » analyse Gérard Bancillon, le président de la Confédération des vins IGP (Vin IGP). Estimant que « le problème n’est pas la surproduction de vin, mais la sous-consommation qui est accélérée par l’inflation », le viticulteur de Garrigues Sainte Eulalie (Gard) en appelle à des mesures d’urgence alors que la désespérance s’étend dans le vignoble.
Face à un « problème sur le vin rouge, qui touche de grandes AOC (Bordeaux, Languedoc, Rhône…) et n’épargne pas les IGP, même si c’est moins flagrant » Gérard Bancillon préférait prévenir plutôt que guérir : dans le vignoble AOC et IGP « on n’échappera pas à l’arrachage. De bons stratèges doivent devancer les évolutions et chutes de consommation ». Si les mesures d’arrachage temporaire permettraient de « mettre en dormance les parcelles les moins rentables et de donner du temps pour les plus jeunes vignerons. […] Il faut être plus ambitieux pour les plus âgés » estime-t-il.
Si l’arrachage primé n’existe plus dans le droit européen, Gérard Bancillon estime que « ce serait bien d’imaginer quelque chose comme l’arrachage sanitaire à Bordeaux » de 9 500 hectares à 6 000 €/ha, cofinancé par l’interprofession et l’État. « Mais ce dispositif n’est pas reproductible partout, comme toutes les interprofessions ne sont pas aussi riches » nuance le président des vins IGP, reconnaissant que « le tout, c’est de trouver le budget pour réussir un arrachage efficace ».
Mais pour y parvenir, « il ne faut rien s’interdire » pour accompagner les départs massifs à la retraite qui s’annoncent. Si par le passé le vigneron travaillait endetté toute sa vie, il avait l’objectif de récupérer sa mise et une plus-value en vendant son foncier pour partir à la retraite. Désormais, « ça fond comme neige au soleil » résume Gérard Bancillon, qui rapporte la fatigue ressentie lors de la manifestation du 25 novembre dernier à Narbonne (Aude). « Certains sont à bout de souffle. Il y a une forme de sentiment de déclassement, avec la perte de reconnaissance de la société » regrette le viticulteur.


Si le plan stratégique de filière doit donner les tendances, Gérard Bancillon appelle à l’ambition : « je crois beaucoup aux outils de régulation tel que le BIC d'Inter'Oc et le VIP2C d'Intervins Sud-Est développés pour les IGP ». Le modèle absolu en termes de réserve interprofessionnelle restant la gestion de la production en Champagne, liée aux marchés avec des approvisionnements selon les besoins. Une quête de visibilité par la vision.