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De l’IA pour mieux tailler la vigne
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Assistance augmentée
De l’IA pour mieux tailler la vigne

Une start-up suisse développe des logiciels pour des lunettes de réalité augmentée permettant aux tailleurs de voir instantanément les rameaux à couper pour obtenir un guyot simple respectant les flux de sèves. Prometteur, l’outil en est actuellement au stade de l’IA décortiquant la structure d’un cep.
Par Alexandre Abellan Le 22 octobre 2023
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De l’IA pour mieux tailler la vigne
Cette image « illustre ce que voit notre système, en interne, et non ce que nous allons montrer a l’utilisateur » explique Jérôme Corre, notant que « le système est capable d’identifier les différentes parties de la vigne (tronc, courson, baguette, sarment…) et la position des nœuds sur ces rameaux ; le tout sans être perturbé par les pieds en arrière-plan ». - crédit photo : 3D2cut
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’il y a un endroit où l’on ne peut pas dire que la taille ne compte pas, c’est bien le vignoble. La preuve avec la start-up suisse 3D2cut, qui développe discrètement* une Intelligence Artificielle (IA) pour aider les ouvriers viticoles à tailler par la réalité augmentée, et qui reçoit déjà des demandes d’essai et d’achat pour cet outil ViNet. « Il y a déjà beaucoup d’intérêt, mais l’outil n’est pas disponible à la vente. Nous en sommes au stade de premier démonstrateur de software (un calculateur dans un boîtier). Nous voulons arriver au hardware avec des lunettes (en développement) » explique Philibert Frick, fondateur et président du conseil d’administration de 3D2cut. Créateur de start-ups dans l’industrie et la finance devenu vigneron dans le canton de Vaud, Philibert Frick connaît aussi bien les clés financières du succès entrepreneurial que le temps long des saisons viticoles. « L’objectif est de ne pas sortir quelque chose que les gens n’achètent pas » résume Philibert Frick.

Avançant prudemment, une étape après l’autre, la start-up lancée en 2018 a déposé sa première demande de brevet en 2019, recrutant l'année suivante son premier employé avec Jérôme Corre, docteur en robotique et master en machine learning (IA). En partenariat avec l’Institut d'Intelligence Artificielle Perceptive (IDIAP) qui a travaillé sur la reconnaissance du squelette humain, Jérôme Corre a pu aboutir à un outil de modélisation de la structure d’un cep vigne avec l’appui de trois développeurs recrutés au fil des ans. Désormais, le logiciel ViNet peut analyser l’image d’une vigne pour en déterminer ses composantes structurelles : tronc, courson, baguette, entre-cœur, bourgeon…

Défi de taille

« Ce que l’on veut avoir comme image, c’est montrer au travers des lunettes de réalité augmentée quel rameau on garde, quelle branche on enlève et où est-ce que l’on coupe » reprend le docteur Jérôme Corre, expliquant que « pour y arriver, on a deux moitiés dans l’intelligence artificielle : une partie pour la vision, qui regarde pour l’instant des images de vignes (mais dans le futur ce sera un flux vidéo) pour voir où sont les rameaux, quel âge ont les bois, où sont les nœuds, où sont les bourgeons et dans quelle direction ils vont se développer, etc. Une fois que ce système de vision a reconstruit le squelette de la vigne, on a une deuxième moitié, plus simple, basée sur des règles : un arbre de décision, en fonction du cépage et du type de conduite. On s’est concentré sur le guyot simple, quand ça marchera bien sur le terrain, on fera le guyot double, le cordon… »

« C’est très prometteur » rapporte Massimo Giudici, maître tailleur pour le consultant italien Simonit & Sirch, qui est partenaire depuis deux ans de 3D2cut. Ayant testé l’outil ViNet sur le terrain lors de l’hiver 2023, Massimo Giudici note que le logiciel est robuste : « c’est assez fort de réussir à reconnaître les parties de la plante en quelques millisecondes ». Et ce « sans drap derrière le cep, le logiciel arrive à reconnaître en peu de temps la structure du pied » souligne le maître-tailleur, qui reste prudent face aux questions en suspens : l’outil « va-t-il arriver à répéter ces résultats sur tous les pieds, en fonction de la lumière et des conditions météo, comme la pluie ? Je n’ai pas encore testé sa capacité de dire quel rameau choisir et où tailler. La question de la reconnaissance de l’orientation des bourgeons vers le haut ou vers le bas sera très importante pour réussir la taille. »

Œil humain contre cerveau artificiel

Confiant dans l’avenir, le docteur Jérôme Corre estime que le plus dur a été fait avec le développement de l’analyse des images de vigne par ViNet. Paradoxalement, « le plus compliqué est de détecter un rameau pour l’IA. L’humain le fait très bien, mais a plus d’hésitation sur les décisions. Pour IA ce sont des règles simples pour proposer des coupes de formation du courson et de la baguette. Cet arbre de décision n’est pas le plus difficile techniquement. » Actuellement, seul un outil simplifié pour la taille en guyot simple a été développé, afin de démontrer ce que peut faire le système de vision instantanément. À terme, l’objectif est de proposer des lunettes permettant au tailleur d’avoir une indication de coupe : libre à lui de suivre ou pas l’indication.

Devant encore être atteint, l’objectif de la start-up suisse est de « proposer un outil pour démocratiser la méthodologie de la taille respectueuse du flux de sève » résume Philibert Frick, notant que l’« on ne peut pas mettre un Massimo derrière chaque tailleur ». Idéalement, « cet outil ne sera pas là pour prendre la place d’un formateur en taille, mais pour aider les équipes en place où la pérennisation des postes et savoirs n’est pas facile. Ce sera un outil supplémentaire pour accompagner les salariés sur la taille » explique Massimo Giudici, qui rappelle un objectif ambitieux : ne sortir qu’un outil ViNet permettant de « proposer la meilleure taille des meilleurs tailleurs du meilleur château du monde. C’est ce que l’on veut atteindre. » Sachant que l’« on ne peut pas faire de miracle sur des pieds mal taillés depuis des années » prévient Jérôme Corre.

Aller sur le marché

Se trouvant actuellement dans un stade de développement de son outil, la start-up 3D2cut sera présente au salon Sitevi du mardi 28 au jeudi 31 novembre pour nouer des partenariats industriels, notamment sur le hardware. Et pourquoi pas aller au-delà des lunettes d'assistance à la taille pour imaginer un robot tailleur ou une installation sur drone. Voire travailler sur d’autres végétaux nécessitant d’être taillés : arboriculture, cacao, café… Mais pour être réussie, une innovation doit aller jusqu’à proposer « quelque chose qui marche, pas récolter un prix et disparaître, mais aller sur le marché » conclut Philibert Frick. IA plus qu’à…

 

* : Du moins pour ceux ne suivant pas la littérature scientifique de l’IA et de la viticulture, un article étant paru en avril 2023 : Towards smart pruning: ViNet, a deep-learning approach for grapevine structure estimation.

 

 

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Tous les commentaires (4)
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VignerondeRions Le 24 octobre 2023 à 14:24:35
J'attends impatient le couplage avec un sécateur robotisé. Parce que c'est tellement galère pour trouver un tailleur valable qu'on espère un robot efficace.
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Bender-tordeur Le 22 octobre 2023 à 22:23:41
Je suis tailleur de vigne et on n'en veut! La taille de la vigne est un métier comme un autre et a force de simplifier tout les travaux, les grand patrons pourrons prendre n'importe qui et le payé une misère alors que pour le moment le savoir est une richesse! Et si on va par la si un jour là société s'écroule on repart de zéro a force de tout informatisé.. on as pas intérêt à perdre internet le jour où tout les savoir, eux, seront perdu !
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BioRev Le 22 octobre 2023 à 08:08:59
Tout est question de narratif. On vend les gadgets energivores en jouant sur l'obsession de performance, qui n'est que le cache sexe de l'obsession de profit. Exemple du tire alléchant de l'article "l'IA pour mieux tailler la vigne". Il faudrait plutôt dire la vérité, c'est pour remplacer les bons tailleurs par les médiocres et ne plus avoir à former le personnel qualité. C'est cette société que nos agriculteurs veulent transmettre à leurs enfants? qu'ils deviennent des gestionnaires besogneux et stressés, les yeux rivés sur leurs indicateurs numériques, complètements hors sol. Le tournant c'est maintenant. Il ne s'agit pas tourner le dos au "progrès" cad aux bonnes technologies mais de bien comprendre les enjeux cad bien vivre de son métier demain et d'avoir le courtage de s'y engager aujourd'hui avec une feuille de route claire.
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BioRev Le 22 octobre 2023 à 07:58:46
Alors que pour enclencher les transitions énergétique et écologique, il faut sortir de la spirale de la sur-production et consommation de produits manufacturés qui ne sont la plupart du temps que des gadgets énergivores, l'agriculture prend le tournant inverse du "tout électrique". Les robots, l'IA et les e-tracteurs. En se croyant vertueuse, elle se laisse manipuler par le "greenwashing" industriel. Alors qu'il faut au contraire que l'agriculture innove dans l'IE (Intelligence Ecologique), elle ne comprend toujours pas l'enjeu énorme pour les décennies à venir, et va à nouveau s'endetter pour se "moderniser" et ensuite demander des aides publiques pour assurer la trésorerie. L'alimentaire, comme la santé sont les 2 secteurs les plus subventionnés parce que vitaux. Mais il n'y a pas de gloire à en tirer. L'IE n'est pas contre l'électricité mais dans la mesure de l'auto-suffisance. Avec des EnR "à la ferme" éolien et solaire (PV et thermique) sur toiture et géothermie. L'IE est pour les coopératives énergétiques, avec méthaniseur et distillateur, pour produire des bio-carburants. L'avenir n'est pas aux grosses industries automatisées et délocalisées mais aux industries locales à taille humaine qui emploie du personnel humain qualifié. Les ingénieurs devraient plutôt se pencher sur les réductions d'échelle des procédés industriels que l'inverse...question de génération j'espère!
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