algré une économie qui parvient, tant bien que mal, à tenir le cap, le marché américain des vins n’est pas au beau fixe. Selon les données que vient de publier l’IWSR, les volumes de vins tranquilles commercialisés en 2022 ont baissé de 3 %, tendance qui devrait se poursuivre sur la période 2022-2027 si l’on en croit ses prévisions. Les incertitudes quant à l’évolution future de l’économie, la crise du pouvoir d’achat et une inflation qui reste soutenue – notamment dans le secteur CHR – expliquent ce recul. Mais il faut aussi se rendre à l’évidence : la modération continue d’avoir meilleur goût pour les Américains.
Ainsi, entre 2018 et 2022, les volumes de produits non alcoolisés et faiblement alcoolisés, toutes catégories confondues, ont plus que doublé, et l’IWSR prévoit une hausse de 17% des produits sans alcool entre 2022 et 2027. « Les préférences des consommateurs évoluent et cela va continuer à impacter la croissance », souligne Martin Lodewijks, directeur conseils auprès de l’IWSR Amériques.
Si les évolutions démographiques et nouvelles préférences des consommateurs influent indéniablement sur le marché à long terme, les vents contraires actuels semblent plutôt découler des difficultés financières des consommateurs. Certains analystes pointent l’épuisement des économies constituées pendant la pandémie conjugué à l’augmentation des taux d’intérêt, un facteur déterminant dans une société qui a beaucoup recours au crédit. Cet impact est validé par une étude que vient de publier le Wine Market Council : « Depuis quelques mois, on constate que les consommateurs troquent les vins positionnés à 20$ et plus contre des produits commercialisés entre 10$ et 19,99$ », note Jon Berg de NielsenIQ qui a participé à la réalisation de l’enquête. Menée auprès d’un échantillon important de 100 000 ménages américains, celle-ci a suivi les achats de vins et de boissons alcoolisées chez les détaillants entre 2021 et 2023. Elle montre aussi que les consommateurs qui achetaient des vins dans la tranche de prix des 10$ à 19,99$ passent désormais à celle des moins de 10$.
En parallèle, les consommateurs se montrent de plus en plus volages, évoluant des vins tranquilles vers les bières artisanales et RTD à base de spiritueux, par exemple. « Les consommateurs passent d’une catégorie de boissons, alcoolisées ou non, à une autre plus vite que jamais », a confirmé Curtis Mann MW, responsable des ventes d’alcool chez Safeway/Albertson’s, lors de la présentation des résultats de l’enquête. « Il est donc important que les marques de vin innovent, qu’elles essaient de faire des choses différentes pour se démarquer ». Et qu’elles soient, selon Jon Berg, « suffisamment agiles pour changer de cap ». Dans tous les cas, avec des stocks qui atteignent un niveau élevé par rapport au rythme des ventes, les analystes s’accordent à dire que ce n’est pas le moment d’augmenter ses prix.