lors que le mildiou ravage le vignoble bordelais, on a trouvé le vigneron le plus serein de la saison. Du moins sur sa quinzaine d’hectares de cépages résistants : « il n’y a aucun dégât de mildiou sur feuilles et sur grappes. Avec deux traitements encadrant la floraison, les variétés résistantes se comportent très bien malgré la pression » rapporte Jérémy Ducourt (Vignobles Ducourt, à Ladaux). Sur les parcelles où se déploient quatre variétés résistantes au mildiou et à l’oïdium (cabernet jura, muscaris, souvignier gris et sauvignac), le vignoble familial semble miraculeusement épargné par les coups du mildiou. Ayant gardé deux rangs de cabernet sauvignon seulement traités deux fois, en guise de témoin pour les essais sur le sauvignac, le président du Vinopôle Bordeaux-Aquitaine constate la force du mildiou 2023 : « il ne reste que les branches. Plus une grappe, plus une feuille. » Une vision hivernale en plein été.
« C’est un truc de fou : on vit une année impressionnante, jamais vue dans la fulgurance, la quantité des dégâts et la généralisation à une échelle inédite. La pluviométrie explique la virulence, avec l’hygrométrie restant élevée et le peu de vent… Tout allait dans le même sens, celui du mildiou, pas dans celui du vigneron. Le fait qu’il y ait une importante quantité de vignes en friche dans l’Entre-deux-Mers peut expliquer l’importante sporulation » rapporte Jérémy Ducourt, qui attend la fin de la véraison pour jauger les pertes de récolte sur ces cépages classiques. Une prudence pour éviter de se faire peur, ses parcelles de merlot semblant particulièrement touchées. « C’est normal, on tire sur la corde quand on veut réduire les phytos, diminuer les doses, se passer de CMR (phytos Cancérigènes, Mutagènes et Reprotoxiques), enlever des produits… Plus ça va, plus on se rapproche d’un itinéraire bio, que l’on sait sensible aux coups de pression du mildiou. D’où les cépages résistants » expose Jérémy Ducourt
Constatant quelques dégâts localisés de black rot en début de saison sur ses vignes résistantes (« sans commune mesure ce que l’on voit actuellement sur merlot en conventionnel »), Jérémy Ducourt se prend à imaginer une paire de traitements phytos sur des années aussi difficiles que 2023. Un chiffre bien éloigné des traitements pratiqués en conventionnel et en bio pour préserver la récolte face aux attaques de mildiou cette année. De nombreux passages impliquant des coûts conséquents pour un résultat loin d’être optimal sur le rendement souligne le vigneron, qui va pouvoir partager ses expériences avec le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau, qui visite son domaine ce mercredi 18 juillet, alors que les demandes d'aides publiques vont crescendo.