yant gardé en mémoire les millésimes 2018 et 2020 marqués par la virulence du mildiou, la commission technique du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB) peaufine depuis 2022 un plan de recherche contre Plasmopara viticola qui se concrétise cet été alors que ce champignon touche actuellement 90 % du vignoble girondin et contamine une grappe sur deux d’après la Chambre d’Agriculture. Particulièrement virulent ce millésime, le mildiou attaque les feuilles et raisins avec une force rarement vue, qui nécessite d’acquérir de nouvelles connaissances explique Marie-Catherine Dufour, la directrice du service technique du CIVB.
Doté de 500 000 €, ce plan mildiou s’appuie sur un appel à manifestation d’intérêt devant aboutir à la sélection de projets de recherche en septembre prochain. Réunissant déjà 80 experts (viticulteurs, consultants, chercheurs…), ce plan compte réparer des lacunes qui apparaissent béantes cette campagne viticole. Des trous dans la raquette apparaissant entre les sujets d’étude de la recherche et les attentes vigneronnes note Marie-Catherine Dufour, soulignant la méconnaissance de la biologie du mildiou : « ce sont des savoirs qui datent d’un siècle ». Si la première phase du cycle du mildiou est connue, celle hivernale l’est nettement moins note l’experte.


Si en 2023 l’hygrométrie est un élément clé de la virulence du mildiou, « il existe des phénomènes explosifs que l’on a du mal à expliquer. C’est multifactoriel » pointe Marie-Catherine Dufour, qui note ce millésime le raccourcissement du cycle du mildiou, avec des éclosions des œufs passées de 10 à 4 jours : dans ces conditions, « tout le raisonnement des traitements au cuivre ne tient plus ». La directrice du service technique du CIVB note que dans le vignoble « ceux qui s’en sortent le mieux ont eu temps de relever et d’effeuiller pour optimiser les premiers traitements. Ce qui pose la problématique du personnel, alors que la vigne a poussé comme une folle. L’évolution de la viticulture va passer par plus de monde dans les vignes. C’est un problème à résoudre. »
En plus de la biologie du mildiou, l’experte liste six autres sujets de R&D pour ce plan, avec l'étude « du rôle du microbiote (et des équilibres biologiques), d'une nouvelle approche épidémiologique (les modèles sont anciens, ne prenant pas en compte l’hygrométrie comme le Bulletin de Santé du Végétal, BSV), du cuivre (avec des modélisations de l’utilisation et du lessivage), des modes de conduite et la prophylaxie (comme la question de retirer les feuilles l’hiver), des biocontrôles (pour compléter à défaut de remplacer le cuivre), de la qualité de pulvérisation (il y a encore des marges de progrès, chaque année on sait qu’il y a des accidents protection à cause d’échecs de réglage de pulvé), des outils d’aide à la décision (OAD) ».
Voulant également mettre en place un réseau participatif d’expérimentateurs, Marie-Catherine Dufour précise que la plateforme du CIVB pour ses adhérents, Bordeaux Connect, propose déjà des fiches techniques dédiées au mildiou, ainsi que des bulletins de modélisation et des stations virtuelles.