éconsommation, bilan carbone, irrigation, cépages résistants, éco-conception des chais, … Nombre de sujets ont été abordés à Perpignan dans une région où le manque d’eau se fait cruellement sentir. Si les échanges n’avaient pas pour vocation d’apporter de solutions concrètes mais bien d’ouvrir les débats, le pari est tenu.
« Face à une sensibilité environnementale de plus en plus présente, les consommateurs rejettent certains procédés ou additifs chimiques » explique Stanislas Milcent, directeur Qualité, Sécurité des Aliments, Recherche et Environnement chez Moët-Hennessy. « La France se positionne comme le leader incontesté du marché avec 55% des producteurs français recensés sur l’application Raisin dédiée aux « vins naturels », précise-t-il, regrettant par ailleurs l’absence de définition précise « pour s’assurer que tout le monde parle de la même chose ».
« Non loyaux et marchands » pour certains, « imposteurs », « sauvages » ou « inexistants » pour d’autres, les vins dits « nature » ont pourtant alimenté les débats tout au long de la journée face à leur émergence. Courant de pensée, rejet de certaines pratiques, mouvement générationnel ? Pour Olivier Bompas, journaliste au Point, l’émergence des vins natures pourrait s’expliquer ainsi : « Mettez-vous à la place d'un jeune adulte qui n'a pas les outils, ni de recul. Tous les matins à la radio, on leur dit que c'est la fin du monde. Résultat : ils ne veulent plus faire de gamins, ils ne savent plus s'ils aiment les filles ou les garçons, ils sont tous vegan, ils boivent du vin nature... », propos volontairement caricaturaux d’après son auteur et qui n’ont pas manqué de faire réagir et de diviser l’auditoire.


Au sujet de ces vins, le président de l’Union desŒnologues de France, Didier Fages, admet avoir perdu une bataille et déplore une communication vers le grand public opposant toujours les catégories aux autres. « Nous avons une éthique et des valeurs et nous devons produire des vins loyaux et marchands. Nous assistons à une recrudescence d’anciennes maladies telles que la maladie de la tourne ou de la graisse. Les Å“nologues sont là pour contrôler ce processus fermentaire : on ne peut pas ignorer le vin, la chimie et la microbiologie » déclare-t-il.
« Si 53% de la population française – et cela va crescendo avec l’âge – est prête à payer son vin plus cher s’il affiche un label environnemental, 32% n’en connaissent pas le sens » explique Stanislas Milcent. Pour ce dernier, « même si les labels, tels que Viticulture Durable en Champagne, ne trouvent pas toujours notoriété auprès du grand public, c’est un moyen d’avoir un langage commun avec nos partenaires vignerons et de tous avancer tous dans la même direction via des certifications et des audits indépendants » explique-t-il en rappelant la complexité d’une transition durable face aux accusations de greenwashing portées au label HVE qui ont fait l’objet d’une saisine au Conseil d’Etat en janvier 2023.


A la question du greenwashing, Iris Borrut, directrice des Vignerons Engagés, n’a pas manqué de défendre le côté sincère de la démarche, « permettant d’améliorer les pratiques environnementales et sociales » pour le seul label intégrant la commercialisation dans son cahier des charges. « A titre d’exemple, nous sommes tous formés à la fresque du climat pour remettre la connaissance au cÅ“ur de l’action » ajoute-elle.
« Il faut trouver le moyen d’avancer, de se coordonner pour agir de manière collective » explique Patrice Montagné, responsable des services qualité et développement durable de l’ICV, rappelant au passage que l’agriculture se positionne comme le deuxième émetteur de gaz à effet de serre après les transports. « Ce qui impacte le plus le bilan carbone, c’est le conditionnement, et dans cette même opération, la bouteille en représente la moitié » alimentant ainsi des pistes de réflexion.
A tous ces débats, souvent clivants mais plus que jamais d’actualité, David Cobbold, journaliste et expert en vin, a appelé à éviter tout manichéisme en guise de conclusion : « Le monde du vin n’échappe pas à la complexité : il n’y a pas les bons d’un côté et les mauvais de l’autre ».