l n’y a plus de saison : la chaleur n’attend plus l’été pour s’abattre sur les vignobles, maintenant vive la peur d’un gel printanier… La faiblesse des réserves en eau pèse également sur le moral des vignobles, faisant craindre que la sécheresse de 2022 n’ait pas de fin et se poursuive sur 2023. Que faire, allumer un cierge ? Certains y croient, et il faut reconnaître que ça ne coûte rien. Pour d’autres il faut miser sur l’adaptation du vignoble à la nouvelle donne climatique en jouant sur tous les leviers pertinents : changer la conduite du vignoble (densité de plantation, taille/charge, écimage, effeuillage, vendange en vert…), tester de nouveaux cépages (et porte-greffes) et, forcément, réfléchir à l’irrigation (en se faisant une raison : le vignoble ne pourra pas compter sur les nappes phréatiques et doit se pencher sur les projets de réserves collinaires et réutilisation des eaux usées).
Avec la récente ouverture aux expérimentations des vins d’appellation, l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO) doit permettre de mettre en pratique ces nouvelles approches. En Bourgogne, l’appellation Meursault s’en saisit, témoignant que pour la survie des vignobles il n’y a plus de tabou, mais des pistes à explorer. Car sans catastrophisme, il n’est plus question de coups de chaud, mais de premiers signes d’aridité : la faiblesse des précipitations est alarmante dans les vignes de l’Aude et des Pyrénées-Orientales. Canari dans la mine de charbon, la vigne est un indicateur frappant des évolutions climatiques : l’évolution de ses dates phénologiques en témoigne. Souvent pris en exemple médiatique pour illustrer les effets du changements (des gelées/sécheresse/orages de grêle récurrents aux vendanges qui ne cessent d’avancer dans le temps), le vignoble est aussi un exemple de stratégie d’adaptation.
Ayant rendu en 2021 ses conclusions en la matière, la filière vin doit désormais être soutenue : avec des investissements pour la recherche et l’innovation au service de la résilience de demain (climatiquement, mais aussi agroécologiquement), avec des fonds pour acquérir des matériels la prévention des aléas climatiques (individuellement et collectivement), avec des évolutions réglementaires (comme la d’irrigation après le 15 août…). S’il n’y a plus de saison, il y a faut savoir raisin garder.