’il ne devait y avoir qu’une bonne résolution en 2023 pour la filière vin, ce serait la résolution des crises conjoncturelles et structurelles qui mettent en péril la pérennité de nombre de ses entreprises. Les mesures d’urgence nécessaires seront au cœur de la rencontre entre les représentants de la production et du négoce avec le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, le jeudi 26 janvier prochain, afin de résoudre « les problématiques de marché du vin et de surproduction française » résume Joël Boueilh, le président des Vignerons Coopérateurs, qui mesure toutes les incertitudes de ce millésime 2023. Face à l’inflation, la consommation de vin devrait battre de l’aile : « il ne faut pas se le cacher, c’est l’année de tous les dangers. On est sur un fil » pointe le viticulteur de Saint-Mont (Gers).
Si la filière porte collectivement les demandes de mesures d’urgence (arrachage primé, distillation de crise, aide au stockage…), il est essentiel de calibrer les demandes pour éviter des effets de bords indique Joël Boueilh. Afin d’éviter qu’« une bonne idée pour un bassin ait des conséquences dramatiques sur son voisin ». Par exemple, la demande d’arrachage définitif de vignes excédentaires à Bordeaux pourrait créer une hémorragie à Bergerac. Au-delà des dispositifs d’urgence, « nous avons l’impérieuse nécessité de travailler à une feuille de route pour les années à venir de la viticulture française » annonce Joël Boueilh, qui plaide pour « emmener la viticulture vers une autre voie que celle où l’on se dirige : un mur vers lequel on se précipite parfois en klaxonnant. On doit être sérieux et précautionneux : il y a une énorme attente des vignerons sur le terrain, on ne peut pas décevoir la base, on parle en son nom. »
La filière n’a pas besoin d’états généraux pour un énième rapport, mais d’une remise en cause globale pour aboutir à un plan d’action innovant estime le président des caves coopératives : « il y a déjà eu des plans de filière par le passé, qui font de beaux rapports sur l’étagère, mais quelle est leur mise en œuvre ? » Pour Joël Boueilh, « la filière française souffre de trop s’autoprotéger. Ne rien changer est plus dangereux que d’imaginer des choses qui peuvent sembler incongrues à date, mais qui pourraient créer de nouveaux développements à l’avenir. »
Appelant à débrider les idées et l’imagination, le viticulteur du Sud-Ouest appelle à balayer large : structuration de l’offre, innovation dans les profils de produits, nouvelles aides à la commercialisation… « La filière vin mesure-t-elle bien le risque qu’il y a à ne rien faire ? Tous les jours nous subissons la déconsommation et l’inadaptation au marché. Ce sont des vins qui restent en cuve, du rouge par endroit, du rosé ailleurs » conclut-il.
Autre dossier chaud ce début d’année, le règlement des mesures de soutien aux entreprises de l’aval consécutives au gel 2021. Le dépôt des dossiers de demandes d’aides est ouvert jusqu’au 31 janvier 2023. Avec un point de vigilance pour Joël Boueilh : « qu’aucune cave coopérative pouvant déposer un dossier ne passe à côté. Après, les dés seront jetés. » Pour être éligible, un dossier doit présenter des pertes de 20 % par rapport à une récolte de référence et de 30 % d’Excédent Brut d’Exploitation (EBE) à la clôture de l’exercice.