Jérôme Lemasson : C’est un sujet de préoccupation quasiment permanent depuis la crise covid, qui a été renforcé par la guerre en Ukraine. Les différents critères de conduite d’une entreprise sont modifiés et à modifier. Ces paramètres sont très fluctuants d’un mois à l’autre. Nous n’avons pas de vision sur les prix et la capacité à être approvisionner.
Nous vivons la fin d’une période de quarante ans sans inflation. Ceux ayant connu la précédente période d’inflation ne sont plus en activité, il faut apprendre. Le prix annuel fixe reconduit d’une année sur l’autre avec 1 à 2 % d’augmentation et des négociations qui n’en finissent pas, ce n’est plus possible. Il faut s’adapter. S’il y a une augmentation continue des prix de l’énergie et des matières sèches et qu’en face nos clients ne veulent que des négociations annuelles, ça ne marchera pas.
Comment se sont passées vos renégociations ? Est-il possible de préserver la marge, pour qu’elle ne se réduise pas à peau de chagrin ?
En face de nous, nous avons des professionnels. Dans une négociation B2B, les acheteurs connaissent le contexte des hausses des coûts de production. L’augmentation des prix est une question de survie pour la continuer de notre activité. Il faut bouger ! L’absence d’évolution des coûts, avec l’inflation faible depuis quelques années, a construit un équilibre autour des marges sur nos produits : mais c’était un équilibre précaire. Et nous n’avons pas de confort de marges pour vin.
Nous avons ouvert des renégociations dès les premières semaines du conflit. Il y a eu des discussions et de l’écoute de nos clients. Les professionnels de la filière et de la distribution savent faire la part des choses. Mais les négociations ne sont pas toujours très faciles avec la Grande Distribution (GD).
Entre le conjoncturel avec la baisse du pouvoir d’achat et le structurel de la déconsommation de vin, comment voyez-vous les évolutions du marché de la GD ?
En GD, la Loire reste encore un bon élève. Notre été s’est bien déroulé pour les rosés, avec une évolution favorable des blancs, une croissance des rouges (avec un bon trio en Saumur Champigny, Bourgueil et Saint-Nicolas). Les fines bulles vont bien : crémant de Loire et Vouvray. L’enjeu des prix est de rester accessibles face aux consommateurs et à leurs budgets.