orté par de plus faibles degrés alcooliques et une gamme "sans alcool" en plein essor, le succès des bières alimente les envies de la filière vin de faire tomber ses degrés. Arrivant à point nommé, le règlement européen 2021/2117* ouvre la désalcoolisation partielle jusqu’à 0,5°.alc aux vins sous Appellation d’Origine Protégée (AOP) et à Indication Géographique Protégée (IGP). « Il existait déjà une possibilité de désalcoolisation dans la limite de 20 % du degré alcool » rappelle Caroline Blot, la responsable du pôle vin, boissons spiritueuses et cidre de l’Institut National de l’Origine et de la Qualité (INAO).
Mise à l’ordre du jour du comité national des vins IGP du 13 octobre dernier (avant d’être évoqué par les vins AOP en novembre), la nouvelle réglementation de la désalcoolisation laisse la possibilité de s’en saisir à chaque Organisme de Défense et de Gestion (ODG). Pouvant être plus restrictive que le cadre européen (en relevant le plancher minimal par exemple), l’intégration de la désalcoolisation partielle dans le cahier des charges passant par la précision des méthodes de désalcoolisation choisies et le descriptif organoleptique des vins partiellement désalcoolisés pointe Caroline Blot, notant l’enjeu de perte de typicité aromatique après la désalcoolisation (ce qui passe par le rééquilibrage des vins désalcoolisés : édulcoration, hydratation…).


« Ce sera au choix de chaque ODG, chacun se positionnera selon ses marchés dans le cadre de la réglementation » indique Éric Paul, le président du comité vin IGP de l’INAO, confirmant l’enjeu de maintenir le profil produit en termes aromatiques. « Je pense faut avancer rapidement là-dessus » ajoute Gérard Bancillon, le président de la Confédération des vins IGP de France, soulignant que « le commerce commence à être demandeur, ce n’était pas le cas avant » et qu’« il faut proposer des produits plus faciles à boire. Sans ajouter eau, ce serait une Boisson Aromatisée à Base de Vin (BABV, les rosés pamplemousse), qui ne marchent plus. »
« On sent l’intérêt des marchés » pointe Éric Paul, qui juge encore prématuré d’évoquer des ODG intéressés : « ça suscite de l’intérêt, il y a des gens qui y songent. » Au sein de l’INAO, il n’y a eu aucune demande à ce jour rapporte Caroline Blot. Négociante spécialisée dans les vins désalcoolisés, Mathilde Bouchalin, la PDG de la maison Chavin (basée à Béziers depuis 2012), ne s’attend pas pour sa part à une production rapide sous AOP et IGP : « c’est encore trop tôt. Il y a monde entre ce que dit et ce qui est fait. Mais je suis très heureuse qu’il y ait des discussions de l’Union Européenne dessus. On voit une montée en puissance. »
* : « Il y a lieu d'autoriser uniquement la désalcoolisation partielle pour les vins bénéficiant d'une indication géographique protégée ou d'une appellation d'origine protégée. En outre, afin d'assurer la clarté et la transparence tant pour les producteurs que pour les consommateurs de vins bénéficiant d'une indication géographique ou d'une appellation d'origine, il convient de prévoir que, lorsque des vins bénéficiant d'une indication géographique ou d'une appellation d'origine peuvent être partiellement désalcoolisés, le cahier des charges de l'indication géographique ou de l'appellation d'origine devrait contenir une description du vin partiellement désalcoolisé et, le cas échéant, les pratiques œnologiques spécifiques à utiliser pour faire du vin ou des vins partiellement désalcoolisés, ainsi que les restrictions pertinentes pour les faire » indique la réglementation communautaire.