32, c’est le nombre de coopératives en Champagne soit plus de 14 000 coopérateurs d'après la Fédération des Coopératives Vinicoles de la Champagne (FCVC) .Un maillon fort de la structuration de la filière champenoise qui ne cesse depuis plusieurs années de « montrer les crocs ».
Souvent pointées du doigt par les buveurs d’étiquettes, qui s’en détournent, les coopératives ont su prendre la tangente pour proposer des cuvées exigeantes et affiner un savoir-faire oenologique.
Parmi les coopératives qui comptent en Champagne, Nicolas Feuillatte - dont la fusion avec une autre coopérative (CRVC) a été acté en décembre 2021 pour donner naissance à un géant « Terroir et Vignerons de Champagne » -, vient renverser le marché avec une proposition « luxe mais accessible ».
Dernière en date, la « Cuvée Légendaire » proposée en grande distribution au prix de 39,90€ (prix conseillé) là où les bruts dominent le marché.
« Guillaume Roffiaen, notre chef de caves, a créé une collection connue sous le nom de Cuvée Spéciale : un millésime, puis un Blanc de Blancs et un Rosé d’assemblage. La suite logique était d’agrandir cette famille et de la doter d’une tête de cuvée, son expression ultime et sophistiquée, que nous lançons sous le nom de Cuvée Légendaire », explique Christophe Juarez, directeur général Terroirs et Vignerons de Champagne.
Une niche économique florissante pour le « champagne préféré des Français », les ventes de cuvées premium représentant désormais 30 % du chiffre d'affaires en 2022.
Autre cheval de bataille - outre l’aspect oenologique -, le recrutement de nouveaux consommateurs pour ces coopératives, fondé le plus souvent sur une base de données de clients fidèles et « historiques ».
À ce sujet, Christophe Juarez ne cache pas ses intentions : « La cible de clientèle sont les jeunes urbains fréquentant les magasins de proximité, les amateurs qui se mobilisent pour les Foires Aux Vins, l’achat cadeau lorsqu’on est invité à dîner, la belle bouteille que l’on s’offre sans trop se ruiner. L’idée est aussi de dynamiser ce segment et de venir soutenir les enseignes dans leur démarche de premiumisation du vin, et du Champagne en particulier ».
Même son de cloche à l’Union Champagne (Champagne de Saint-Gall) qui vient de lancer son dernier millésime « Orpale 2002 » (150 €, photo ci-dessous) :
« Nous sommes en recherche perpétuelle de nouvelles propositions oenologiques, l’idée c’est d’être en mouvement et d’offrir un éclairage sur notre savoir-faire et évidemment d’ouvrir à un certain profil de clientèle, plus connaisseur. », affirme Cédric Jacopin, chef de caves à l’Union Champagne.


Un sentiment relaté par Martin Cubertafond, consultant en stratégie et maître de conférences à Sciences-Po Paris, auteur de Stratégies et Marketing du Champagne (Eyrolles, 2018), dans une interview accordée en 2020 à la blogueuse Sophie Claeys : « Le champagne n’a pas trop le choix aujourd’hui : avec d’un coté la concurrence des autres effervescents sur l’entrée de gamme et de l’autre l’augmentation du coût du kg de raisin (qui fait qu’il n’y a pas de modèle économique pérenne pour des champagnes vendus à moins de 15 € aux consommateurs), il est destiné à avoir une stratégie de valeur et non de volume. Il doit donc faire plus non pas avec moins, mais avec autant. »
Un travail sur l’image et la qualité, sans toutefois renier sur la commercialisation des bruts, porte d’entrée de ces marques.
Avec un chiffre d’affaires HT en 2021 de 206,8 millions € (M€), un résultat quasi similaire à 2019 (année de référence pré-COVID), le centre vinicole Nicolas Feuillatte (TEVC) confirme sa vitalité, quant à la premiumisation, elle devrait à terme, conforter ces très bons chiffres.