On ne grimpe pas au rideau mais nous ne sommes pas catastrophés, et nous gardons en tête que d’autres régions ont bien plus souffert de la sécheresse ».
Il y a 15 jours, supervisant la récolte des premiers chardonnays destinés aux vins de base ou aux vins tranquille, Philippe Dry prenait la situation avec moins de philosophie, trop préoccupé par les premiers rendements enregistrés. « Heureusement, mi-août, nous avons reçu 30 à 80 mm de pluie, de l’Est du vignoble, en allant vers les Côtes du Rhône, aux Cévennes, le secteur le plus arrosé » explique le directeur général des Vignerons Ardéchois, implantés sur 6000 hectares.
La pluie a débloqué la maturité. « Certaines vignes, notamment celles implantées étaient vraiment en souffrance, l’eau leur a fait du bien ».
Malgré cet épisode salvateur, Philippe Dry ne pense a peu d’espoirs de dépasser la barre des 50 hl/ha. C’est 30% de moins que lors de millésimes plus classiques.
Et, le vignoble étant principalement en IGP, il pourrait théoriquement aller jusqu’à 110. « Nous en sommes très loin et quelque part, c’est ce qui nous permet de tirer notre épingle du jeu et de vendre un peu plus cher que dans d’autres vignobles. Mais à 50 hl/ha, l’équation n’y est plus pour nos vignerons ».
Conseillère viticole à la Chambre d’agriculture d’Ardèche, Amandine Fauriat confirme le manque de volume. « Le rendement ne sera pas au rendez-vous de ces vendanges même si la pluie a regonflé les baies et que la vigne a meilleure mine ».
Les précipitations ont également eu le mérite de laisser le temps aux vignerons de respirer. « Sans elles, ils auraient tous dû se dépêcher de tout rentrer. Ils sont désormais plus sereins, d’autant qu’aucune dégradation sanitaire n’est à craindre car le raisin est très sain ».
Les vendanges repartent tranquillement cette semaine. La roussanne est prête. « Certains commencent aussi à vendanger les futurs rosés » reprend Philippe Dry.
La qualité est au rendez-vous. « En rouge, les baies sont petites et devraient donner des vins bien structurés. Les pépins ne sont pas encore mûrs mais le retour du soleil et la baisse des températures devraient aider ».
Les vendanges devraient battre leur plein début septembre. Dans les Cévennes, les Vignerons Ardéchois pensent rentrer un gamay bien fruité. « Ailleurs, nous devrions davantage nous orienter sur un millésime de garde, à boire un peu moins rapidement qu’à l’accoutumée » anticipe Philippe Dry.
Comme dans de nombreux vignobles, l’hétérogénéité est de la partie. « Cela est compliqué à gérer, mais ne nous dérange pas forcément car elle va nous permettre de réaliser de beaux assemblages et d’avoir une belle gamme de monocépages ».
Revenant sur l’augmentation des épisodes de sécheresse, le directeur des Vignerons Ardéchois milite pour les retenues collinaires en hiver. « Nous ne retenons qu’1,2% des eaux de pluie dans la région, contre 20% en Espagne. Ces mesures bénéficieraient à tout le monde et favoriseraient la biodiversité, mais les vignerons n’osent pas défendre ces projets de peur d’être à nouveau pris en grippe par la société. Sans vrai geste politique, nous ne pourrons plus installer de jeunes ».