Déjà qu’il n’est pas facile de contrôler le mildiou cette année, cela relève de l’exploit quand on est à côté de vignes abandonnées » pose Stéphane Gabard, le président du syndicat viticole des AOC Bordeaux et Bordeaux Supérieur. Dans le vignoble bordelais, les parcelles en friche marquent le paysage de ce millésime 2021 à la forte pression mildiou, et tapent sur le système des vignerons devant lutter pour maintenir leur potentiel de récolte malgré les éléments (gel, grêle, coulure, échaudage…). Sanitairement, « le risque est là dans un vignoble avec une aussi forte pression » reconnaît Stéphane Gabard, qui entend monter l’incompréhension de viticulteurs ne comprenant plus les obligations de traitements obligatoires contre la flavescence dorée quand les vignes voisines n’ont pas été entretenues de toute la campagne.
S’il n’existe pas d’estimation précise des friches dans le vignoble bordelais, ces surfaces croissantes pourraient conduire les pouvoirs publics à s’emparer d’un sujet butant, depuis des années, sur les difficultés d’obtenir des arrachages administratifs. « Les vignes en friche deviennent un sujet préoccupant, exacerbé par le problème sanitaire aujourd’hui. Peut-être que la quantité de parcelles va aider à faire avancer le dossier » espère Stéphane Gabard. Cette croissance des parcelles ensauvagées témoigne des difficultés économiques du vignoble bordelais, entre départs à la retraite d’exploitants les abandonnant faute de succession et réduction des surfaces des exploitations mettant un terme à des fermages (baux précaires comme locations longues durées).
Pour assainir le vignoble, Stéphane Gabard a défendu la solution de l’aide à arrachage afin d'offrir une aide aux vignerons souhaitant quitter la filière sans reprise de leur domaine. Mais il s’avère que la réglementation européenne bloque tout projet en ce sens. Ne permettant notamment pas créer une cotisation obligatoire pour financer une telle prime. « Aujourd’hui, il n’y a pas de solution » constate Stéphane Gabard, fréquemment sollicité par des vignerons préparant leur retraite et se trouvant dans une impasse.
Faute de pouvoir aider ceux souhaitant quitter le vignoble, le syndicat de l’AOC Bordeaux compte soutenir la rentabilité des domaines ayant des débouchés commerciaux. Concernant les rendements 2021, « on essaie de remonter les Bordeaux et Bordeaux Supérieur au niveau de 2019. En passant de 50 hl/ha en 2020 à 54 hl/ha en 2021, pour redonner de l’oxygène à ceux qui s’en sortent commercialement. Hélas peu vont en profiter avec le gel, les difficultés de floraison, le mildiou… » note Stéphane Gabard.
Malgré le manque de visibilité actuellement dû à la pandémie de covid-19, Stéphane Gabard souhaite garder le cap sur des solutions d’avenir. L’Organisme de Défense et de Gestion (ODG) vient de recruter deux nouveaux profils pour soutenir sa commercialisation, avec des opérations de promotion toujours plus en synergie avec le Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB).
« Dans les espoirs, il y a une légère remontée des cours et avec des ventes identiques à la récolte 2020, ce qui implique qu’il n’y a plus de stockage. Il y a même un risque de tensions en blancs. Dans une situation normale, on aurait bon espoir de voir les cours du vrac remonter. Mais il y a un certain attentisme actuellement » conclut Stéphane Gabard.