« De toutes les catégories, les boissons alcooliques se sont montrées particulièrement résistantes à la crise, l'adaptabilité ayant été au centre de tout » a insisté Daniel Mettyear, directeur de recherches vins et Afrique au sein du cabinet britannique IWSR, lors d’un webinaire presse organisé ce 10 juin par Vinexposium, dans le cadre de Wine Paris Vinexpo Paris Goes Digital. Que ce soit les consommateurs, qui ont épousé de nouveaux modes d’achat et de consommation, ou bien les opérateurs qui ont rapidement modifié leurs stratégies pour s'adapter à un scénario inédit, la flexibilité et l'adaptabilité ont permis non seulement de limiter la casse, mais même d’engranger des résultats positifs sur certains marchés. Dans le domaine des vins, qui ont reculé globalement de 6,5 % l’an dernier, le Brésil, par exemple, a fait un bond de 28 %. « Certes, ce taux de croissance ne pourra se maintenir sur la durée », reconnaît l’analyste, « mais le recrutement de nouveaux consommateurs et la plus grande visibilité du vin auront servi à transformer le marché brésilien ».
Bénéficiant d’un « coup de pouce Covid », certains marchés matures comme le Canada, le Royaume-Uni et l’Allemagne ont assisté à une inversion de tendance, même si, là aussi, la tendance de fond risque de reprendre le dessus. De leur côté, les Etats-Unis, la Pologne et la Colombie ont affiché de bonnes performances et l’Italie – très dépendante du secteur CHR et du tourisme – n’a connu qu’un déclin modéré. En revanche, le marché chinois continue d’être en berne. « Malgré un certain retour à la normale, la Chine n’a pas réussi à faire la transition vers la consommation à domicile, et n’a pas su gérer l’absence de grandes et moyennes réceptions qui sont les moteurs de sa consommation » précise Daniel Mettyear. Et l’inversion de tendance n’est pas prévue à horizon 2025 : les vins devraient y baisser de 7,7 % entre 2021 et 2025, tirés vers le bas par une baisse des importations.
Outre les performances inattendues engrangées dans des pays fortement touchés par la pandémie, 2020 a réservé d’autres surprises. A commencer par les vins effervescents, qui ont mieux résisté que les vins tranquilles, avec une baisse de 5 %. Vin de fête par excellence, il illustre la mutation des habitudes de consommation au sein de la catégorie. « Ce résultat met en exergue le changement radical d’attitude par rapport aux effervescents qui s’opère depuis quelques années sur la manière de les consommer et les occasions de consommation » note l’analyste. Si les Colombiens ont développé un faible pour le lambrusco, les femmes russes ont fait monter en flèche les ventes de Cava, d’Asti et de Prosecco. La résilience des bulles en temps de crise fait dire à l’IWSR que les effervescents retrouveront leur niveau d’avant-crise en 2022, avant les boissons alcooliques dans leur ensemble, en 2023.
Pour l’année en cours, le cabinet prévoit une hausse de 1,7% en volume pour les vins, contre 3% pour l’ensemble des boissons alcooliques, puis un taux de croissance composé annuel de 0,4% entre 2021 et 2025, versus 1,5 %. Globalement, la croissance sera portée par le développement continue du commerce électronique, une consommation à domicile de plus en plus sophistiquée, la premiumisation, la tendance bien-être et la commodité, en termes de formats de packaging. Si les volumes devraient continuer de croître, la quantité d’alcool pur devrait avancer moins vite, sous l’effet de la montée en puissance des produits sans alcool ou faiblement alcoolisés.