Aujourd’hui, on n’est pas à se demander "est-ce que Bordeaux va muter ? Est-ce que Bordeaux va se convertir au bio suffisamment vite ?" La question c’est : "est-ce que le marché des vins bio va suivre la transformation et l’arrivée des vins bio qui va être massive dans les années à venir ?" » pose Bernard Farges, le président du Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB) ce 18 mai, lors d’une visioconférence de la Cité du Vin (animée par Xavier Sota, journaliste politique du Sud-Ouest). Soulignant l’importance actuelle de la conversion à la bio du vignoble bordelais (dont sa propre exploitation), le viticulteur de l’Entre-deux-Mers précise que si « nous ne sommes pas certains que le marché absorbera tout ce volume de bio en temps voulu, ça ne veut pas dire que la croissance s’arrêtera. Je ne sais pas ne sais pas si ce sera 20, 30 50, 60 ou 100 % de bio à Bordeaux. Personne n’en sait rien. »
Le seul constat actuel est la valorisation des cours du bio, qui motive un certain nombre de convertis dans le vignoble. « En ce moment précis, nous manquons de vin bio à Bordeaux. Il y a une tension sur les prix du vin bio à Bordeaux, mais le marché reste étroit aujourd’hui. Si le marché était alimenté de manière plus forte et rapide, nul ne sait s’il pourrait suivre » prévient Bernard Farges. Qui rappelle le cas des déconversions massives du millésime 2015 en vallée-du-Rhône (causées par l’abondante récolte du millésime 2014, faisant dévisser les cours, ainsi que les ravages du black-rot et de la flavescence dorée).


Se voulant optimiste alors que les réseaux de distribution des vins de Bordeaux connaissent une embellie (de la relance chinoise à la suspension des taxes américaines, en passant par la réouverture des restaurants), Bernard Farges prévoit désormais « de belles éclaircies et un horizon dégagé » à l’ensemble de la filière des vins bordelais. « Bordeaux a cette diversité de produits, entre des vins très charpentés, des grands classiques, des grandes marques, des noms très connus et puis des vins qui sont élaborés de manière différente. Des vins sans souffre, des vins nature, des bio et pas bio. Tout existe à Bordeaux et tout doit être mis en avant parce que le modèle unique n’existe pas. En revanche, il y a toujours un air de famille. Il y a des turbulents dans la famille, mais ça fait partie de la richesse » déclare le président du CIVB.
Réagissant à la carte de l’association Générations Futures, pointant du doigt les tonnages d'achats girondins de produits phytos, Bernard Farges est cassant : « tout dépend de comment on regarde les choses. Et si on veut être à peu près objectif et honnête, on peut rajouter que ce tonnage est directement lié à l’utilisation de plus en plus importante de produits bio par des producteurs conventionnel, comme des producteurs qui passent en bio. Parce qu’utiliser du souffre et du cuivre pèse plus, qu’on utilise en plus grande quantité. Quand on met 2 kilos de cuivre ou 5 kilos de soufre comme en ce moment dans les vignes, c’est différent d’un produit de synthèse que l’on utilise à 0,15 litre/hectare. Cet indicateur du tonnage de pesticides indique une évolution des pratiques très positive. […] Ce sont des indicateurs qui montrent les tonnages de produits bio qui progressent, et surtout les quantités des produits plus dangereux qui s’effondrent. »