a demande charentaise de 2 306 hectares d’autorisations de nouvelles plantations en 2021 vient d’être votée ce 18 novembre par la commission permanente du comité national des appellations viticoles de l'Institut National de l'Origine et de la Qualité (INAO) et envoyée pour validation au conseil spécialisé vin de FranceAgriMer (qui se réunit le 9 décembre). Alors que de nombreux vignobles demandent des exonérations de charges et ont bénéficié d'aides à la distillation, la volonté charentaise d'agrandissement a été particulièrement débattue. Il faut dire que ces surfaces représentent 45 % des demandes nationales de nouvelles plantations en 2021 note Éric Billhouet, le président de l'Organisme de Défense et de Gestion de l'AOC Cognac (ODG).


Mais face à l’ampleur de la pandémie de coronavirus, qui touche également les eaux-de-vie charentaises, « nous avons révisé notre business plan en juin à la baisse (de 3 474 ha à 2 306 ha). Nous sommes raisonnablement optimistes, prudents face à une situation sanitaire globalement délicate et confiants face au rebond intéressant » explique Patrick Raguenaud, le président du Bureau National Interprofessionnel du Cognac (BNIC).
D’après les dernières statistiques commerciales de l’interprofession, les ventes de Cognac ne semblent pourtant pas épargnées par la crise sanitaire. De novembre 2019 à octobre 2020, les expéditions de Cognac chutent de 15,7 % par rapport à l’année glissante précédente (pour 184 millions de cols expédiés et 2,7 milliards d’euros de chiffre d’affaires réalisé). Dans le détail, les marchés suivent des dynamiques différentes, l’Amérique du Nord résiste avec un repli limité de ses importations à -4,1 % (pour 101 millions cols et 1,3 milliards €), alors que l’Europe s’érode nettement de -14,4 % (33 millions cols et 373,1 millions €) et que l’Asie s’effondre de -31,5 % (40 millions cols pour et millions €)


« Cognac a connu deux mois compliqués, en avril et mai, mais depuis juin nous sommes revenus au niveau de 2019 » explique Patrick Raguenaud, qui souligne que « la catégorie est très résiliente grâce à un réseau de distribution puissant, des marques diverses et établies... Il faut saluer la très grande agilité du négoce, qui s’est adapté rapidement à la nouvelle donne des lieux de consommation (moins au bar et plus à la maison) et des réseaux de distribution (important développement du e-commerce). Nous avons retrouvé le niveau d’avant crise. Les perspectives sont positives. »
Estimant qu’il n’y a plus de surexportation sur le marché américain par crainte de surtaxes (« ce qui est importé est consommé »), Patrick Raguenaud souligne que la crise sanitaire ayant touché la Chine au moment des fêtes du nouvel an, les stocks pèsent encore sur les ventes. À commencer sur celles des qualités anciennes, également touchées par l’arrêt des ventes en duty-free (-30,3 % pour les anciennes eaux de vie à 15 millions cols pour 714 millions €, contre -10,3 % pour les VS à 103 millions cols pour 1,1 milliard €, XO et au-delà).
Remettant en perspective les chiffres commerciaux du BNIC, son président compte voir les tendances de reprise se confirmer en novembre. Pour les prochaines demandes d’autorisations de plantations, une révision du Business Plan aura lieu en avril 2021, suite à la prise de fonction du nouveau président du BNIC cette fin d’année. « Nous restons confiants et optimistes sur le moyen terme, les perspectives sont très favorables » souligne Patrick Raguenaud. Ces arguments doivent désormais être assimilés par le reste du vignoble français, qui ne connaît pas la même dynamique et se souvient des arrachages charentais d'il y a vingt ans.
« Il est toujours possible de refaire l'histoire, mais les autres vignobles doivent surtout comprendre que ces plantations nouvelles sont une décision prise pour produire dans cinq ans » conclut Éric Billhouet.