« Modifier l'itinéraire viticole ne suffira pas à empêcher la dégradation de l'équilibre entre l'alcool et l'acidité des vins liée à l'augmentation des températures » préviennent Laurent Torregrosa et Charles Romieu, à l'Institut Agro de l'Université de Montpellier. « Intervenir en cave non plus. »
Ces chercheurs misent plutôt sur la sélection de variétés adaptées au réchauffement climatique. « Elle pourra permettre d'atteindre des corrections d'acidité bien supérieures à celles autorisées par la législation actuelle » indiquent-ils.
C'est ce qu'ils ont constaté en encadrant la thèse d'Antoine Bigard, dont les résultats viennent d'être publiés. Le doctorant a étudié 12 variétés, dont le grenache, le cinsault, le petit manseng et le muscat d'Alexandrie, et 21 génotypes de microvignes*.
A maturité, la concentration de leurs baies en sucres a varié de 750 à 1350 mmol/L. Les variétés classiques ont accumulé plus de sucres et moins d'azote que les microvignes. Les baies qui contenaient beaucoup d'azote affichaient aussi une concentration importante en acide malique. Les chercheurs ont calculé des rapports acide malique sur acide tartrique de 0,13 à 3,62.Â


Les teneurs en cations magnésium et calcium ont beaucoup varié en fonction du génotype de chaque souche. Pour le potassium, elles sont allées du simple au double, de 28 à 57 mmol/L. « Et l'acidité titrable a varié de 38 à 215 meq/L, alors que l'Organisation Internationale de la Vigne et du Vin n'autorise au maximum qu'une correction de 54 meq/L, que ce soit par addition, résine échangeuse de cations, ou par électrodialyse » se réjouissent les chercheurs.
Ils comptent désormais tirer le meilleur de cette diversité naturelle en réalisant des croisements. « L'objectif est de moduler la croissance des baies, le chargement en sucres, la synthèse des acides organiques, et l'importation des différents cations » affirment-ils.
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*Les microvignes proviennent d'une mutation naturelle du pinot meunier, responsable d'une villosité des feuilles et de l'inhibition de certaines hormones de croissance. De petite taille, elles n'ont besoin que de six mois pour produire une fleur à partir d'un pépin et sont facilement cultivables en grand nombre en conditions contrôlées. En revanche, le développement des raisins est similaire à celui des variétés classiques. Les microvignes facilitent les recherches des scientifiques.