ardien du temple à Sauternes, avec son statut d’ancien gestionnaire du château d’Yquem, Alexandre de Lur Saluces ne manque pas de noblesse pour dézinguer les initiatives qui ne respectent pas le prestige des vins liquoreux. Preuve en était donnée ce 12 décembre, lors du débat C’ dans le vin à la Cité du Vin. Face aux demandes de commentaires du journaliste Jérôme Baudouin (RVF), l’actuel propriétaire du château de Fargues a aligné les jugements en forme d’anathèmes.
Développer des vins blancs secs pour celui qui a lancé la cuvée Y de Yquem ? « C’était une fantaisie, je ne considérais pas ça comme un objectif très important. C’est un peu une solution désespérée, et désespérante… » Tenter de nouveaux modes de consommation en faisant du Sauternes un ingrédient de cocktail ? « Ça me laisse l’idée d’un assassinat. C’est vraiment noyer le bébé, c’est navrant. » Changer le format des bouteilles pour qu’elles soient plus petites, voire de la taille d’un tube. « C’est un artifice, ce n’est pas ça le problème… » tacle-t-il.


Pour lui, tous ces essais d’adaptation du produit à la consommation sont aussi vains que contre-productifs. « On se débat à Sauternes, les temps sont durs, par conséquent on fait toutes sortes de tentatives » note Alexandre de Lur Saluces. Mais pour lui, cela revient à « tuer un processus naturel, merveilleux. Le Botrytis, c’est un prodigieux miracle qu’il faut respecter. C’est une alchimie prodigieuse. »
Estimant que la mévente d’un vin qui a suscité tellement d’enthousiasme est un cas d’école, il énonce des pistes d’explication, qui pourraient conduire à des solutions. « Il y a incontestablement des difficultés dans la commercialisation, parce que l’on a probablement pas suffisamment fait vivre cette vendange très particulière » estime-t-il. Appelant à la mise en place d’une pédagogie émerveillée et non savante, il souligne que « nous avons un négoce qui peine à vendre un vin qui demande plus de temps. Les négociants, eux-mêmes, ne semblent pas assez renseignés et visiteurs de nos vignes, surtout au moment des vendanges. » Pour Alexandre de Lur Saluces, tout le miracle de Sauternes se concentre lors de la quête, pour ne pas dire la chasse, à la pourriture noble. Reste à faire partager cet esthétisme au plus grand nombre.