Régularité et la reproductibilité des processus sont au coeur de la R&D pour une tonnellerie de...

L'innovation en tonnellerie : mesures électrochimiques, changement climatique, profil génétique...

 Il est difficile de dater précisément le moment où la futaille de chêne est devenu un outil Å“nologique » posait Henri de Pracomtal en ouverture du séminaire, sur la recherche et développement, que la tonnellerie Taransaud tenait ce 9 décembre à Bordeaux. Le président de Chêne & Compagnie rappelait qu'avec plus de 2 000 ans d'existence la tonnellerie a non seulement eu l'occasion de se perfectionner, mais aussi de se réinventer (des copeaux étant déjà utilisés en 1600, « rien de nouveau donc ! ») et de suivre les modes (dernièrement moins de bois neufs, plus de grands contenants...). Le but du symposium restait avant tout d'illustrer par des essais la nécessité de moderniser la tonnellerie, tout en, discours commercial oblige, s'inscrivant dans le cadre des « traditions et fondamentaux de la qualité des barriques : vieillissement long et naturel des merrains, chauffre traditionnelle au feu de bois, l'expertise des hommes... » énumérait Henri de Pracomtal (photo).

Avant d'espérer confiner à la précision, la tonnellerie prépare son évolution avec la recherche fondamentale, comme la mesure du potentiel antioxydant du bois, ou CaOx « du grand réservoir antioxydant qu'est le bois » selon les mots du docteur Marie Mirabel (recherche fondamentale pour Taransaud). Ayant développé un capteur électrochimique spécifique, à base de micro-électrodes, la chercheuse peut mesurer pour chaque barrique son CaOx, qui est dû à sa matière première (composés comme le gaïacol, l'acide ellagique, le furfural...), mais aussi des processus de production (logiquement le CaOx diminue avec la durée de séjour en parc, avec la chauffe...). En pratique, ces recherches ont abouti sur une nouvelle barrique pour Taransaud, la Pure T, dont le CaOx a été optimisée pour éviter l'oxydation prématurée des vins blancs. D'autres outils innovants en sont encore au stade expérimental, comme les tests de conformité génétique qui permettront de valider les dispositifs de traçabilité. Développée en partenariat avec l'INRA, l'étude par marqueur génétique des chênes de la forêt de Tronçais a déjà été validée à l'échelle d'un parc de merrains, et pourrait aboutir sur un test d'origine plus général des bois.

L'inventivité des équipes de R&D s'attaque également à l'enjeu du changement climatique. Ainsi Anne-Charlotte Mandreau (ingénieur R&D pour Taransaud) a travaillé sur l'adaptation des techniques de vieillissement des bois sur parc. Se déroulant à l'air libre, cette technique naturelle pourrait pâtir d'une augmentation des températures estivales (le séchage étant plus rapide et potentiellement moins qualitatif, les merrains pouvant se fendre et l'implantation des microflores du bois pouvant réduite...). L'œnologue a essayé différentes techniques pour réguler la déshydratation des bois (paramètre piloté en mesurant l'évapotranspiration des merrains). Si les brumatisateurs, les toiles d'ombrage et le sol recouvert de sable n'ont pas donné de résultats satisfaisants, la mise en place de brise-vents permet de ralentir significativement la vitesse d'évacuation de l'eau. Des haies sont ainsi plantées autour du parc de Taransaud pour couper les vents chauds de Sud-Est. Une pratique non interventionniste qui améliore la régularité et la reproductibilité des processus, selon Marc Duseaux, directeur général de la tonnellerie.

 

 

[Photo : Henri de Pracomtal ce 9 décembre à la Faïencerie (Bordeaux)]